Les passionnés de tirs à l’ancienne se retrouvent chaque année à Ancenis.

Reportage aujourd’hui à Ancenis, au stand de l’Aubinière où se retrouvent régulièrement les amateurs de tirs, des passionnés d’armes et d’histoire réunis au sein des Arquebusiers du Pays d’Ancenis, l’un des 14 clubs de tir du département. L’association compte aujourd’hui 260 tireurs.
Les Arquebusiers organisaient au mois d’avril le Rassemblement de la Duchesse Anne, rassemblement de collectionneurs d’armes anciennes venus de toute la France.

[Source]

Inscriptions pour la saison 2014-2015

Le Tir Sportif
un Loisir pour Toutes et Tous

Journées d’informations et d’inscriptions au club de tir.

Le Samedi 30 Août de 10h30 à 17h00

Le Dimanche 31 Août de 09h30 à 11h30

 

LES ARMES DES PALADINS GRIS

Traduction d’un article de W. AUSTERMAN paru dans D.G.W. Blackpowder Annual 1993

La Guerre Civile fut le dernier conflit américain où l’on attendait des officiers supérieurs qu’ils mènent leurs hommes à la bataille en chargeant à leur tête. Il n’était pas rare de voir des commandants de brigade, de division ou même de corps dans les deux armées, agitant un sabre étincelant à l’avant de leurs unités. Les troupes Sudistes furent particulièrement remarquées pour leur élan et leur courage, voire leur témérité, au feu. Leurs meneurs reprenaient nécessairement le vieil idéal Anglo-Celtique du chef guerrier qui se battait en même temps que ses hommes et qui partageait leur destin. C’est pour cela que les tristes champs de bataille de Gettysburg et de Franklin résonnèrent d’échos de Hastings et de Flodden. Le résultat tragique de cette croyance au vieux code du chef qui fonce au combat devant ses hommes fut que, sur 425 officiers supérieurs enregistrés sur les listes des forces Confédérées, 235 d’entre eux, soit 55 %, furent tués ou blessés au champ d’honneur. Soixante dix sept d’entre eux moururent en combattant, et, sur ce total, vingt et un furent blessés au moins une fois avant de l’être mortellement. Sur les 158 généraux qui furent blessés et qui survécurent, trente et un furent touchés deux fois, dix huit trois fois, et une douzaine furent blessés quatre fois ou plus. Quatre d’entre eux furent blessés cinq fois, et trois portaient sept blessures. Le record fut probablement le cas du Brigadier General William R. COX qui, à la fin de la guerre, portait les cicatrices de onze blessures de guerre sur son corps de trente trois ans.

Les armes que portaient ces paladins Gris Ă©taient importantes, autant comme symboles de rang et comme arbitres de diffĂ©rend avec l’ennemi. Bien que ce type de rencontre ne fĂ»t pas ce que l’on attendait de la part de ces officiers supĂ©rieurs, ils se sentaient obligĂ©s de montrer l’exemple en matière de courage et d’agressivitĂ©, en prouvant leur indiffĂ©rence au danger sur le champ de bataille. Il en rĂ©sultat un groupe de commandants dont le choix des armes personnelles fut aussi diversifiĂ© que leur habiletĂ© Ă  s’en servir fut mortelle. Dans l’ensemble, les officiers ConfĂ©dĂ©rĂ©s furent des hommes relativement jeunes, mais beaucoup avaient dĂ©jĂ  vu le combat lors de la Guerre du Mexique ou sur la frontière. Beaucoup de ceux qui se plongèrent dans la Guerre de SĂ©cession depuis la vie civile avaient Ă©tĂ© exposĂ©s au combat personnel sous la forme de duels ou de rencontres similaires. De jeunes gĂ©nĂ©raux tels John Hunt MORGAN avaient dĂ©jĂ  vu des hommes piquĂ©s au bout d’une pointe de lance Ă  Buena Vista, et Nathan Bedford FORREST s’était une fois battu tout seul contre une foule qui voulait le lyncher, dans la ville sauvage de Memphis. Chasseur et planteur de Caroline du Sud, Wade HAMPTON avait tuĂ© pas moins de quatre vingt ours avec seulement son couteau. Un jour qu’il Ă©tait en patrouille sur le Territoire de New Mexico dans les annĂ©es 1850, l’ancien Lieutenant du U.S. Regiment of Mounted Riflemen William H. JACKSON abattit un grizzly d’un seul coup de sabre. Le gĂ©nĂ©ral Albert Sidney JOHNSTON se rappelait un duel dans lequel il s’était battu contre un autre officier alors qu’il commandait la toute petite armĂ©e rĂ©gulière de la RĂ©publique du Texas dans les annĂ©es 1830. Le Brigadier General Pierre G.T. BEAUREGARD, commandant le bombardement de Fort Sumter, et le General Joseph E. JOHNSTON, autre prĂ©nom, il y en a donc deux, acquirent leur gloire de commandeurs des forces Sudistes Ă  la bataille de Manassas en Juillet 1861, première grande action terrestre de la guerre. Par la suite, BEAUREGARD occupa plusieurs commandements rĂ©gionaux sur les théâtres de l’Est et de l’Ouest, alors que JOHNSTON resta Ă  la tĂŞte de l’ArmĂ©e de Virginie jusqu’à ce qu’il fĂ»t blessĂ© au combat Ă  Seven Pines au printemps de 1862. Plus tard, on lui confia le commandement de l’ArmĂ©e du Tennessee de 1861Ă  1864, et Ă  nouveau en 1865. JOHNSTON fut remplacĂ© Ă  la tĂŞte de l’ArmĂ©e de Northen Virginia par Robert E. LEE. LEE et JOHNSTON avaient servi respectivement comme Lieutenant Colonel et Colonel Ă  la tĂŞte du 2nd. U.S. Cavalry, crĂ©Ă© en 1855. Les deux hommes avaient beaucoup servi sur la frontière au Texas contre les Comanche, les Kiowa, et les Apache. Des durs, des durs, rien que des durs…

Tous les deux avaient choisi des revolvers Colt comme armes personnelles. JOHNSTON reçut son revolver de Samuel COLT, qui lui en fit cadeau juste avant la guerre. COLT offrit au cavalier un Model 1860 Army en calibre .44, au numéro de série 2252, une arme sur laquelle on pouvait monter une crosse pour la transformer en carabine. Elle est exposée dans la collection du Musée de la Confédération à Richmond, Virginia.

LEE, quant à lui, était propriétaire de deux Colt de différents modèles. Il acheta, ou on lui offrit, un Model 1851 Navy en calibre .36, fabriqué en 1855. Cette arme, portant le numéro de série 37698, est finement gravée sur le canon et la carcasse, et fut portée pendant toute la guerre dans une fonte. Bien que LEE fût connu pour son agressivité et son empressement à mener ses hommes en personne en cas de coup dur, personne n’a jamais dit ou écrit qu’il avait sorti ce Colt pour s’en servir au combat.

LEE possédait également un revolver de poche Colt Root Model 1855. Il n’y a aucun doute que ce petit pistolet servait d’assurance en cas de capture, pour l’homme qui fut probablement le chef le plus important chez les Confédérés.

BEAUREGARD, un Créole de Louisiane, préférait le revolver Le Mat Français. On le comprend, puisqu’il était partenaire avec le Dr. Jean Alexandre François Le MAT et le Dr. Charles F. GIRARD dans l’entreprise Parisienne qui fabriqua l’arme.

Ces revolvers à neuf coups, dont les Confédérés en achetèrent environ 1500 exemplaires, étaient principalement fabriqués en calibre .42, et possédaient un deuxième canon en calibre .63 que l’on pouvait charger avec de la chevrotine, séparé sous le canon principal. Ce deuxième canon transformait l’arme en fusil de chasse miniature pour le travail à courte distance. Le pistolet Le Mat de BEAUREGARD fut acquis pendant la guerre.

PALADINS-GRIS-2

Le Major General James Ewell Brown STUART, dit « Jeb Â» STUART, Ă©tait un autre amateur de Le Mat et fut l’un des personnages les plus romantiques parmi les Sudistes. On raconte que STUART tenait en main son revolver Le Mat, qui porte le numĂ©ro de sĂ©rie 115, lorsqu’il fut blessĂ© mortellement par un cavalier du Michigan Ă  Yellow Tavern le 12 Mai 1864. Le Major General James Patton ANDERSON de l’ArmĂ©e du Tennessee, portait un Le Mat. Chirurgien pratiquant au dĂ©but de la guerre, il entra au service comme Lieutenant Colonel et gagna sa première Ă©toile en FĂ©vrier 1862. ANDERSON, qui Ă©tait dĂ©jĂ  un chef de Brigade et de Division agressif en 1864, fut sĂ©vèrement blessĂ© lors de la campagne d’Atlanta, mais il Ă©tait prĂ©sent au moment de la reddition de l’armĂ©e en Caroline du Nord. Le revolver Le Mat d’ANDERSON, au numĂ©ro de sĂ©rie 475, survĂ©cut Ă  la guerre et il peut ĂŞtre vu au MusĂ©e de la ConfĂ©dĂ©ration.

Le General Thomas Jonathan « Stonewall Â» JACKSON possĂ©da au moins trois armes sur lesquelles on peut commenter. A l’époque oĂą il Ă©tait professeur au Virginia Military Institute, ou plus tard sur le terrain, il fit l’acquisition d’une paire de revolvers Anglais Adams en coffret. Ces jolies pièces d’armurerie Ă  double action Ă©taient populaires dans le Sud depuis le milieu des annĂ©es 1850, et immĂ©diatement disponibles dans certaines villes Sudistes chez les agents importateurs des sociĂ©tĂ©s Anglaises.

PALADINS-GRIS-4

La bataille entre les inconditionnels des revolvers Adams et ceux des Colt est bien connue. Il y eut plusieurs versions du revolver Adams à double action. Les unes sont chambrées au calibre de .36, les autres en .44, la version commercialisée par Deane, Adams & Deane ne possédant pas de crête de chien. La Massachussetts Arms de Chicopee Falls, Ma., fabriqua environ 1 000 de ces revolvers sous licence pour Adams en calibre .36 à 5 coups.

En 1862, les officiers de JACKSON lui offrirent également un revolver Le Faucheux fabriqué en France. Cette arme à percussion à broche de calibre 12 millimètres, finement gravée, respirait l’ostentation Gauloise et fut loin d’être celle que JACKSON, ce Calviniste taciturne, aurait choisie lui-même. Il y a fort peu à parier que le Adams et le pistolet français aient été portés dans ses fontes, mais il doit avoir préféré le revolver Le Faucheux comme preuve de l’estime de ses subordonnés. Sans aucun doute moins populaire comme arme de combat que le Adams ou le Colt, le revolver Le Faucheux de JACKSON survécut à la guerre et entra dans la collection du Musée de la Confédération. Le Brigadier General Turner ASHBY, l’un des officiers subalternes de JACKSON, possédait trois revolvers. En tant que commandant de la cavalerie de JACKSON, ASHBY servait son chef aveuglément et jusqu’au bout des ongles. Courageux jusqu’à l’extrême et combattant téméraire, ASHBY considérait la guerre comme une espèce de chasse au renard, où les Yankees jouaient le rôle du renard. Son Colt Dragoon en calibre .44 était épaulé par une paire de Colt Navy Model 1851 en calibre .36. Il est probable qu’il avait en main l’un des Colt lorsqu’il fut abattu le 6 Juin 1862, près de Harrisburg, Virginia.

Wade HAMPTON se trouvait Ă  la tĂŞte d’une division du corps de STUART avant que celui-ci ne fĂ»t tuĂ©, et il devint chef de la cavalerie de LEE. On sait que le PrĂ©sident DAVIS offrit Ă  HAMPTON un pistolet de selle Ă  percussion Ă  deux canons superposĂ©s, fait par STAUDENMAYER en Angleterre. Ce pistolet fut l’un de ceux qui avaient Ă©tĂ© portĂ©s par DAVIS au cours de la guerre du Mexique. Sur le terrain, HAMPTON portait un revolver d’une marque inconnue, et il l’utilisa beaucoup. Après la guerre, l’un de ses amis lui demanda combien de Yankees il avait personnellement tuĂ© lors des batailles. HAMPTON rĂ©flĂ©chit un moment, puis rĂ©pondit que le total s’élevait Ă  onze. Â« Et les deux de Trevilian ? Â» rĂ©pliqua l’homme. Â« Ceux-lĂ , je ne les compte pas Â» dit HAMPTON Â« Ils Ă©taient en train de courir. Â» Il n’avait pas comptĂ© non plus les Tuniques Bleues qu’il avait seulement blessĂ©s. Au cours de la campagne de Gettysburg, HAMPTON abattit Ă  125 yards et avec son revolver un Yankee armĂ© d’une carabine. Les deux hommes Ă©changèrent plusieurs coups de feu jusqu’à ce que la carabine du soldat s’enrayât. Chevaleresque, HAMPTON cessa le feu jusqu’à ce que l’autre arme pĂ»t Ă  nouveau tirer, et termina l’affaire en envoyant une balle dans le poignet du Bandeau Jaune. Merde ! A 125 yards, ça fait quelque chose comme 115 mètres. Avec un revolver de type Colt oĂą le guidon conique est censĂ© s’aligner dans une Ă©chancrure en « V Â» dĂ©coupĂ©e dans le chien, c’est-Ă -dire avec des organes de visĂ©e rudimentaires, le type en face devait ĂŞtre bien visible. En tous cas, c’était un manche s’il n’a pas pu descendre le gĂ©gène avant avec sa carabine, et s’il a pris un pĂ©lot dans le poignet, c’est bien fait pour lui.

John Hunt MORGAN s’en vint en guerre comme capitaine de milice en 1861 et, en deux ans, se retrouva à la tête d’une brigade. MORGAN était propriétaire d’une paire de Colt Army Model 1860 en calibre .44, gravés et aux plaquettes de crosses en ivoire, ainsi qu’un Colt Navy Model 1851 en calibre .36. Au début de la guerre, il portait, et se servait, d’un fusil de chasse. Un jour, MORGAN et quatre hommes de troupe mirent toute une compagnie de cavalerie de l’Union en déroute, par une attaque en embuscade qui fut pertinemment exécutée. Bien que ses hommes fussent armés plus tard presque exclusivement de fusils Enfield courts, MORGAN ne perdit jamais foi dans l’efficacité d’une charge de cavalerie menée avec des revolvers qui crachant autant de plomb et de feu qu’ils pouvaient le faire.

PALADINS-GRIS-5

Le Brigadier General Henry H. SIBLEY, un vétéran du service sur la frontière avec le vieux 2nd. Dragoons, mena une brigade de régiments montés Texans dans une invasion qui tourna mal, vers le Territoire du Nouveau Mexique au début de 1862.

SIBLEY possédait un Whitney en calibre .36, superbement préparé en coffret, mais il est peu probable qu’il eût pu toucher quoi que ce soit avec puisqu’il fut rarement à jeun pendant toute cette campagne désastreuse à travers le désert. A la fin de l’expédition, les chefs écœurés de son régiment espéraient qu’il retournerait le Whitney contre lui avant d’accepter un poste de général dans la Confédération.

Les Texans adorateurs de Colt avaient un bien meilleur chef en la personne du Brigadier General Ben Mc. CULLOCH. Un vétéran de la Guerre du Texas pour l’indépendance en 1836 et ancien Ranger sur la frontière, Mc. CULLOCH se vit offrir le 1er. Janvier 1848, par Samuel COLT en personne, l’un des premiers modèles de production du revolver Dragoon de 1848. Le pistolet, au numéro de série 1337, lui servit pendant plus de dix ans avant qu’il fût engagé dans les forces Confédérées. Parmi les unités sous son commandement, on trouvait la Compagnie A du 3rd. Texas Cavalry, armée exclusivement de revolvers et de carabines à répétition Colt. Mc. CULLOCH arborait un uniforme de velours noir et portait son Colt à la ceinture. Il fut tué par un tireur d’élite de l’Union, alors qu’il menait la charge à Pea Ridge, Arkansas, le 7 Mars 1862.

Le Major General David E. TWIGGS, auparavant colonel du 2nd. Dragoons pendant le Guerre du Mexique, reçut de Samuel COLT l’un des premiers revolvers Model Paterson, Ă  un moment de sa carrière dans l’ancienne armĂ©e. L’âge et la maladie l’empĂŞchèrent d’occuper une place active sur le terrain, et il mourut pendant l’étĂ© de 1862, laissant son rare Paterson Ă  la postĂ©ritĂ©. Le choix du General Joseph WHEELER fut curieux. Il prĂ©fĂ©ra un revolver Savage-North en calibre .36. Avec sa carcasse bizarre, piquant du nez, et son drĂ´le de chien sur le haut, le Savage-North Ă©tait Ă  la fois gauche d’aspect et peu commode Ă  manier. Il a du faire l’objet de quolibets chez les soldats aguerris de WHEELER, qui prĂ©fĂ©raient des Colt et des Remington capturĂ©s sur l’adversaire. Mais ce Savage-North servit très bien au gĂ©nĂ©ral, puisqu’il survĂ©cut Ă  de nombreuses rencontres avec l’ennemi. Au Tennessee entre Novembre et DĂ©cembre 1862, WHEELER fut personnellement engagĂ© dans pas moins de vingt escarmouches avec les troupes de l’Union. Ces actions forcèrent d’ailleurs le General Braxton BRAGG Ă  le rĂ©primander officiellement pour s’être Â« exposĂ© inutilement Â».

PALADINS-GRIS-6
PALADINS-GRIS-7

« Saignant horriblement du nez Â», le revolver Savage-North, brevetĂ© en 1856 et tirant 6 coups de calibre .36, fut amĂ©liorĂ© en 1860. Le levier entourant la queue de dĂ©tente servait Ă  armer le chien avec le mĂ©dius si le tireur ne voulait pas se servir du pouce. Il permettait surtout le tir rapide, pratiquement en double action, mais on imagine facilement ce que cela pouvait donner en matière de prĂ©cision. Le Third Model de la première version, Ă  gauche, fut fabriquĂ© Ă  400 exemplaires, et la dernière version, Ă  droite, le fut Ă  11 984 exemplaires.

Nathan Bedford FORREST, le Texan du 8th. Texas Cavalry, Ă©tait encore plus agressif que WHEELER. A l’étĂ© 1861, il se mit Ă  rassembler un bataillon de cavalerie pour l’enrĂ´ler dans la ConfĂ©dĂ©ration. Se glissant en Kentucky neutre, il acheta 500 revolvers pour ses hommes. Les types de pistolets qu’il se procura demeurent inconnus, mais on dit que FORREST porta une paire de Colt Navy Model 1851, du dĂ©but de la guerre jusqu’à la fin. FORREST se trouvait constamment sur la ligne de feu et vingt neuf chevaux furent tuĂ©s sous lui. Avec l’habitude qu’avait FORREST de rester dans le feu de l’action, les canons de ses revolvers Ă©taient toujours chauds. Plusieurs incidents illustrent son goĂ»t du combat personnel. A la fin de DĂ©cembre 1861, FORREST menait une attaque contre la garnison Nordiste de Sacramento, Kentucky, lorsqu’il se retrouva en face de trois Tuniques Bleues agitant leur sabre. Une balle de pistolet dĂ©chira le collier de la veste de FORREST, marquant son cou. Il renversa l’un des soldats de sa selle en lui expĂ©diant une balle, et se retourna pour affronter les deux autres attaquants. Â« Il abattit le premier avec un coup de feu, et sabra les deux autres » Ă©crivit plus tard son biographe, Robert Selph HENRY. FORREST s’extirpa d’une autre situation difficile Ă  coups de pistolets, au mois d’Avril suivant Ă  Shiloh, y rĂ©coltant une blessure qui aurait tuĂ© beaucoup d’autres hommes. Ce ne fut pas avant des semaines plus tard, pendant lesquelles il Ă©tait restĂ© sur le terrain Ă  se battre, qu’il consentit Ă  ce que la balle de mousquet fĂ»t extraite de sa blessure, et mĂŞme alors, on l’opĂ©ra sans anesthĂ©siant. Juste un grand coup de gnĂ´le dans le gosier, suivi d’un petit coup de maillet sur le crâne, immĂ©diatement et adroitement administrĂ©. Un mal en chasse un autre, et si le gĂ©gène a mal Ă  la tĂŞte après l’opĂ©ration, on lui dira qu’on n’avait pas les moyens d’acheter de la bonne gnĂ´le, parce que le fric, on l’a dĂ©pensĂ© pour acheter des Kalach’s. Le Brigadier General James DEARING quitta l’Ecole des Cadets quand la Virginie se sĂ©para de l’Union, et il passa les trois premières annĂ©es de la guerre comme commandant d’artillerie et de cavalerie, avant de gagner son Ă©toile en Avril 1864. Lors des la retraite vers Appomattox, ses hommes se heurtèrent aux troupes de l’Union menĂ©es par le General Theodore READ Ă  High Bridge, Virginia, le 6 Avril 1865. DEARING et le gĂ©nĂ©ral Yankee se mirent Ă  part et se battirent dans un duel au pistolet, qui laissa READ mort et DEARING mourant. Le Colt Navy Model 1851 de DEARING reste en possession de sa famille, relique prĂ©cieuse du dernier gĂ©nĂ©ral ConfĂ©dĂ©rĂ© Ă  mourir au combat. Une autre arme de poing ayant appartenu Ă  un gĂ©nĂ©ral Sudiste est inscrite en triste post-scriptum Ă  la guerre. Le Brigadier General William M. BROWNE de Georgie, offrit son revolver Colt Root Pocket Model 1855, au numĂ©ro de sĂ©rie 22987, Ă  la femme du PrĂ©sident, Mme. Varina Howell DAVIS, juste avant que le gouvernement ne partĂ®t de Richmond en Avril 1865. La Première Dame de la ConfĂ©dĂ©ration quitta Richmond avec un petit enfant dans les bras et un revolver Colt glissĂ© dans son sac Ă  main.

On trouva toute une variété d’armes d’épaules dans les tentes et les chariots à bagages des quartiers généraux. Des armes à chargement par la culasse de différents types semblent avoir été populaires parmi eux. Jeb STUART possédait un fusil revolver Colt ainsi qu’une carabine Anglaise à chargement par la culasse Calisher & Terry, qu’il essayait sur le terrain pour la cavalerie Confédérée. Cette carabine en calibre .56 présentait un gros mécanisme de culasse qui ressemblait un peu à ceux que l’on trouve sur les pièces d’artillerie modernes. Le Major General John B. FLOYD de Virginie reçut en cadeau de Samuel COLT un fusil revolver Colt alors qu’il était Secrétaire à la Guerre sous le Président James BUCHANAN. Le Major General John G. WALKER fut un autre de ces officier supérieurs qui possédaient un fusil Colt. Il acheta le sien quand il servit au Regiment of Mounted Riflemen dans les années 1850.

Nathan Bedford FORREST, alors Lieutenant Colonel, encore lui, Ă©tait prĂ©sent Ă  la bataille de Fort Donelson. C’est lĂ  qu’avec un coup tirĂ© de loin avec une carabine Maynard, il abattit un tireur d’élite Nordiste perchĂ© dans un arbre.

Et voilà que les officiers Sudistes se mettent à dégommer les snipers adverses avec des pétoires, maintenant.

Ben Mc. CULLOCH affectionnait lui aussi la Maynard Ă  chargement par la culasse, et en portait une en bandoulière lorsqu’il mourut Ă  Pea Ridge. Le Major General Dabney H. MAURY, qui servit avec WALKER sur la frontière du Texas, accrochait sa prĂ©fĂ©rence Ă  un fusil Ă  chargement par la bouche, plus conventionnel. En poste Ă  Carlisle Barracks, Pennsylvannia, avant la guerre, il se procura un canon de U.S. Model 1841 Mississipi Rifle de surplus, et le fit monter sur un fĂ»t et une platine de sport par un armurier local pour en faire un fusil superbement prĂ©cis. MAURY se vantait d’avoir tirĂ© du gibier Ă  plus de 200 yards avec cette arme de service qui avait Ă©tĂ© modifiĂ©e. Ben tiens… Une zone vitale sur un gibier moyen, c’est pas grand. Et quand on connaĂ®t les faibles qualitĂ©s balistiques de la grosse boule tirĂ©e par le Mississipi Rifle, il faut taper dans la zone vitale, sinon le gibier continue Ă  se promener en boitant et il va se perdre ailleurs, pour y crever sans qu’on l’ait retrouvĂ©. Donc Ă  200 yards avec un canon lisse, faut dĂ©jĂ  ĂŞtre bon tireur. Le Major General Samuel G. FRENCH gardait comme trophĂ©e l’un des seize fusils Ă  rĂ©pĂ©tition Henry que ses troupes avaient capturĂ© lors d’un combat en 1864 contre les forces de SHERMAN en Georgie. Après Appomatox, FRENCH rendit loyalement le joli fusil au boĂ®tier de culasse en laiton, aux autoritĂ©s de l’Union.

PALADINS-GRIS-9
 FabriquĂ© Ă  environ 14 000 exemplaires par New Haven Arms Co., Ă  New Haven, Connecticut, en calibre .44 Henry Flat Ă  percussion annulaire. Le gouvernement Nordiste en acheta 1 731 entre 1862 et 1865, et en dota le 1st. Maine et le 1st. District of Columbia Cavalry Regiment.

D’autres gĂ©nĂ©raux AmĂ©ricains ont portĂ© des armes personnelles spĂ©ciales depuis l’époque de FORREST et de WHEELER. Sans aucun doute, les guerres Ă  venir verront des gĂ©nĂ©raux AmĂ©ricains dĂ©gainer leurs armes en menant leurs troupes Ă  l’assaut contre l’ennemi, mais leurs exploits ne resteront que des ombres pâles, comparĂ©es Ă  ceux qui furent accomplis par les galants chefs menant les lĂ©gions Grises de la Cause Perdue. Au vingtième siècle, on sait qu’un autre AmĂ©ricain, amateur d’armes nĂ© en 1885 en Californie et qui n’avait donc plus rien Ă  voir avec les paladins Gris, mais plus connu comme GĂ©nĂ©ral de chars, George S. PATTON, prĂ©fĂ©rait des crosses en ivoire sur la paire de Single Action Army en .45 qu’il portait de prĂ©fĂ©rence au Colt 1911 rĂ©glementaire dont il avait gardĂ© un mauvais souvenir, quand un coup Ă©tait parti tout seul de son pistolet tombĂ© au sol alors qu’il Ă©tait Capitaine pendant la Première Guerre Mondiale. L’individu Ă©tait d’ailleurs armĂ© jusqu’au dents car, non content d’être escortĂ© et protĂ©gĂ© comme un General peut l’être, il avait Ă©galement, en plus de la paire de Colt S.A.A., une paire de Smith & Wesson en .357 Ă  canons de 3,5 pouces. Chez les Ă©trangers, deux autres individus, loin d’être des paladins Gris ceux-lĂ , furent ce gros porc d’Hermann GĂ–RING qui frimait avec un revolver Smith & Wesson en .38 Special Ă  la ceinture, comme si un bon vieux LĂĽger P08 allemand n’eĂ»t pas Ă©tĂ© mieux, mais c’était dĂ©jĂ  trop bien pour lui, et le Russe Leonid BREJNEV qui aimait emporter son Colt Peacemaker Single Action Army en .45 avec lui lorsqu’il partait chasser.

……………………………………

LES ARMES DES COMANCHEROS

Traduction d’un article de W. AUSTERMAN paru dans D.G.W. Blackpowder Annual 1990

Comanchero ! Pour ceux qui vivaient le long des rives sauvages de la frontière du sud-ouest au milieu et Ă  la fin des annĂ©es 1800, ce mot-lĂ  Ă©voquait autant une Ă©pithète remplie de haine qu’un nom dĂ©finissant une certaine classe d’hommes. Pendant presque un siècle, les caravanes de chars Ă  bĹ“ufs et de mules passèrent vers l’est depuis le Nouveau Mexique Ă  travers les Staked Plains, les Plaines JalonnĂ©es, pour atteindre les lieux de rendez-vous avec certaines des tribus d’Indiens les plus fĂ©roces du contient. C’est lĂ , dans l’ombre de la faille lugubre d’un canyon ou le long d’un dĂ©filĂ© sans nom taillĂ© par l’érosion de la pluie, qu’ils Ă©changeaient leurs marchandises contre des peaux de bison, du bĂ©tail, des chevaux, des mules ou des prisonniers Blancs. Courtiers en aviditĂ© et en misère humaine, les Comancheros exerçaient leur trafic sordide dans cette contrĂ©e sauvage avec la certitude arrogante d’hommes qui savaient que la force de la loi ne s’étendait pas plus loin que lĂ  oĂą la poudre, les capsules et les balles rondes ne pourraient la porter. A l’époque oĂą le mĂ©tier de Comanchero atteignit son apogĂ©e dans les annĂ©es qui suivirent la Guerre Civile, leurs rangs comptaient de tout, des Anglos renĂ©gats et des New Mexicains sans scrupules, aux Indiens Pueblo prĂŞts Ă  faire des affaires avec leurs anciens ennemis si le prix y Ă©tait. Quelques Comancheros se contentaient de rencontrer les protagonistes sur leur propre terrain pour les ventes. D’autres chevauchaient avec les bandes de guerriers qui s’élançaient vers le Sud depuis les hautes plaines vers le Texas, ou bien par le Nord vers le Kansas et le Colorado, en prĂŞtant leur intelligence de prĂ©dateurs Ă  la fĂ©rocitĂ© de leurs clients au fur et Ă  mesure que ceux-ci choisissaient les cibles pour leurs raids. Tous les Comancheros vivaient littĂ©ralement grâce aux armes, et celles qu’ils utilisaient ou Ă©changeaient constituaient les variations de leur commerce morbide. Il existe des traces aussi anciennes que 1780, oĂą l’on retrouve des bandes d’aventuriers du Nouveau Mexique qui dĂ©fiaient les prohibitions gouvernementales Ă  rechercher les tribus des plaines Ă  l’Est, pour leur commerce. Ces trafiquants acquirent une connaissance intime de la rĂ©gion ainsi que des meilleurs chemins Ă  prendre pour traverser sa surface aride.

Vers l’étĂ© de 1810, des groupes de cinquante trafiquants, voire plus, rencontraient des Ute, des Kiowas et des Comanches avec la bĂ©nĂ©diction du gouvernement provincial Mexicain de Santa Fe. Les autoritĂ©s se rendaient compte que ce commerce pouvait servir de tampon très efficace aux incursions amĂ©ricaines en territoire Espagnol. Lorsque Ă©clata la Guerre du Mexique en 1846, les chariots des Comancheros avaient tracĂ© des sillons profonds dans la terre qui longeait la rivière Canadian, s’écartant et se perdant comme les brins d’une vieille corde cassĂ©e Ă  l’intĂ©rieur d’un dĂ©sert que CORONADO, trois siècles plus tĂ´t, avait appelĂ© « El Llano Estacado Â», les « Staked Plains Â», les plaines marquĂ©es de jalons. Un trafic important se faisait entre les AmĂ©ricains et Santa Fe depuis le dĂ©but des annĂ©es 1820, et les armes Ă  feu Ă©taient parmi les marchandises les plus convoitĂ©es. Le marchand du Missouri Albert SPEYER passa tout un lot de Fusils Mississippi Modèle 1841 en contrebande Ă  Santa Fe, Ă  la veille mĂŞme de l’invasion amĂ©ricaine du Nouveau Mexique. D’autres armes suivirent avec les caravanes qui arrivaient dans le sillage de l’annexion amĂ©ricaine du territoire. On ne peut pas vraiment faire de documentation bien prĂ©cise sur tous les types d’armes Ă©changĂ©es avec les Indiens pendant la pĂ©riode prĂ©cĂ©dant immĂ©diatement la Guerre Civile, mais certaines marques d’armes Ă©taient stockĂ©es tout Ă  fait normalement Ă  la fois par des marchands Ă  jour de leur licence, et par des trafiquants illicites. Des fusils Ă  silex ou Ă  percussion fabriquĂ©s par des firmes comme Leman, Henry, Tryon et Deringer Ă©taient largement distribuĂ©es dans les plaines aux alentours de 1850. Ces armes solides et prĂ©cises constituèrent des produits de première nĂ©cessitĂ© pour les trente annĂ©es çà venir. Ironiquement, après la Guerre Civile, le gouvernement des Etats Unis aida indirectement les Comancheros Ă  prospĂ©rer. La vente de milliers d’armes en surplus Ă  des prix cassĂ©s augmenta les inventaires des trafiquants Ă  peu de frais pour eux. Ainsi, en Novembre 1867, l’arsenal de Fort Leavensworth mit 19 551 fusils Ă  la vente publique en un jour, sans demander Ă  tous ceux qui en voulaient d’oĂą venait leur argent comptant. Un autre exemple typique fut la vente qui se tint Ă  l’arsenal U.S. de San Antonio, Texas, en Janvier 1868, quand on mit sur le marbre 311 carabines Burnside Ă  chargement par la culasse, 800 fusils rayĂ©s Enfield, 250 mousquets Ă  canon lisse, 400 revolvers Colts et 81 revolvers Remington.

Les nouvelles armes arrivèrent vite aux mains des hostiles. En Ă©tĂ© 1866, le Lieutenant Colonel E.H. BERGMAN, officier commandant Ă  Fort Bascom, New Mexico, commit l’imprudence d’emmener un dĂ©tachement au cĹ“ur du territoire Comanchero dans un effort pour rĂ©cupĂ©rer du bĂ©tail volĂ© chez des fermiers. Utilisant deux Comancheros capturĂ©s comme guides, le Colonel atteignit un village Comanche situĂ© presque Ă  250 miles au Sud-Est du poste. Il y avait 160 habitations dans le village, abritant au moins deux fois autant de guerriers. L’officier nota que chaque brave arborait un revolver Ă  sa ceinture et Â« une grande partie d’entre eux Ă©tait armĂ©s de deux pistolets. Â» Au moins la moitiĂ© des guerriers prĂ©sents Ă©taient soit des prisonniers Mexicains qui avaient grandi depuis l’enfance parmi les Comanches, ou des Comancheros Mexicains qui vivaient volontairement parmi les hommes de la tribu. Il s’en sortit sans combattre, mais il avait perdu. L’affluence des armes entraĂ®na une recrudescence des raids, pas seulement vers le Texas et le Nouveau Mexique, mais aussi sur la Piste de Santa Fe. En Janvier 1867, un officier du 3ème. Infantry en poste Ă  Fort Dodge, Kansas, remarquait : Â« Entre les ventes lĂ©gales par les agents et les trafiquants, les Indiens n’ont jamais Ă©tĂ© aussi bien armĂ©s qu’aujourd’hui. Plusieurs centaines d’Indiens ont visitĂ© le poste, et tous avaient des revolvers en leur possession. Une grande majoritĂ© avait deux revolvers, et beaucoup d’entre eux en avait trois. Les Indiens ne cachent pas qu’ils ont plein d’armes et de munitions en cas de problèmes au printemps… Pour un revolver, un Indien donnera dix, voire vingt fois, le prix qu’il vaut, en chevaux et en fourrures. Â» Ce mois d’AoĂ»t-lĂ , apparurent encore plus d’armes de surplus lorsque les hostiles attaquèrent une caravane de chariots 160 miles Ă  l’ouest de Fort Harker, Kansas. On rapporta que les braves Ă©taient armĂ©s Â« de fusils Spencer, de Sharps, et de mousquets Enfield, et qu’ils avaient des munitions Ă  foison. Â»Pour des raisons Ă©videntes, les Comancheros ne gardèrent pas de suivi comptable de leurs ventes, mais quelques traces matĂ©rielles ont survĂ©cu pour nous indiquer quelles sortes d’armes Ă  feu figuraient dans leur commerce avec les Indiens.

En 1976, le Llano Estacado Museum de Plainview, Texas, publia le rapport d’une fouille archĂ©ologique sur un site de trafic Comanchero. SituĂ© au Nord-Est du contĂ© de Floyd, Texas, le site Ă©tait constituĂ© de ruines de trois tranchĂ©es-abris surplombant Quitaque Creek, et un quatrième abri trouvĂ© un quart de mile en amont. Les fouilles rĂ©vĂ©lèrent que les tranchĂ©es avaient Ă©tĂ© creusĂ©es Ă  l’origine sur une profondeur de quatre pieds dans le sol de la colline, et qu’elles avaient Ă©tĂ© surplombĂ©es de murs et de toits en troncs de cotonniers avec des branches recouvertes de peaux de bison. Mesurant 18 pieds sur 13 pieds, avec au milieu le foyer et le passage pour l’entrĂ©e, les structures contenaient une abondance d’artefacts, dont la plupart dataient de la pĂ©riode entre 1870 et 1880. L’une des tranchĂ©es contenait les restes de pas moins de quatre armes. La seule arme de poing parmi elles Ă©tait un revolver Ă  percussion Remington Modèle 1861 en calibre .44. Arme de poing militaire et civile couramment rencontrĂ©e sur la frontière, le Remington avait l’avantage de prĂ©senter une carcasse fermĂ©e qui le rendait plus solide que son rival le Colt. La possibilitĂ© de le faire fonctionner avec de la poudre en vrac, des capsules et des balles comme munitions constituait Ă©galement un avantage, car les cartouches mĂ©talliques dont avaient besoin les revolvers plus modernes Ă©taient souvent difficiles Ă  trouver et toujours chères. Il a Ă©tĂ© facile d’identifier deux des trois armes longues restantes trouvĂ©es dans la tranchĂ©e. L’une Ă©tait un fusil Modèle 1841 Â« Mississipi Rifle Â». A chargement par la bouche, fonctionnant Ă  percussion et en calibre .54, c’était l’arme rĂ©glementaire standard dans les rĂ©giments U.S. de fusiliers Ă  cheval, de 1840 Ă  1861, et elle vit du service chez les Texas Rangers en plus d’avoir Ă©tĂ© une arme populaire chez les immigrants en route vers la Californie. Les garnitures en laiton et la platine jaspĂ©e du Modèle 1841, une arme dĂ©jĂ  familière dans les Plaines du Sud au milieu des annĂ©es 1850, en faisaient une pièce agrĂ©able pour l’œil d’un Indien. La grosse balle que l’on utilisait en 1841 Ă©tait capable de mettre Ă  terre tous les gibiers que l’on pouvait rencontrer dans la rĂ©gion. On trouva aussi une carabine Starr en .54, sans la crosse ni le fĂ»t, mais mĂ©caniquement intacte lorsqu’on la sortit de la tranchĂ©e. Cette arme Ă  chargement par la culasse, brevetĂ©e par Ebenezer STARR en 1858, ressemblait extĂ©rieurement Ă  la Sharps, plus populaire. Son bloc de culasse articulĂ© sur charnière permettait un chargement facile avec les cartouches en lin ou en papier que chambraient les 20 000 premières Starr du contrat passĂ© avec le gouvernement. Ce premier contrat fut rempli entre Juillet 1863 et DĂ©cembre 1864.

Un supplément de 5000 Starr fut vendu au gouvernement U.S. de Mars à Mai 1865, chambrées pour la cartouche métallique Spencer de .56-52. La Starr que l’on trouva dans le site de Quitaque chambrait la cartouche du Spencer. Les Kiowas et les Comanches se familiarisèrent probablement avec la Starr suite à sa mise en service avec les 2ème. et 3ème. régiments de Colorado Volunteer Cavalry en 1864. Ces unités patrouillaient dans les plaines orientales du territoire. Les Starr de surplus ne tardèrent pas à trouver leur chemin dans des chariots Comancheros pour le trafic avec les Indiens. La dernière relique d’arme trouvée par les archéologues fut le canon d’un fusil des plaines à demi-fût, fonctionnant à percussion et du type Hawken ou Leman. Ce canon au calibre de .45 mesurait trente huit pouces de la bouche à la culasse, et un pouce et un huitième en largeur. Il n’avait en dessous qu’un seul support en laiton pour la baguette de chargement. Plus long à charger que la Starr, le fusil des plaines pouvait tout de même rapporter de la viande ou faire dresser les cheveux si nécessaire.

On trouva de nombreuses douilles de cartouches pendant les fouilles, et elles constituèrent les tĂ©moins de ce que les Comancheros utilisaient ou Ă©changeaient comme autres armes. Parmi ces cartouches, on compta cinq douilles de .45-100 Remington Ă  percussion centrale. Â« Il s’agit lĂ  d’une version plus courte de la Remington Ă  douille bouteille de deux pouces et cinq huitièmes Â» nota l’archĂ©ologue, Â« et elle figurait au catalogue Sharps de 1873, tout comme la douille de .45 de deux pouces et quart. Â» De telles munitions furent probablement fournies pour des fusils Sharps pris sur d’imprudents chasseurs de bisons. On trouva Ă©galement deux douilles de .50-70 Governement Ă  percussion centrale. D’abord adoptĂ©e comme munition officielle pour les fusils et les carabines Ă  chargement par la culasse Springfield utilisĂ©s par l’U.S. Army de 1866 jusqu’à 1873, la .50-70 s’utilisait aussi dans les fusils et des carabines Sharps convertis depuis le système Ă  percussion, tout comme dans le fusil Remington Rolling-Block. La munition de .50-70 resta populaire sur la frontière, bien après le choix par les militaires de la cartouche .45-70 Government en 1873, qui lui Ă©tait supĂ©rieure au point de vue balistique. Les douilles que l’on trouva dans les fouilles de Quitaque Ă©taient toutes les deux du premier type, avec l’amorçage Benet, et faites en cuivre au lieu de laiton. On trouva cinq douilles de .56-50 pour les fusils Ă  rĂ©pĂ©tition Spencer dans les dĂ©bris du camp. Les douilles en cuivre et Ă  percussion annulaire Ă©taient marquĂ©es « F.V.V. & CO. Â» Moins puissante que la .50-70, la Spencer Ă©tait quand-mĂŞme encore populaire chez les Indiens, les soldats et hommes de la frontière. De manière surprenante, une seule douille de .45-70 fut retrouvĂ©e. Trois autres douilles, plus grosses et que l’on ne put identifier, sortirent aussi du trou. Les douilles de cartouches pour armes de poing furent plus nombreuses. On trouva dix douilles pour revolver Colt en .45, mais les marquages du fabricant n’étaient sur aucune. On trouva aussi sept douilles de Smith & Wesson Modèle Russian en calibre .44. L’une d’entre elles Ă©tait marquĂ©e « S&WR Â». Conçus par la compagnie pour le contrat militaire russe, l’arme et la cartouche Ă©taient toutes les deux disponibles sur le marchĂ© civil amĂ©ricain en 1878. Dans tous ses modèles Ă  grande carcasse, le Smith & Wesson trouva des amateurs sur la frontière, grâce Ă  son système Ă  brisure et Ă  Ă©jection multiple. Ces caractĂ©ristiques en faisaient une arme plus facile Ă  recharger que le Colt Modèle 1873 Ă  carcasse monobloc. Quatre douilles de pistolet, fortement fragmentĂ©es et que personne ne put identifier, vinrent s’ajouter aux fouilles, en mĂŞme temps qu’une paire de balles en plomb de calibre .54. Dans les deux cas, il s’agissait de projectiles en plomb pur, Ă  base creuse et Ă  deux gorges de graissage, les marques de six rayures Ă©tant encore visibles sur l’un d’eux, aplati Ă  l’impact lorsqu’il avait Ă©tĂ© tirĂ©. On trouva Ă©galement deux balles de plomb rondes en calibre .50, dĂ©jĂ  tirĂ©es et aplaties. Les quatre balles tirĂ©es furent retrouvĂ©es dans la mĂŞme structure, l’une d’entre elles ayant fini sa trajectoire dans la salle principale, les autres dans le passage servant d’entrĂ©e. Cela peut signifier, soit que les anciens rĂ©sidents Ă©taient très imprudents en manipulant leurs armes, soit qu’une bataille rangĂ©e a Ă©clatĂ© entre des gens Ă  l’intĂ©rieur de la cabane. Trois amorces Ă  percussion et dix grandes amorces pour armes d’épaule vinrent complĂ©ter la liste des objets touchant de près ou de loin les armes Ă  feu, signifiant que les armes Ă  percussion continuaient Ă  ĂŞtre populaires dans le commerce. Les reliques mises Ă  jour dans le site de Quitaque Creek ne reprĂ©sentent seulement qu’une minuscule fraction des armes et des munitions Ă©changĂ©es ou utilisĂ©es par des Comancheros ne frĂ©quentant qu’un seul des nombreux sites analogues au Texas et au Mexique de l’Est.

L’un des Ă©tudiants intĂ©ressĂ© par le trafic que pratiquaient les Comancheros, a localisĂ© et expertisĂ© pas moins de treize de ces points de rendez-vous dans un rayon de mille miles autour de Tucumcari et de Fort Bascom, New Mexico. De nombreuses reliques ayant trait aux armes Ă  feu furent aussi retrouvĂ©es dans ces sites-lĂ . Parmi elles, la collection classique de douilles de cartouches, de capsules, et de projectiles, en mĂŞme temps que les restes d’un fusil de chasse double Ă  canon sciĂ©, trouvĂ© dans un site Ă  seulement quarante miles du fort. Les armes illicitement fournies aux Indiens et provenant des râteliers des postes de l’armĂ©e n’étaient pas rares. Les Comancheros payaient de bonnes sommes pour des armes d’ordonnance, et il existait des soldats qui avaient toujours besoin d’argent liquide. Il s’ensuivit toute une Ă©pidĂ©mie de vols d’armes. En faisant l’inspection de sa compagnie de cavalerie en Janvier 1866, un officier de Fort Union, New Mexico, se rendit compte qu’il manquait cinquante cinq revolvers Ă  percussion Remington en calibre .44. Les armes, qui coĂ»taient 12,00 $ la pièce au gouvernement, partaient Ă  50,00 $ la pièce sur la frontière. Au Texas, les vols d’armes atteignirent de telles proportions qu’au mois d’AoĂ»t 1866, le War Department fut obligĂ© de publier la circulaire General Order N° 65, qui disposait : Â« Dans l’état du Texas, le prix de leurs armes sera dĂ©duit de la paie des hommes engagĂ©s qui se dĂ©barrassent ou qui perdent leurs carabines Spencer, ou les revolvers Army Colt ou Remington, Ă  raison de cent dollars l’unitĂ© pour les premières et cinquante dollars pour chacune des deux autres. Â» Les dĂ©serteurs, eux aussi, furent une source possible d’armes de contrebande. En FĂ©vrier 1867, le « Army & Navy Journal Â» rapportait que cinquante hommes du 3ème. Cavalry avaient dĂ©sertĂ© en masse de l’un des postes du Kansas, Â« …emportant avec eux chevaux, carabines, pistolets et munitions, dans l’intention probable de passer par le Nouveau Mexique avant de se disperser Ă  travers la Californie. Â» A cette Ă©poque, le 3ème Cavalry Ă©tait armĂ© de carabines Sharps et Spencer, ainsi que de revolvers Colt et Remington. Les dĂ©serteurs en route vers la Californie purent très bien avoir trouvĂ© de bon preneurs pour de telles pièces dans le Nouveau Mexique oriental. Les Indiens ne cachèrent jamais leur intĂ©rĂŞt pour les armes. Le chef Kiowa Lone Wolf, Loup Solitaire, se prĂ©senta effrontĂ©ment Ă  une confĂ©rence de paix en 1871 Ă  Fort Sill, Territoires Indiens, tenant fermement dans chaque main une carabine Spencer de contrebande.

Par la suite, le GĂ©nĂ©ral William T. SHERMAN Ă©crivit au commandement de Fort Leavenworth, Kansas : Â« Je constate maintenant que beaucoup de ces assassinats et ces dĂ©prĂ©dations ont Ă©tĂ© faits par des Indiens de cette rĂ©serve, et qu’il existe un système pour Ă©changer vers le Kansas et le Nouveau Mexique les chevaux et les mules volĂ©es, contre des armes et des munitions, car ces bandes de maraudeurs se promènent partout avec des carabines Sharps ou Spencer et des fusils Henry, et elles sont approvisionnĂ©es avec des cartouches ad hoc. Â» Le trafic Comanchero fleurit Ă  partir de la Guerre Civile. En 1871, le journal « Daily New Mexican Â» estimait que plus de 30 000 tĂŞtes de bĂ©tail avaient Ă©tĂ© menĂ©es vers l’intĂ©rieur du territoire par les Comanches pendant les trois mois prĂ©cĂ©dents. L’éleveur Texan Charles GOODNIGHT, lui-mĂŞme victime de vols de bĂ©tail par les Comancheros, estimait qu’en deux ans seulement, 300 000 bovins et 100 000 chevaux avaient Ă©tĂ© volĂ©s dans son Ă©tat pour entretenir ce genre de commerce. Les dĂ©prĂ©dations continuaient en une chaĂ®ne sans fin d’épanchements de sang et de vols, au fur et Ă  mesure que les armes arrivaient aux mains des Indiens. En Janvier 1869, Â« environ une centaine de guerriers armĂ©s chacun de deux six-coups et d’un fusil Spencer… Â» attaquèrent le village de Gatesville au Nord d’Austin, tuant dix colons et emmenant plusieurs femmes et enfants pour les vendre plus tard aux Comancheros. Le mois de Mars suivant, le Consul des Etats Unis Ă  Piedras Negras, Nouveau Mexique, Ă©crivait que les Indiens faisaient des Ă©changes en pleine ville, Â« bien armĂ©s de carabines Spencer et de revolvers. Â» En Avril 1873, un journal du Texas relatait une bagarre rĂ©cente près de Camp Colorado, oĂą une douzaine de braves, armĂ©s de Spencer, avaient dĂ©fiĂ© les colons. Ce mois d’AoĂ»t-lĂ , quinze Comanches, armĂ©s de fusils Â« Winchester, Henry et Spencer Â», se heurtèrent Ă  la milice locale au cours d’une bataille acharnĂ©e en haut de Packsaddle Mountain, la Montagne de la Selle de Bât. Toutefois, vers le dĂ©but de 1873 et Ă  cause du vigoureux harassement par les militaires, le commerce des Comancheros commença Ă  dĂ©cliner. Les Comancheros plus ardus rĂ©pondirent en traçant leurs pistes Ă  chariots plus au Nord de la rivière Canadian et un marchand effrontĂ©, Juan PIEDA, lança un dĂ©fi public Ă  l’ArmĂ©e, mettant les troupes en demeure de l’attraper si elles le pouvaient.

Il y avait encore de l’argent Ă  faire dans le commerce, mais les conditions changèrent rapidement au fur et Ă  mesure que les Blancs pĂ©nĂ©traient dans les Staked Plains en nombres de plus en plus grands. Les Ă©quipes d’experts et de gĂ©omètres, envoyĂ©s lĂ  pour un projet de ligne de chemin de fer, Ă©cumèrent le Llano avec des gens qui n’étaient lĂ  que provisoirement mais avec leurs Winchesters, et Ă  partir de l’étĂ© 1874, les chasseurs de bisons Ă©liminaient les grands troupeaux qui y paissaient encore. En voyant leur patrimoine menacĂ© par la disparition des bisons, les Kiowa, les Comanche et les Cheyenne du Sud se rassemblèrent dans une tentative dĂ©sespĂ©rĂ©e de repousser les intrus hors de leurs territoires de chasse. A la fin de Juillet 1874, des centaines de colons avaient Ă©tĂ© tuĂ©s dans la Cimarron Valley, et mĂŞme près de Fort Bascom, comme les raids s’étendaient vers l’intĂ©rieur du Nouveau Mexique. Au mois d’AoĂ»t, on prĂ©parait une grande campagne contre les Indiens, la Red River War, la Guerre de la rivière Rouge, avec cinq colonnes de soldats qui sortirent des postes du Texas, du Nouveau Mexique, du Kansas et du Territoire Indien, pour attaquer les hostiles sur le terrain. Après une avance forcĂ©e, ces colonnes convergèrent en amont de la Rivière Rouge et dispersèrent ou forcèrent Ă  se rendre la plupart des bandes fugitives. A cette Ă©poque, quelques Comancheros virent la fin de leur commerce se rapprocher de plus en plus et l’abandonnèrent pragmatiquement pour s’enrĂ´ler dans l’ArmĂ©e comme Ă©claireurs contre leurs anciens clients. On continua Ă  se livrer des batailles sporadiques et mineures, contre des braves dĂ©fiant tout le monde, mĂŞme après que les tribus fussent enfermĂ©es dans leurs rĂ©serves. En 1880, une compagnie de Texas Rangers, sous le commandement du Capitaine George W. ARRINGTON, intercepta un groupe d’Indiens Pueblo Comancheros qui traversaient les Staked Plains pour se rendre vers un lieu de rendez-vous. Les Rangers confisquèrent leur chargement d’armes, qui consistait en« principalement des fusils Spencer et des cartouches Ă  percussion annulaire Â», se rappela l’un des hommes de loi. Le CapitaIne ARRINGTON relâcha les Pueblo en les prĂ©venant que si jamais il les retrouvait Ă  nouveau sur ce territoire, il leur ferait tirer dessus Ă  vue. Il ordonna ensuite Ă  ses hommes d’enterrer les armes et les munitions près de leur camp. L’auteur ne dit pas si les Comancheros ont, ou n’ont pas, surveillĂ© les Rangers de loin pour voir ce qu’ils faisaient avec leur came, puis s’ils sont revenus en douce pendant que les Rangers Ă©taient partis, pour dĂ©terrer les caisses et les rĂ©cupĂ©rer. SĂ»rement ont-ils laissĂ© tomber, peut-ĂŞtre parce qu’ils avaient trop les foies. Quelque part dans le Llano Estacado, au Nord du vieux Fort Elliot, reposent les restes rouillĂ©s des vestiges d’un vieux trafic qui fit baigner la frontière du Sud-Ouest dans un bouillonnement de sang pendant des gĂ©nĂ©rations. Dis-moi juste oĂą elles sont, ces caisses, et je m’en vais te les chercher, moi, ces Spencers et leurs cartouches ! Les armes portĂ©es et vendues par les Comancheros avaient Ă©tĂ© d’un cĂ´tĂ© les instruments d’efforts sordides de gens qui recherchait la richesse, et de l’autre ceux du combat dĂ©sespĂ©rĂ© d’un peuple fier qui refusait de se faire balayer par une marĂ©e de civilisation Blanche.

A la fin, les rĂŞves et les espoirs qu’on avait tant dĂ©fendus jusqu’au sang avec le trafic des armes, furent dĂ©laissĂ©s avec le mĂŞme aspect qu’une douille pour Spencer que l’on vient de tirer, c’est-Ă -dire brĂ»lĂ©e, sale et vide. Aujourd’hui, l’herbe a repoussĂ© depuis longtemps sur les pistes tracĂ©es par les chariots des trafiquants, pendant que les vieux os des guerriers morts se sont rĂ©duits en poudre et se sont mĂ©langĂ©s avec la poussière qui chevauche le vent par dessus le Llano Estacado. N’oublions pas le cactus et le vautour posĂ© dessus.

……………………………………

LES ARMES DES CHERCHEURS D’OR « QUARTANTE-NEUVIENS »

Traduction d’un article de Rick HACKER paru dans D.G.W. Blackpowder Annual 1983

( les remarques en italique sont du traducteur )

S’il y a un Ă©vĂ©nement qui peut ĂŞtre tenu pour avoir Ă©tĂ© le point de dĂ©part de la grande migration de colons vers le Far West, l’Ouest Lointain, c’est la RuĂ©e vers l’Or de Californie en 1849. En une seule annĂ©e, ce qui n’avait jadis Ă©tĂ© qu’un endroit tranquille, rural et presque ignorĂ©, un lacis de rivières paresseuses et de collines de genĂ©vriers qui s’élevaient doucement pour rejoindre les crĂŞtes recouvertes de pins et de granit de la Sierra Nevada, la Montagne EnneigĂ©e, se transforma en des villes grouillantes de communautĂ©s agitĂ©es, construites Ă  la hâte et n’importe comment, de routes encombrĂ©es de chariots et d’essaims d’une importance jamais vue auparavant, d’hommes, de femmes et d’enfants issus de toutes les couches sociales et venant de pratiquement tous les coins du globe. En moins de dix ans, la population de la ruĂ©e vers l’or de Californie gonfla de 14 000 en 1848 Ă  plus de 380 000 en 1860. Et pour moi, de 1848 Ă  1860, ça ne fait pas moins de dix ans, ça en fait douze. Ironiquement, la première fois oĂą l’on dĂ©couvrit de l’or fut un Ă©vĂ©nement très peu relatĂ©, et l’homme Ă  qui l’on attribue gĂ©nĂ©ralement cette ruĂ©e vers l’or, John Augustus SUTTER, mourut dans la misère, se lamentant Â« Mes jours les plus beaux furent ceux d’avant la ruĂ©e vers l’or Â»C’est donc le seul mec, dĂ©jĂ  riche avant, que la dĂ©couverte d’or rendit pauvre. En fait, les autres sont venus prendre l’or que l’on trouvait chez lui, certains y moururent, souvent d’une mort violente, avant d’en avoir trouvĂ©, d’autres moururent dans la misère sans en avoir trouvĂ©, d’autres moururent aussi dans la misère, après en avoir trouvĂ© mais après l’avoir flambĂ©, d’autres encore repartirent avec une fortune, mais lui n’en chercha jamais, alors qu’il Ă©tait Ă  sa portĂ©e puisque tout le pays Ă©tait Ă  lui, et les cafards fous lui ont massacrĂ© son petit coin de paradis. Avant la dĂ©couverte de « couleur Â», SUTTER Ă©tait l’homme le plus important et le plus influent dans la rĂ©gion du delta du Sacramento en Nouvelle Californie. Sa forteresse de cinq acres, qu’il appelait « New Helvetia Â», la Nouvelle Suisse, Ă©tait un empire miniature fait d’un mur de deux pieds et demi formant un fort autonome qui avait des Ă©curies, des jardins, une forge, une tannerie, des magasins gĂ©nĂ©raux, bref, tout ce dont on pouvait avoir besoin pour vivre dans un pays rural oĂą personne ne venait dĂ©ranger et que presque personne ne venait visiter. Le fort lui-mĂŞme Ă©tait gardĂ© par de hautes tours et des canons Ă  chaque point stratĂ©gique. A l’époque oĂą les Etats Unis arrachèrent l’Alta California au Mexique en 1846, c’est-Ă -dire la Haute Californie ou la partie Nord aujourd’hui amĂ©ricaine, en comparaison avec la Baja California qui est toujours mexicaine, SUTTER se sentait en sĂ©curitĂ©. Bien qu’il fĂ»t un immigrant Suisse et que le GĂ©nĂ©ral Guadalupe VALLEJO lui eĂ»t donnĂ© officiellement le grade militaire de Capitaine, sa loyautĂ© Ă©tait pour les « States Â». Il ne se rendait pas compte de la menace qui l’attendait sous les eaux tumultueuses de la rivière America, Ă  quelques miles en amont de son enceinte fermĂ©e. Dans ma collection personnelle, j’ai une reproduction relativement rare du journal de la New Helvetia de SUTTER. En lisant les mots de SUTTER au sujet de ces annĂ©es tranquilles prĂ©cĂ©dant la ruĂ©e vers l’or, je ne vois presque pas de mention sur des armes, de quelque sorte que ce soit, Ă  l’exception du canon qui gardait le fort. Pourtant, les armes Ă  feu ont toujours fait partie de toute manière de vivre sur la frontière et, au cours de visites personnelles sur les restes reconstruits, en un peu plus petit, de Fort Sutter, je ne fus pas surpris de dĂ©couvrir l’existence d’armes longues, la plupart des mousquets et des fusils de type militaire, que l’on utilisait Ă  l’époque Ă  la fois pour se procurer de la nourriture et pour assurer sa protection personnelle. Malheureusement, Ă  cause des effets du temps et de la corrosion, seuls ont pu ĂŞtre identifiĂ©s un mousquet modèle U.S. 1795 et un fusil rayĂ© modèle Mississipi 1841, en mĂŞme temps que quelques fusils de chasse juxtaposĂ©s Ă  percussion, l’un des outils les plus utiles, comme nous allons le voir, pour les « quarante-neuviens Â», appelons-les comme çà, ces hommes et ces femmes de la RuĂ©e vers l’Or de 1849, pour rester fidèle Ă  l’expression de l’auteur tout en ne tombant pas dans l’imitation « soixante-huitard Â» sur le retour d’âge. Bien sĂ»r, ce ne fut pas une surprise de dĂ©couvrir des fusils militaires Ă  Fort Sutter, car ce havre bien connu Ă©tait une escale programmĂ©e pour quiconque voyageait tranquillement Ă  travers la Californie avant la ruĂ©e vers l’or. C’est cette popularitĂ© de la New Helvetia, et le dĂ©sir de SUTTER d’étendre son empire, qui furent responsables, indirectement en tous cas, de sa perte. Un autre facteur qui dut y contribuer fut qu’il nĂ©gligea de rĂ©aliser l’importance que la dĂ©couverte de l’or allait apporter Ă  la rĂ©gion.

John SUTTER fut peut-ĂŞtre un homme aimable, gĂ©nĂ©reux et sociable, mais les preuves suggèrent qu’il n’était pas vraiment un homme d’affaires. Â« J’avais besoin… d’un moulin Ă  blĂ© et d’une scierie Â» Ă©crivit-il dans ses « Reminisces Â», ses souvenirs« J’avais commencĂ© Ă  construire un moulin Ă  blĂ© en 1847 sur les bords de la rivière America, Ă  environ quatre miles en amont du fort… Tout Ă©tait prĂŞt, et le moulin aurait pu commencer Ă  tourner dans les six semaines suivantes si la nouvelle de la dĂ©couverte d’or avait pu ĂŞtre gardĂ©e secrète aussi longtemps que cela. Â» SUTTER n’avait pas vraiment d’opinion sur l’or, mais il en avait encore moins pour l’homme qui en trouva le premier sur ses terres. Â« J’avais parmi mes employĂ©s un homme du nom de James Wilson MARSHALL Â» se rappelait SUTTER Â« Un bon mĂ©canicien… Quand j’ai parlĂ© du moulin avec lui, il m’a dit qu’il pensait ĂŞtre capable de le construire. J’avais des doutes sur la confiance que je pouvais lui accorder si je ne le surveillais pas, Ă  cause de son excentricitĂ©, mais… je n’avais personne d’autre, c’est pourquoi j’ai Ă©tĂ© dans l’obligation de miser alĂ©atoirement sur l’homme. » Le monde idyllique de John SUTTER commença Ă  s’écrouler le Vendredi 28 Janvier 1848. A cette date, il Ă©crivit avec un euphĂ©misme suprĂŞme dans son journal Â« Aujourd’hui, Mr. MARSHALL est revenu des Montagnes avec une affaire très importante. Â» Cette « affaire très importante Â», c’était une grosse pĂ©pite d’or pur que MARSHALL avait trouvĂ©e dans le gravier du lit de la rivière America. La rĂ©action immĂ©diate de SUTTER fut d’essayer de cacher la nouvelle de la dĂ©couverte, mais comme son fort Ă©tait l’endroit mĂŞme par oĂą transitaient toutes les informations de la rĂ©gion, elle ne mit pas longtemps Ă  se rĂ©pandre : il y a de la « couleur Â» dans la rivière, juste lĂ , Ă  la surface, qui attend que l’on vienne la ramasser. Dans son journal, SUTTER ne fait pas mention du terme « or Â» avant trois mois après sa dĂ©couverte initiale, mais il est Ă©vident d’après ses notes que des visiteurs et des travailleurs du fort se promenaient dehors toute la journĂ©e, Ă  la recherche du prĂ©cieux mĂ©tal. Enfin, la nouvelle atteignit San Francisco, ce qui fut le dĂ©but de la fin pour SUTTER et celui de la plus grande ruĂ©e vers l’or que le monde eĂ»t jamais vu auparavant. Â« La grande ruĂ©e des prospecteurs de San Francisco arriva au fort en Mai 1848 Â» Ă©crit SUTTER Â« Toutes les maisons de mes amis et des gens que je connaissais au fort Ă©taient pleines. Des marchands, des docteurs, des avocats, des capitaines au long cours, tous y vinrent. Tout n’était que chaos. Mes propres hommes me dĂ©sertaient. Je n’arrivais mĂŞme pas Ă  fermer le portail pour garder cette racaille dehors. Â» Les milliers de personnes qui arrivèrent avec la première vague firent piĂ©tiner les champs luxuriants de SUTTER par leur bĂ©tail et leurs chevaux. Tout ce qui ne fut pas dĂ©truit fut pillĂ©, depuis les pierres avec lesquelles le fort avait Ă©tĂ© construit, jusqu’au canon qui le gardait. Les nouvelles allaient lentement Ă  cette Ă©poque-lĂ , et il se passa bien six mois avant qu’elles ne fussent colportĂ©es par les bateaux Ă  aubes et les cavaliers au reste du pays, lequel ne se doutait de rien mais Ă©tait impatient de savoir et Ă  l’écoute de tout. Les « States Â» Ă©clatèrent immĂ©diatement en une Ă©pidĂ©mie de fièvre de l’or Ă  laquelle très peu avaient Ă©tĂ© prĂ©parĂ©s. Peu importe que peu d’hommes savaient exactement Ă  quoi ressemblait l’autre cĂ´tĂ© du Mississipi. Peu importe que personne ne sĂ»t combien de temps durait un voyage par la terre et de combien de provisions on aurait besoin. Peu importe qu’il n’y eĂ»t que peu, s’il y en avait, de vie civilisĂ©e dans la Great Platte Valley. Quelque part lĂ -bas, Ă  l’Ouest des Rocheuses, quelque part dans la Sierra Nevada, oĂą qu’elle fĂ»t, l’or attendait que les premiers qui y arriveraient le ramassent ! C’était Â« Ca passe vers la Californie ou ça casse ». Et beaucoup passèrent pas la case « cassĂ© Â» bien avant d’arriver aux sites, ou juste après. Il y avait uniquement deux moyens pour arriver aux champs aurifères de la Californie, par bateau autour du Cap Horn, ou Ă  pied, Ă  cheval ou en chariot, Ă  travers les Grands Plaines encore largement inexplorĂ©es. Le voyage par mer Ă©tait cher et durait de deux Ă  trois mois, selon le temps. On y Ă©tait Ă©galement très Ă  l’exigu et c’était extrĂŞmement coĂ»teux en comparaison avec le voyage par la terre. Mais par la terre, il fallait six mois en moyenne aux quarante-neuviens pour franchir les 2000 miles passant par des plaines vallonnĂ©es, des dĂ©serts brĂ»lants et des montagnes abruptes, le tout assaisonnĂ© de vents qui soufflaient Ă  80 miles par heure, des pluies torrentielles, de la boue oĂą l’on s’enfonçait jusqu’aux essieux, et un froid qui glaçait les poumons. En plus de cela, il y avait un vrai problème de temps, car tout pionnier qui essayait d’atteindre la terre promise dorĂ©e de Californie, devait arriver Ă  trouver son chemin par dessus les Sierras avant les premières neiges de l’hiver. Si les Indiens, la faim et les bandits n’avaient pas pris leur part, le climat le ferait, l’exemple le plus remarquable en Ă©tant la fatidique Donner Party. Mais ceux qui arrivaient Ă  survivre au voyage vers la Californie, par la terre ou par la mer, le faisaient grâce Ă  la chance, une bonne dose d’expĂ©rience et leur habiletĂ© Ă  manier leurs armes.

Le fusil de chasse juxtaposĂ© Ă  percussion fut de loin l’arme longue la plus utile et la plus nombreuse dans les champs aurifères. L’éparpilleur, l’arme standard utilisĂ©e pour remplir le garde-manger et apportĂ©e dans les fermes amĂ©ricaines du dĂ©but du XIXème. siècle, se rĂ©vĂ©la ĂŞtre un compagnon fiable pour le petit gibier dans les champs aurifères de Californie, et ses canons bĂ©ants au calibre de 12, de 10 ou de 8 Ă©taient un argument de poids contre tout intrus potentiel sur la concession. On pouvait le charger avec du petit plomb pour le petit gibier, de la balle ou de la chevrotine pour le tir Ă  courte distance sur du chevreuil et, quand les temps Ă©taient durs, on pouvait mĂŞme utiliser quelques petits galets de la rivière pour essayer de mettre quelque chose dans la gamelle. Et plus d’une fois, le vieil « Ă©parpilleur Â» fut chargĂ© d’une once ou deux de poudre d’or que l’on tira dans le lit d’un ruisseau ou sur une saillie de granit, pour « saler Â» une concession improductive de façon Ă  pouvoir la vendre Ă  un pied tendre nouvellement arrivĂ©, pour beaucoup plus que n’en valait le terrain.

Etrangement, il y eut peu de criminalitĂ© au cours des premières annĂ©es de la ruĂ©e vers l’or. Il y avait relativement peu d’hommes sur une immense rĂ©gion, l’or Ă©tait facile Ă  trouver et en abondance pour chacun, et une espèce d’esprit de camaraderie rĂ©gnait. Mais au fur et Ă  mesure que les prospecteurs usurpaient de plus en plus les limites des concessions et que des hommes aux valeurs morales diffĂ©rentes commencèrent Ă  se mĂŞler Ă  ceux dĂ©jĂ  prĂ©sents, la situation changea. Dans son livre « Life on the Plains and At the Diggings Â», La Vie dans les Plaines et dans les Concessions, publiĂ© en 1854, Alonza DELANO dĂ©crivit son expĂ©rience en tant que l’un des premiers quarante-neuviens : Â«  Vers 1850… beaucoup en arrivèrent Ă  voler… il devint nĂ©cessaire de garder sa propriĂ©tĂ© avec autant de soin que dans les vieilles villes d’oĂą nous venions. On peut dire que l’hiver de ’49 et ’50 peut ĂŞtre considĂ©rĂ© comme l’époque oĂą la criminalitĂ© Ă  commenc酠» A peine quelques mois plus tĂ´t, DELANO parlait d’un Ă©tranger qui campait avec lui pendant la nuit et qui laissait nonchalamment son sac d’or Ă  la vue de tous, non gardĂ©, pendant qu’il dormait. A prĂ©sent, ces temps-lĂ  Ă©taient rĂ©volus pour toujours dans les champs aurifères de Californie.

Les armes Ă  feu devinrent un moyen de protection autant que pour se procurer de la nourriture. Au dĂ©but, on prenait avec soi sur le terrain des pistolets Ă  un coup Ă  percussion, quelque peu encombrants Ă  porter, pour la protection individuelle. Ils Ă©taient relativement peu coĂ»teux, pouvaient tirer une forte charge, et beaucoup de chercheurs, les ayant utilisĂ©s alors qu’ils Ă©taient au service du gouvernement, savaient s’en servir. D’autres, exigeant plus de puissance de feu que de pouvoir, choisirent la « poivrière Â», un revolver Ă  plusieurs canons qui, bien qu’encombrant Ă  garder lorsqu’il Ă©tait simplement glissĂ© dans le haut du pantalon, Ă©tait cependant très populaire. La poivrière offrait cinq ou six coups sans recharger, mais son dĂ©faut majeur Ă©tait que les calibres Ă©taient parfois faiblards et les charges lĂ©gères. Pour le quarante-neuvien qui n’avait pas peur de s’embarrasser d’un peu de poids supplĂ©mentaire pendant qu’il travaillait sur sa concession, le gros Colt Dragoon Premier ou Second modèle de quatre livres, avec une charge musclĂ©e de 40 grains de poudre et une balle de .44, apportait la combinaison idĂ©ale de cinq coups de combat, la sixième chambre Ă©tant souvent laissĂ©e vide par les gens qui Ă©taient sur le terrain, de peur que le lourd revolver ne glisse accidentellement de son Ă©tui ou de la ceinture et ne se dĂ©charge accidentellement en heurtant le sol rocailleux. Ces revolvers furent largement utilisĂ©s par les troupes montĂ©es des Etats Unis, et beaucoup d’armes d’ordonnance furent « libĂ©rĂ©es Â» pour servir dans les champs aurifères. Beaucoup plus furent achetĂ©s par des hommes qui voulaient un avantage en pouvoir d’arrĂŞt, au cas oĂą cela serait nĂ©cessaire pour dĂ©fendre une concession Ă  courte distance. Bien que le massif Colt Walker dominât les Dragoon, peu de ces armes furent utilisĂ©es dans les champs aurifères, puisque seuls 1100 Walker furent fabriquĂ©s et que, parmi ceux-ci, la plupart furent affectĂ©s pendant la Guerre du Mexique, n’en laissant que 100 pour le marchĂ© civil. Toutefois, il existe des traces d’un Walker transportĂ© dans un sac de toile vers la fin de la ruĂ©e vers l’or, par un vieux vĂ©tĂ©ran grisonnant qui râlait parce qu’il ne trouvait jamais d’étui assez grand pour son pistolet d’arçon. Cet exemple, qui mentionne une arme Ă  feu par son nom, est assez rare car, lorsqu’on lit des rĂ©cits contemporains de la ruĂ©e vers l’or, il y est fait peu allusion Ă  tel ou tel type d’arme, plus souvent citĂ©e comme « pistolet Â» ou « fusil Â». Il s’agit lĂ  d’une chose normale, Ă  une Ă©poque oĂą le fait de porter des armes Ă©tait aussi courant que de porter une montre au poignet aujourd’hui. Nous donnons rarement le nom de la marque. Nous disons plutĂ´t Â« J’ai jetĂ© un coup d’œil sur ma montre… Â»

Pourtant, il y eut une arme qui Ă©tait apparemment très estimĂ©e aux yeux des quarante-neuviens et que l’on arrive Ă  identifier parfois, et cette arme, c’est le Colt 1851 Navy ou, comme on l’appelle souvent, le « Navy de chez Colt Â». Une sociĂ©tĂ© qui vendait des catalogues d’accessoires Ă  emporter par les prospecteurs potentiels pour leur voyage vers l’Ouest, alla mĂŞme aussi loin que dire Â« aucun homme ne devrait ĂŞtre sans le 1851, car avec lui, il pourra obtenir tout ce dont il a besoin Â» ! MĂŞme pas peur, le mec. « Achetez donc mes flingues, plutĂ´t que de payer pour une concession de merde oĂą on va vous arnaquer. Au moins, avec mon ’51, vous pourrez en avoir une Ă  l’œil ! Â» De nos jours dans les pays civilisĂ©s, la boĂ®te qui ferait ce genre de publicitĂ© serait immĂ©diatement poursuivie pour incitation Ă  la violence. Bien sĂ»r, le Colt 1851 ne sortit pas avant deux ans après la première vague de prospecteurs et mĂŞme alors, il fallait Ă  n’importe quelle quantitĂ© de ce genre d’arme six mois avant d’arriver au Far West. Mais jusque lĂ , il n’y en avait pas encore vraiment besoin. Â« Pendant l’annĂ©e 1849 Â» Ă©crivait Alonzo DELANO dans son livre Â« le brigandage Ă©tait rare… on laissait les coffres et les ballots ouverts et exposĂ©s… dans les rues bondĂ©es des nouvelles villes. L’or ne semblait pas tenter… les hommes Ă  la malhonnĂŞtetĂ© et on entendait rarement dire qu’un chercheur s’était fait voler. Â» Mais en 1851, tout cela avait changĂ©. Les premières trouvailles faciles du dĂ©but avaient dĂ©jĂ  Ă©tĂ© prises et chercher de l’or Ă©tait devenu un travail sĂ©rieux, Ă©prouvant et souvent ingrat. En consĂ©quence, il y eut des individus qui commencèrent Ă  chercher des moyens plus faciles pour faire fortune. Et les armes des quarante-neuviens, qui avaient auparavant Ă©tĂ© relĂ©guĂ©es Ă  des tâches domestiques, eurent Ă  prĂ©sent un nouveau rĂ´le Ă  jouer comme moyens d’auto-dĂ©fense. Â« Le brigandage et le meurtre Ă©taient quotidiens Â», dit DELANO Ă  propos de ces annĂ©es turbulentes. Â« Des bandes organisĂ©es de voleurs existaient dans les villes et dans les montagnes… il Ă©tait risquĂ© de ne pas ĂŞtre armĂ©. Â»

C’est dans ces dĂ©cors qu’entra en scène le Colt 1851, le revolver Ă  percussion le plus populaire sur le marchĂ© de l’époque, Ă  cause de sa fiabilitĂ©, son excellent Ă©quilibre, sa taille idĂ©ale et la rĂ©putation de son fabricant. Les chambres du Navy Ă©taient suffisamment profondes pour contenir 20 Ă  25 grains de poudre derrière une balle ronde de calibre .36, donnant ainsi nettement moins de pouvoir d’arrĂŞt que les puissants Dragoon, mais si les coups Ă©taient bien placĂ©s, le Colt .36, rapide Ă  pointer, devenait un bon moyen de garder l’or dans la poche du juste. Mais, mĂŞme quand le prĂ©cieux mĂ©tal se trouvait du cĂ´tĂ© de son vĂ©ritable propriĂ©taire, cela ne voulait pas forcĂ©ment dire que le danger Ă©tait passĂ©. Â« Dans une maison de jeux… Â» dit DELANO Â« un homme qui quittait la ville pour rentrer chez lui se laissa entraĂ®ner Ă  tenter sa chance Ă  la table de jeux… fâchĂ© d’avoir perdu son argent, il essaya de se refaire en sortant son pistolet devant l’autre joueur, lequel l’étendit raide avec le sien » Ces rencontres Ă  très courte distance avec les gens de la ville se disputaient souvent avec le minuscule Deringer, un petit pistolet de veste Ă  un coup Ă  percussion et au canon court, très populaire. D’abord produit par Henry DERINGER Junior de Philadelphia, ces armes de dĂ©fense tenant dans la paume de la main, mais de gros calibre, souvent en .40 ou en .50, Ă©taient souvent portĂ©es par les joueurs professionnels, les voyageurs en diligence qui se rendaient vers les champs aurifères ou qui en revenaient, les femmes de toutes rĂ©putations, et les hommes d’affaires qui restaient gĂ©nĂ©ralement près des quartiers populeux, dans ces nouvelles villes champignons de la ruĂ©e vers l’or. Avec sa charge de 15 grains, le Deringer manquait de puissance pour ĂŞtre efficace plus loin qu’à 25 pieds, mais grâce Ă  sa petite taille qui permettait de le dissimuler facilement, donnant Ă  son propriĂ©taire l’avantage de la surprise contre son antagoniste, il devint la deuxième arme de poing la plus populaire de la ruĂ©e vers l’or, et on l’apprĂ©cia tellement que son nom devint synonyme de toutes les autres armes de configuration similaire. Comme pour le Deringer, on choisit les petits Colt de poche modèles 1848 et 1849, comme le Baby Dragoon et le Wells Fargo, pour leur taille compacte plutĂ´t que leur puissance. Mais comme il s’agissait de revolvers, leurs barillets de cinq et six coups pouvaient tirer plusieurs fois si besoin, et mĂŞme le petit calibre .31 occasionnait des dommages graves Ă  courte distance. LĂ©gers, les pistolets de poche Ă©taient pratiques Ă  emporter dans ses bagages pour un chercheur qui aurait Ă  marcher plusieurs miles Ă  travers les collines de la rude Sierra Nevada. Beaucoup de ces pistolets Colt servirent d’arme « de la deuxième chance Â» aux hommes pour qui la vie dans les champs aurifères valait plus qu’une simple aventure. Il existe Ă©galement des preuves que l’une des nombreuses sociĂ©tĂ©s de messagerie qui abondaient en ces temps-lĂ , Ă©quipait ses cavaliers avec des Colt modèle 1849 Ă  canon de 3 pouces.

Bien qu’ils fussent loin d’être le choix optimum pour un homme Ă  cheval, les petits Colts avaient l’avantage d’être les pistolets Ă  plusieurs coups les plus compacts disponibles Ă  l’époque. A un moment de la ruĂ©e vers l’or, le Colt modèle 1849 Ă©tait tellement demandĂ© que ces armes se vendaient au marchĂ© noir Ă  100 Dollars l’unitĂ©, la mĂŞme coĂ»tant moins de 15 Dollars aux « States Â». Mais c’était lĂ  le prix de la protection dans un pays oĂą la population continuait Ă  grossir avec de nouvelles, et toujours plus diverses, espèces du genre humain, pas toujours accueillantes, et toutes attirĂ©es par le leurre de la fortune immĂ©diate. Les joueurs professionnels, les voleurs de concessions et les brigands n’étaient pas les seuls dangers dans ces collines de quartz et de granit au pays de l’or. Ce n’est pas par hasard que l’ours figure sur le drapeau de la Californie aujourd’hui, et en ces temps reculĂ©s, avant l’écrasement de la civilisation, il y en avait beaucoup, et pas toujours très d’accord pour cĂ©der leur territoire Ă  un homme qui venait avec une pelle et une pioche. Les premiers Kentucky Rifle et fusils Ă  Ă©cureuils, lĂ©gers, que certains quarante-neuviens avaient apportĂ©s avec eux, se rĂ©vĂ©lèrent bientĂ´t inutiles dans la nouvelle rĂ©alitĂ© de l’Ouest. Un rĂ©cit de l’époque parle d’un mineur attaquĂ© par un grizzly, pendant que ses trois filles, chacune armĂ©e de son propre fusil, tiraient Ă  bout portant dans la tĂŞte de l’ours avant qu’il fĂ»t enfin tuĂ©. Trois coups Ă©taient plus que ne pouvait tirer tout fusil de l’époque, et il n’est pas surprenant d’apprendre que les lourds fusils des plaines, aux gros calibres et au demi-fĂ»t Ă  l’avant, furent les armes favorites des chercheurs d’or. Beaucoup d’entre eux avaient vu ce que pouvaient faire ces fusils dans les mains de leurs guides, souvent des anciens trappeurs des Montagnes Rocheuses qui utilisaient leur expĂ©rience du Far West pour faire traverser les majestueuses Sierras aux nouveaux-venus. Les Hawken, aussi rares qu’ils fussent, trouvèrent leur chemin vers les champs aurifères. Les Dimmicks et les Lemans trouvèrent eux aussi leur place dans plus d’une cabane de mineur ou une tente, et servirent leurs propriĂ©taires comme ils le devaient en leur apportant de la viande pour la table, ou en leur accordant un coup Ă  longue distance sur un suspect qui aurait pu ĂŞtre un « bandito Â». Il y avait peu de tribunaux en Californie, et le juge, l’avocat et le bourreau se trouvaient souvent sous le mĂŞme chapeau. En plus de ces « armes de sport Â» pour les civils, comme on les appelait parfois, les armes militaires firent elles aussi leur chemin vers la Californie. Bien que la platine Ă  silex fĂ»t considĂ©rĂ©e comme dĂ©passĂ©e par la plus moderne platine Ă  percussion, un certain nombre de fusils Ă  silex et de mousquets du dĂ©but du XIXème. siècle convertis Ă  la percussion furent utilisĂ©s par quelques mineurs. Ces armes Ă©taient solides et, chose plus importante pour un homme pauvre, Ă©taient relativement bon marchĂ©. Bien sĂ»r, le plus prisĂ© fut le fusil rayĂ© Mississipi U.S. Model 1841, une belle arme Ă  percussion en calibre .58, garnie de laiton, qui avait dĂ©jĂ  fait ses preuves lors de la rĂ©cente Guerre du Mexique. Comme le Walker, certaines de ces armes furent « libĂ©rĂ©es Â» pour que l’on s’en servĂ®t en Californie, mais une quantitĂ© beaucoup plus importante fut achetĂ©e comme surplus de guerre avant la fin de la ruĂ©e vers l’or, constituant ainsi une arme fiable contre tout mauvais comportement d’homme ou de bĂŞte, au pays des quarante-neuviens. Comme l’or se faisait plus rare Ă  trouver, et plus cher et difficile Ă  exploiter, certains chercheurs quittèrent le pays. Ironiquement, au cours des premières annĂ©es de la ruĂ©e vers l’or, l’homme ne cherchait que la « couleur Â», au point d’en arriver Ă  Ă©changer l’argent que certains trouvaient parfois en creusant dans le granit. En fait, il est intĂ©ressant de noter que beaucoup de mineurs qui travaillèrent les trĂ©sors d’argent du Nevada venaient des champs aurifères de Californie, et que ceux qui dĂ©couvrirent le fameux Comstock Lode, le Filon de Comstock, Ă©taient d’anciens quarante-neuviens.

En 1858, la grande ruĂ©e vers l’or avait vĂ©cu. Cette annĂ©e-lĂ , l’historien John S. HITCHELL Ă©crivit Â« Le pays Ă©tait plein d’hommes qui n’arrivaient plus Ă  gagner la vie Ă  laquelle ils s’étaient habituĂ©s… ils Ă©taient prĂŞts Ă  aller n’importe oĂą s’il y avait un espoir raisonnable d’y trouver la richesse en creusant, plutĂ´t que de se soumettre Ă  une vie sans la grosse paie et les plaisirs dont ils avaient joui pendant des annĂ©es dans les placiers de Sacramento. Â» Cela ne veut pas dire que tous les quarante-neuviens en ressortirent plus pauvres que lorsqu’ils y entrèrent. Loin de lĂ . En fait, il restait juste assez d’histoires de succès pour continuer Ă  faire rĂŞver. Un chercheur d’or trouva une pĂ©pite de 2000 Dollars le premier jour de l’exploitation de sa concession. Pour un autre, ce qu’il Ă©copa un jour en une seule batĂ©e fut estimĂ© Ă  1500 Dollars. Il est vrai que certains trouvèrent littĂ©ralement leur fortune dans une nouvelle aventure encore jamais racontĂ©e, si l’on avait assez de force et de courage pour lui courir après. Toutefois, rien de cela n’aurait Ă©tĂ© possible sans l’outil qui donnait Ă  chaque homme la mĂŞme chance face au danger et Ă  la difficultĂ©, les armes des quarante-neuviens. Pour beaucoup, ces armes prouvèrent qu’elles Ă©taient beaucoup plus prĂ©cieuses que l’or.

DE CES ARMES, QUI VEND LESQUELLES AUJOURD’HUI AUX U.S.A. ?

Fusil de chasse juxtaposĂ© :       DIXIE GUN WORKS

EUROARMS OF AMERICA

NAVY ARMS Co.

Fusil des Plaines :                     NAVY ARMS Co.

LYMAN PRODUCTS

CONNECTICUT VALLEY ARMS ( C.V.A. )

Missisipi Rifle 1841 :                DIXIE GUN WORKS

NAVY ARMS Co.

Colt 1847 Walker :                  DIXIE GUN WORKS

ALEN FIRE ARMS

Colt 1848 Dragoon :                ALLEN FIRE ARMS

Colt 1848 Baby :                     ALLEN FIRE ARMS

Colt 1849 Pocket :                  ALLEN FIRE ARMS

DIXIE GUN WORKS

Colt 1851 Navy :                     NAVY ARMS CO.

DIXIE GUN WORKS

ALLEN FIRE ARMS

LYMAN PRODUCTS

Poivrière :                                HOPPE’S

Deringer Philadelphia :  DIXIE GUN WORKS

Single Shot :                            CONNECTICUT VALLEY ARMS ( C.V.A. )

DIXIE GUN WORKS

ALLEN FIRE ARMS

NAVY ARMS CO.

DIXIE GUN WORKS – Gunpowder Lane, UNION CITY, TN 38261, U.S.A.

EUROARMS OF AMERICA – 10, W. Monmouth Street, WINCHESTER, VA 22601, U.S.A.

NAVY ARMS Co. – 689, Bergen Boulevard, RIDGEFIELD, NJ 07657, U.S.A.

LYMAN PRODUCTS – Route 147, MIDDLEFIELD, CT 06455, U.S.A.

CONNECTICUT VALLEY ARMS – Saybrook Road, HADDEM, CT 06438, U.S.A.

ALLEN FIRE ARMS – 1107, Pen Road, SANTA FE, NM 87501, U.S.A.

HOPPE’S – Airport Industrial Mall, COATSVILLE, PA 19320, U.S.A.

Et, puisqu’en fait ces maisons importent de l’Italien, n’oublions pas :

UBERTI – Via Carducci Giosue, 1, 25068 SAREZZO ( BS ), Italie

PEDERSOLI – Via Artigiani, 57, 25063 GARDONE VAL TROMPIA ( BS ), Italie

PIETTA – Via Mandolossa, 102, 25064 GUSSAGO (Bs ), Italie

LE COLT POCKET MODEL 1849

Traduction d’un article de Ph. SPANGENBERGER dans D.G.W. Blackpowder Annual 1993

Alors que beaucoup de gens croient que le revolver Colt Single Action Army 1873 fut le six-coups qui gagna l’Ouest, il y eut tout plein d’armes de poing qui eurent un impact sur notre frontière amĂ©ricaine des annĂ©es avant que le S.A.A. fĂ»t mĂŞme un rĂŞve. Bien-sĂ»r, Colt Ă©tait devenu synonyme de qualitĂ© des dizaines d’annĂ©es avant 1873, grâce Ă  ces armes totales que furent le 1851 Navy, le 1860 Army, les diffĂ©rents modèles de Dragoon, et d’autres. Ironiquement toutefois, malgrĂ© la bonne rĂ©putation qu’avaient gagnĂ© ces pistolets « de ceinture Â» ou bien « de selle Â», ce fut un petit pistolet Ă  cinq coups qui donna au Colonel Samuel COLT une place solide dans le commerce des armes. L’époque de la moitiĂ© du dix-neuvième siècle fut une aventure globale. Dans pratiquement tous les coins du monde, il y avait de nouvelles terres Ă  explorer et Ă  conquĂ©rir, des frontières Ă  domestiquer, et des fortunes Ă  faire… ou Ă  perdre. Ceux qui s’aventuraient dans ces terres sauvages voulaient la meilleure protection disponible. Les villes, elles aussi, Ă©taient pourries de crime, et largement peuplĂ©es d’individus peu recommandables. Le chĂ´mage Ă©tait souvent Ă©levĂ©, la famine frappait constamment de nombreuses villes de l’Ancien Monde, et l’absence d’une force de police forte, parfois l’absence de toute police, augmentait le pĂ©ril pour le citoyen. La vie Ă©tait telle en ces temps-lĂ , que porter une arme personnelle n’était pas seulement raisonnable, mais c’était souvent nĂ©cessaire ! Se dĂ©placer d’une zone peuplĂ©e vers une autre reprĂ©sentait souvent une entreprise dangereuse, avec ses bandits de grands chemins et ses bandes errantes de maraudeurs qui constituaient un pĂ©ril pour le voyageur. Les fabricants d’armes Ă©taient occupĂ©s Ă  produire des armes Ă  feu militaires et civiles, ainsi que des armes blanches, et la demande du grand public pour de petites armes de poing, faciles Ă  cacher mais fiables, n’était pas une mince affaire. Sam COLT Ă©tait un homme d’affaires astucieux et rĂ©alisa l’évidence de cette demande. Il rĂ©alisa aussi qu’une telle arme devrait ĂŞtre d’un prix abordable. On utilisait dĂ©jĂ  des milliers de petits pistolets Ă  un coup durant le milieu des annĂ©es 1840. Leur taille variait de l’immense et encombrant pistolets de selle en gros calibre, aux minuscules et inefficaces modèles de Â« pistolets de veston Â». Il y avait des pistolets Ă©quipĂ©s d’une lame de couteau, d’autres avec des poignĂ©es en forme de matraque, ou d’autres Ă©quipements auxiliaires dessus ou dedans, au cas oĂą le coup tirĂ© ne produirait pas l’effet dĂ©sirĂ©. Les « poivrières Â» Ă  canons multiples tournants Ă©taient elles-aussi assez populaires. Bien que ces dernières armes Ă  feu ne fussent pas grand chose en matière d’armes de poing pour nos standards modernes, elles furent en leur temps considĂ©rĂ©es comme les meilleurs pistolets que l’on pĂ»t porter.

Etudiant les problèmes susceptibles de surgir pour produire une arme de poing fiable et de qualitĂ©, tout en gardant un prix d’achat qui la garderait Ă  la portĂ©e du grand public, le Colonel COLT reprit soigneusement chaque stade de la fabrication de son gros revolver Dragoon. Il dĂ©termina que certains Ă©quipements, indispensables sur un gros revolver de ceinture, seraient inutiles pour un petit pistolet de poche, rĂ©duisant ainsi les coĂ»ts de production en temps et en main-d’œuvre pour une telle arme. Selon l’excellent ouvrage Â« Les Variations du Old Model Pocket Pistol de 1848 Ă  1872 Â» de P.L. SHUMAKER, on a estimĂ© que le Colonel COLT Ă©limina environ 85 des quelques 480 opĂ©rations nĂ©cessaires Ă  la production de l’un des gros revolvers de la firme. La production du premier revolver de poche par Colt après l’effondrement de sa Patent Arms Mfg. Co. Ă  Paterson, New Jersey, dĂ©buta vers 1847. Le rĂ©sultat est ce que les collectionneurs appellent aujourd’hui le revolver Model 1848 Baby Dragoon. Cette arme est le prĂ©dĂ©cesseur du Pocket Model 1849. Avec une production d’environ 15 000 Baby Dragoon, il reprĂ©sente le premier modèle de poche fabriquĂ© Ă  l’usine Colt de  Hartford, Connecticut. En fabriquant le premier de ces nouveaux pistolets de poche de calibre .31, Colt voulait dĂ©libĂ©rĂ©ment offrir une arme Ă  feu bon marchĂ© qui pourrait se comparer plus favorablement aux armes de poing Ă  un coup alors disponibles. Parmi les mesures destinĂ©es Ă  rĂ©duire les coĂ»ts de fabrication du revolver Baby Dragoon de Colt, figurait le remplacement du traditionnel barillet Ă  six coups que l’on trouvait sur le gros revolver de ceinture, par un autre qui n’en contiendrait que cinq. D’autres mesures incluaient un rempart sans dĂ©coupe pour la mise en place des amorces, et l’absence du refouloir assemblĂ© sous le canon. Pour charger ces premiers Colt, on devait d’abord chasser la clavette retenant le canon Ă  la carcasse. Ensuite, on chargeait chaque chambre du barillet avec de la poudre, puis on forçait une balle dans chaque chambre en utilisant l’axe du barillet, Ă©chancrĂ© Ă  son extrĂ©mitĂ©.

Après avoir procĂ©dĂ© de la sorte, les amorces Ă©taient posĂ©es sur les cheminĂ©es, on replaçait le barillet sur l’axe et on assemblait le tout en le maintenant avec la clavette. Enfin, on faisait tourner le barillet pour faire reposer le chien dans une unique encoche de « sĂ©curitĂ© Â» situĂ©e entre deux chambres. Parce qu’il n’y avait pas la dĂ©coupe sur le rempart pour mettre les amorces, si l’une des amorces ne partait pas et ne faisait pas partir le coup, il fallait dĂ©monter le pistolet pour remplacer l’amorce. Cependant, en dĂ©pit de ces inconvĂ©nients, le nouveau revolver de poche de Colt Ă©tait supĂ©rieur, dans sa conception et dans sa fonction, ainsi qu’en qualitĂ©, Ă  toutes les autres armes de poing Ă  un coup disponibles sur le marchĂ©. L’approbation du public Ă©tait gĂ©nĂ©rale et ce nouveau petit pistolet fut un succès dès le dĂ©but. Seul un petit nombre de Colt « Pocket Â» furent produits, environ 150, avant que la compagnie ne commençât Ă  les perfectionner et les amĂ©liorer. On procĂ©da Ă  plusieurs changements : l’addition d’un refouloir pour faciliter le chargement, une dĂ©coupe dans le rempart pour permettre le rĂ©-amorçage sans dĂ©monter, et une petite roulette Ă  la base du chien. De petites encoches furent alĂ©sĂ©es sur le barillet entre chaque chambre Ă  la place d’une seule, et des encoches rectangulaires furent creusĂ©es dans le barillet pour le bloquer en place, au lieu des petites encoches rondes. On changea la dĂ©tente et le pontet, et la forme du canon et de la carcasse fut lĂ©gèrement modifiĂ©e et rallongĂ©e. Ces dĂ©tails, ainsi que quelques changements cosmĂ©tiques, comme l’adoption d’une scène gravĂ©e reprĂ©sentant une diligence, les premiers Pocket Models reprenaient la scène de combat entre Ranger et Indien que l’on voyait sur le Dragoon et sur le Baby Dragoon, donnèrent ce qui fut connu comme le pistolet standard Model 1849 Colt Pocket Model.

Produit sous une variĂ©tĂ© de configurations et de longueurs de canons, le Pocket Model 1849 devint l’une des armes de poing les plus connues de son temps. La production de ce modèle dĂ©buta en 1850 et des milliers furent emportĂ©s vers l’Ouest dans la RuĂ©e vers l’Or en Californie. C’étaient les armes favorites des mineurs, les postiers, et d’autres hommes de l’Ouest qui avaient besoin d’un petit revolver de poche. Sur la Barbary Coast Ă  San Francisco, un joueur professionnel qui jugeait sage de garder un Colt Pocket cachĂ© sur sa personne quand il se livrait Ă  sa profession douteuse, appelait parfois une telle arme son Â« cinquième as Â». Pendant la Guerre Civile, les soldats en bleu ou en gris portaient des Pocket Model 1849 pour avoir un surplus de puissance de feu en cas de combat au corps Ă  corps et, pendant des dizaines d’annĂ©es au cours du milieu du dix-neuvième siècle, les aventuriers dans le monde entier louaient ces petits Colt dans les meilleurs termes. Bien que le Colt Pocket Model 1849 ne dĂ©veloppait pas beaucoup de punch, ce n’était pas toujours nĂ©cessaire d’en avoir. De telles armes furent souvent utilisĂ©es comme moyen de pression en cas de situation difficile : une carte mal distribuĂ©e, une dispute au sujet d’une concession de mine, ou peut-ĂŞtre en faisant un prĂ©lèvement bancaire… Souvent, il n’y avait juste qu’à brandir une arme Ă  feu pour obtenir le rĂ©sultat dĂ©sirĂ©. Lorsque c’était le cas, ce qui se passait alors rĂ©sultait plutĂ´t de beaucoup d’autres facteurs que la puissance de l’arme. Une balle ronde ou pointue de calibre .31 pèse environ 45 grains de plomb pur et mou. Avec une charge standard de 15 grains de FFFg de poudre noire, la balle voyage Ă  quelques 590 FpS et touche avec un peu moins de 35 FP d’énergie. En comparaison, le petit .32 S&W tirĂ© dans les revolver Ă  canons courts dĂ©veloppe approximativement 680 FpS, et dĂ©livre 90 FP de choc. Pour les standards modernes, ces Colt de poche sont donc loin d’être impressionnants. Mais, utilisĂ©s Ă  des distances comme autour d’une table de cartes, et si l’on prend en considĂ©ration le projectile en plomb mou, avec la technologie relativement primitive de l’époque, spĂ©cialement si la victime Ă©tait blessĂ©e dans le dĂ©sert ou dans un camp perdu de mineurs oĂą l’aide mĂ©dicale compĂ©tente n’existait souvent pas, il est facile de comprendre comment on peut se servir d’un revolver si anĂ©mique. Bim, Bim, dans la tĂŞte, entre l’œil et l’orbite vers l’hypophyse, ou bien dans l’oreille vers le cervelet, et on n’en parle plus. MalgrĂ© la petite taille et la puissance relativement faible, ces revolvers pour tirer Ă  courte distance Ă©taient autant considĂ©rĂ©s Ă  leur Ă©poque comme l’armement personnel d’un homme, que toute autre arme Ă  feu. En Juillet 1850, le Missouri Commonwealth se vantait de la sĂ©curitĂ© qu’il apportait Ă  ses clients sur une nouvelle ligne de diligence Ă  mule, reliant Independence, Missouri, Ă  Santa Fe, New Mexico : Â« Le courrier est gardĂ© par huit hommes, armĂ©s comme suit : Chaque homme a sur le cĂ´tĂ©, attachĂ© Ă  la diligence, un fusil revolver Colt, dans un holster plus bas, un long revolver Colt, et dans sa ceinture, un petit revolver Colt, Ă  cĂ´tĂ© d’un couteau de chasse. Ainsi, ces huit hommes sont prĂŞts, en cas d’attaque, Ă  tirer 136 coups sans avoir besoin de recharger. Â» Dans ses rĂ©cits humoristiques qu’il fait sur ses voyages dans l’Ouest dans les annĂ©es 1860, Mark TWAIN fait Ă©tat d’un conducteur de diligence qui s’arma avec l’un des petits revolvers de poche de Colt.

On trouve d’autres tĂ©moignages de la popularitĂ© du Colt Pocket Model 1849 dans le fait que, dans les mines d’or de Californie au dĂ©but des annĂ©es 1850, la demande pour des revolvers de qualitĂ© Ă©tait si grande que l’usine Colt de Hartford, Connecticut, Ă©tait incapable de faire face aux commandes. Les gros Colt de ceinture qui se vendaient autour de 16,00 $ Ă  18,00 $ sur la cĂ´te Est, se revendaient jusqu’à 250,00 $ ou 500,00 $ la pièce dans l’Ouest ! MĂŞme le petit ’49 en, calibre .31, moins cher, atteignait un prix de près de 100,00 $ sur la cĂ´tĂ© Ouest. Le Colt Pocket Model 1849 Ă©tait vendu avec des longueurs de canons de trois, quatre, cinq et six pouces. Les tubes de quatre et de cinq pouces Ă©taient les plus courants, alors que la version Ă  six pouces semble la plus rare. Le Pocket Model possĂ©dait un canon et un barillet bronzĂ©s bleu, alors que la carcasse et le refouloir Ă©taient jaspĂ©s. Les garnitures Ă©taient gĂ©nĂ©ralement plaquĂ©es argent sur du laiton, bien que certaines furent faites en fer bronzĂ© ou plaquĂ© argent. Les crosses standard d’usine Ă©taient faites dans une pièce de noyer, typique des Colt de cette Ă©poque. On proposait Ă©galement de l’ivoire ou d’autres matĂ©riaux exotiques, et les armes prĂ©sentant de telles poignĂ©es de luxe, soit lisses ou finement gravĂ©es, servaient de pièces d’exposition de grand luxe. On les rencontre avec une variĂ©tĂ© de marquages sur le canon, y compris deux variantes d’une adresse Ă  New York, un marquage Hartford, CT., et l’adresse Ă  Londres, tous sur le haut du canon. Bien que l’une des amĂ©liorations du Pocket Model 1849 fĂ»t l’intĂ©gration d’un refouloir, un petit nombre d’entre eux fut produit sans. Ces revolvers Ă  canon de trois pouces, sans leviers de chargement, ont Ă©tĂ© appelĂ©s modèles« Wells Fargo Â». Il n’y a pas de preuves que la compagnie de diligence bien connue ait un jour adoptĂ© ce revolver comme arme officielle pour ses conducteurs, ses gardes ou ses divers agents. En tous cas, ces pistolets ne se vendirent jamais bien, et vers 1860, Colt essaya de vendre le solde du stock de ces revolvers sans refouloir en leur en mettant un. Ceci fut fait en modifiant sommairement le levier de chargement du modèle standard Ă  quatre pouces. Mais ces pistolets rencontrèrent la dĂ©sapprobation du public, car le levier Ă©tait trop court pour permettre la pression nĂ©cessaire Ă  mettre la balle en place. On a estimĂ© qu’environ 100 de ces Pocket Model Ă  trois pouces transformĂ©s sortirent de l’usine. Aujourd’hui, de tels Colt transformĂ©s en usine sont des pièces de collection extrĂŞmement recherchĂ©es. Il n’y a pas de doute que les employĂ©s de la Wells Fargo ont bien utilisĂ© des Pocket Model 1849, avec et sans refouloirs. Beaucoup ont Ă©tĂ© achetĂ©s sur fonds privĂ©s, comme d’autres armes, et furent certainement portĂ©es par les conducteurs de diligence et d’autres agents de la W.F. & Co. On connaĂ®t deux Model 1849 dans la Bank’s History Room de la Wells Fargo Ă  San Francisco, qui portent des inscriptions les identifiant comme ayant appartenu Ă  la compagnie. Pendant les 23 ans qu’il resta en production, environ  325 000 exemplaires du Pocket Model 1849 furent fabriquĂ©s Ă  l’usine Colt de Hartford. Un autre lot de 11 000 fut produit Ă  l’usine de Londres, Angleterre. Les armes Anglaises sortirent entre 1853 et 1857, et sur les modèles les plus anciens, les garnitures sont en laiton avec les bords du pontet arrondis. Les modèles tardifs eurent des garnitures en fer et un grand pontet ovale. La production de cette arme de poing fut finalement arrĂŞtĂ©e en 1873, lorsque Colt commença Ă  produire des revolvers tirant des cartouches mĂ©talliques. Le Colt Pocket Model 1849 fut parmi les revolvers Ă  percussion qui furent convertis Ă  l’usine Colt, dans une première tentative de produire des armes de poing tirant des cartouches mĂ©talliques. En plus de cela, on a trouvĂ© des Colt Pocket ’49 qui avaient Ă©tĂ© convertis par d’autres armuriers que ceux de l’usine, une preuve que la popularitĂ© de l’arme continua loin après l’âge de la percussion. Avec des concepts plus nouveaux et plus solides en matière d’armes de poing, ainsi que des munitions plus Ă©laborĂ©es, le Colt Pocket Model 1849 fut lentement remplacĂ© par des armes plus modernes. A l’époque de sa gloire, pourtant, le Pocket Model 1849 fut le revolver Ă  percussion produit dans le plus grand nombre que tous les autres, et l’arme qui plaça Samuel COLT et sa compagnie lĂ©gendaire dans les affaires pour une Ă©ternitĂ©.

LA BATAILLE DES LAVA BEDS

U.S. Army contre Modoc

Traduction d’un article de J.G. BILBY paru dans D.G.W. Blackpowder Annual 1993

Dans le sillage de la RuĂ©e vers l’Or de 1849, les petites tribus indigènes d’AmĂ©rindiens de Californie furent accablĂ©es par une vague de pillages, de viols, de massacres et de maladies qui rĂ©duisirent la population Indienne de l’Etat de soixante dix pour cent. A moins d’un millier, les Modoc, qui chassaient, cueillaient et pĂŞchaient sur une zone de plus de 5000 miles carrĂ©s près de la frontière entre la Californie et l’Oregon, refusèrent de sombrer tranquillement dans l’histoire sans rĂ©agir. Les Modoc prĂ©fĂ©raient Ă©viter les Blancs, mais l’invasion engendra une rĂ©sistance et dĂ©gĂ©nĂ©ra en une sĂ©rie de conflits pendant toutes les annĂ©es 1850. RavagĂ©s par la guerre et par la variole, opprimĂ©s par les colons et le gouvernement, les Modoc furent forcĂ©s Ă  Ă©migrer vers la RĂ©serve Klamath dans l’Oregon, après un traitĂ© signĂ© en 1864. Bien qu’harcelĂ©s par les Klamath, leur principal chef, Old Schonchin, Vieux Chauchichon, avec d’autres de son peuple, s’adaptèrent aux difficultĂ©s et Ă  la prĂ©caritĂ© de la vie en rĂ©serve. Beaucoup ne purent pas le faire. Kientpoos, connu chez les Blancs comme Captain Jack, retourna vers les traditionnels territoires de chasse sur la Lost River, Oregon. En 1870, le Responsable aux Affaires Indiennes de l’Oregon, Alfred B. MEACHAM, rĂ©ussit Ă  convaincre Jack de revenir dans la rĂ©serve auprès de son peuple. Pourtant, de nouveaux heurts avec les Klamath, combinĂ©s Ă  un programme officiel de destruction des pratiques culturelles et religieuses traditionnelles Modoc, provoqua une nouvelle fuite de la bande vers la Lost River en quelques mois. Les mineurs de la ville de Yreka, Ă©galement appelĂ©e Eureka et situĂ©e sur la cĂ´te, California, oĂą les Modoc travaillaient, achetaient, demandaient avis et aidaient mĂŞme Ă  combattre des feux, n’étaient pas gĂŞnĂ©s par le retour des Indiens. Les fermiers locaux non plus, payant un « loyer Â» aux Modoc sous forme de marchandises et de nourriture, ou employant des Indiens comme cow-boys, c’est-Ă -dire comme gardiens de vaches. Mais certains colons, en particulier de l’Oregon, estimaient que les Modoc constituaient une menace et envoyèrent une pĂ©tition au gouvernement pour qu’on les renvoyât. Tentant un compromis, Captain Jack proposa que l’on lui accordât une rĂ©serve de six miles carrĂ©s sur la Lost River pour lui et son peuple. Mais cette solution tout Ă  fait raisonnable, avalisĂ©e par MEACHAM et par le GĂ©nĂ©ral Edward R.S. CANBY, chef du DĂ©partement Ă  Columbia, ne fut jamais vraiment prise au sĂ©rieux, sans doute parce qu’elle aurait constituĂ© un dangereux prĂ©cĂ©dent en permettant aux Indiens de rĂ©clamer leurs terres traditionnelles.

Pendant que se traitaient toutes les tentatives de convaincre le peuple de Jack de revenir vers la rĂ©serve, Curly Headed Doctor, Docteur TĂŞte BouclĂ©e, un shaman, prĂ©senta la Danse des Esprits Ă  la bande de la Lost River. Mieux connue pour son association avec la tragĂ©die de Wounded Knee, le Genou BlessĂ©, en 1890, la religion de la Danse des Esprits, qui promettait Ă  ses fidèles la disparition des Blancs et la restauration de leur ancien mode de vie, tient ses origines chez les PaĂŻutes en 1870. Au dĂ©but de 1872, MEACHAM fuit remplacĂ© par T.B. ODENEAL. Le nouveau responsable promettait publiquement d’être ami avec les Indiens, mais demandait sous la table Â« l’élimination Â» de la bande de Jack, disant que c’était Â« la manière la plus clĂ©mente et la plus ChrĂ©tienne Â», et le moyen Â« le plus sĂ»r Â», de rĂ©gler le problème. Il n’y avait pas de nĂ©gociation possible. Le gouvernement n’approuverait pas une rĂ©serve sur la Lost River, et Jack, pressĂ© par les Danseurs des Esprits, risquait sa place de chef s’il faiblissait. S’il acceptait d’aller autre part, il perdrait Ă  coup sĂ»r. ODENEAL ne perçut pas la force de la bande de la Lost River, faisant l’erreur de conclure que Captain Jack, Hooker Jim, Jim la Pute, et d’autres chefs, ne reprĂ©sentaient pas leur peuple qui, croyaient-ils, voulait rĂ©intĂ©grer la rĂ©serve. FrustrĂ©, le Responsable des Affaires Indiennes demanda au Major John GREEN du 1st. Cavalry, commandant du Fort Klamath, de former une Â« force suffisante Â» pour arrĂŞter le chef Modoc. Sans en rĂ©fĂ©rer Ă  CANBY, GREEN ordonna au Capitaine James JACKSON de mettre le Compagnie B du 1st. Cavalry en selle et de se rendre sur la Lost River. Seize heures plus tard, les trente huit hommes de JACKSON s’approchaient du village endormi de Captain Jack, pendant qu’une bande non officielle de quatorze civils armĂ©s traversaient la rivière pour pĂ©nĂ©trer dans le camp de Hooker Jim. Comme Jack restait dans sa cabane, JACKSON engagea un pourparler futile avec plusieurs Modoc, puis leur commanda de lui remettre leurs armes.

Comme les Indiens hĂ©sitaient, le Lieutenant F.A. BOUTELLE dit Ă  JACKSON que la bagarre Ă©tait sur le point d’éclater et que Â« plus vite vous la commencerez vous-mĂŞme, meilleur ce sera pour nous ». Le Lieutenant sortit son revolver et se prĂ©cipita sur Scarface Charley, Charlie la Balafre, lui criant Ă  la figure Â« Fils de pute ! Â» et lui tirant dessus. Charley riposta, Ă©raflant le bras gauche de l’officier. Et voilĂ , c’est parti ! Encore un de ces cons de sous-fifres qui fout la merde parce qu’il veut des galons en montrant Ă  ses supĂ©rieurs comment il se bagarre. En plus, il loupe l’Indien qui est juste en face de lui, et l’autre lui fait mal. Les soldats ouvrirent le feu avec leurs carabines Sharps en .50-70, et les Modoc se mirent Ă  couvert derrière leurs cabanes en ripostant eux aussi. En cinq minutes, on fit cesser le feu des deux cĂ´tĂ©s, avec un soldat et un Modoc morts, et sept soldats blessĂ©s. Les Tuniques Bleues ont ouvert le feu en premier, donc ils avaient l’avantage, mais on dirait qu’il leur manquait encore un peu d’entraĂ®nement parce qu’ils n’ont mĂŞme pas Ă©tĂ© capables de buter plus d’Indiens qu’un seul et qu’ils n’en ont mĂŞme pas blessĂ© d’autres, tout en ayant dĂ©jĂ  sept blessĂ©s chez eux, spĂ©cialement quand on sait que les Indiens n’avaient pas la rĂ©putation d’être des tireurs exceptionnels. En entendant le bruit des coups de feu, les civils tirèrent dans le camp de Hooker Jim avec leurs fusils Henry et leurs fusils de chasse juxtaposĂ©s, blessant une femme et tuant son enfant, avant de battre en retraite en laissant deux morts derrière eux. Eux aussi, c’étaient des nuls. Avec des armes Ă  rĂ©pĂ©tition et des cracheurs de plomb, ils n’arrivent mĂŞme pas Ă  descendre des guerriers, juste une femme et un enfant qui Ă©taient sans armes, et en plus, ils laissent deux des leurs par-terre. Pendant que les soldats brĂ»laient son village, Jack emmena ses guerriers vers le Sud en Californie, sur la berge Ouest du Lac Tule. Ses femmes et ses enfants s’enfuirent dans des canoĂ«s. Les Modoc de Jack prĂ©vinrent des colons Blancs et leur dirent qu’il Ă©tait prĂ©fĂ©rable pour eux de quitter le pays, mais la bande de Hooker Jim tua une douzaine d’hommes en s’enfuyant le long de la rive Est du lac. Comme la rumeur de la bataille se rĂ©pandait, des fermiers amicaux tentèrent d’escorter une autre bande de Modoc sortis de leur rĂ©serve, avec Ă  sa tĂŞte Shacknasty Jim, Jim Baraque MĂ©chante, depuis Hot Creek jusqu’à la rĂ©serve. A Linkville, Oregon, une bande de querelleurs ivres menacèrent de lyncher les Modoc de Hot Creek et les effraya tellement qu’ils s’enfuirent pour rejoindre les fugitifs.

la bataille des lava beds 1
la bataille des lava beds 1

De gauche à droite, Scarface Charley, l’homme à la balafre sur la joue droite qui tourne la tête pour la cacher, Bogus Charley, ou «Charlie le Faux-Jeton», Steamboat Frank, ou «Frank du Bateau à Vapeur», Long Jim, ou «Jim le Long», et Shacknasty Jim. Long Jim porte une veste de l’Armée. Bien avant la guerre, beaucoup de Modoc avaient travaillé comme cow-boys pour les fermiers Blancs et avaient depuis longtemps abandonné leurs vêtements traditionnels. Mais une toque en fourrure Russe ou un petit chapeau de bourgeois, ça fait bizarre, sur la tête de Japonais. Ils ont les mains dans les poches. Manque plus que la cigarette.

Les fugitifs se rassemblèrent dans les Lava Beds, les Lits de Lave, cinquante miles carrĂ©s de prairies couvertes de buissons Ă©pineux et marquĂ©es par un paysage lunaire de restes volcaniques criblĂ©s de fissures, de crĂŞtes et de grottes au Sud du Lac Tule. Le terrain accidentĂ© des Beds offrait une sĂ©rie de positions dĂ©fensives naturelles, et les Indiens y Ă©tablirent une « forteresse Â» au milieu d’un fouillis de lave durcie, près des berges du lac. Lorsqu’il apprit la catastrophe dont ses subordonnĂ©s s’étaient rendus responsables, CANBY ordonna que l’on concentrât toutes les forces disponibles sur les Lava Beds. Son commandant sur le terrain Ă©tait le Lieutenant Colonel Frank WHEATON du 21st. Infantry qui, comme CANBY, Ă©tait un vĂ©tĂ©ran aguerri de la Guerre Civile.

Les forces de WHEATON comprenaient trois compagnies de la 21st. Infantry, trois de la 1st. Cavalry, et une section d’obusiers de montagne de 12 livres. Les 225 soldats de WHEATON étaient renforcés de 133 Volontaires de l’Oregon, dont beaucoup étaient des Indiens de la réserve Klamath, et 29 Californiens. En face de cette armée se trouvaient environ 150 Modoc, dont 50 guerriers.

Au soir du 16 Janvier 1872, comme les hommes de WHEATON prenaient place sur une falaise surplombant les Lava Beds, les Modoc terminaient la prĂ©paration finale de leurs dĂ©fenses. Curly Headed Doctor Ă©rigea un totem pour la Dance des Esprits, dĂ©corĂ© avec des talismans sacrĂ©s, au centre de la « forteresse Â», et entoura toute la zone d’un cercle protecteur fait d’herbe tressĂ©e peinte en rouge. Puis le sorcier entraĂ®na les Modoc dans une danse lancinante qui dura toute la nuit, et dont les Ă©chos rebondirent sur les escarpements de lave vers des soldats grelottants agglutinĂ©s autour de feux de broussailles. WHEATON lança son assaut simultanĂ© de l’Est et de l’Ouest Ă  4H00 du matin. L’infanterie Ă©tait armĂ©e du fusil rĂ©glementaire Springfield Model 1868 en .50-70.

Le Model 1868 fut la troisième des neuf versions du « Trapdoor Â», et on en fabriqua 51 389 exemplaires de 1868 Ă  1872. Beaucoup de composants proviennent des fusils Springfield Model 1861 et Model 1863. La caractĂ©ristique principale est la culasse pivotant vers l’avant, dont l’idĂ©e avait Ă©tĂ© piquĂ©e Ă  Hiram BERDAN  par Erskine S. ALLIN. L’affaire fit l’objet d’un long procès finissant après la mort de BERDAN, qui criait tout le temps « ALLIN, pour qu’elle revienne… Â».

Quelques-uns des Volontaires avaient Ă©tĂ© dotĂ©s de Springfield, et les autres portaient des fusils de sport. Les Compagnies B et G de la 1st. Cavalry Ă©taient armĂ©es de carabines Sharps en .50-70, alors que la Compagnie F avait des carabines Ă  rĂ©pĂ©tition Spencer Model 1865 Ă  sept coups en calibre .56-50. Les Modoc les affrontaient avec des fusils se chargeant par la bouche et des revolvers Ă  percussion. Bref, ils Ă©taient Ă  50 contre 387, et pas vraiment Ă  armes Ă©gales. On sait donc dĂ©jĂ  comment ça va finir : mal. Mais pour qui ?

Les obusiers de montagne donnèrent le signal de l’attaque, mais se turent bientĂ´t parce qu’un brouillard blanc recouvrait le champ de bataille et gĂŞnait l’observation. Très vite, les hommes de GREEN se mirent Ă  tirer sur des fantĂ´mes, alors que les Modoc les plus près se trouvaient Ă  un mile de lĂ  et que leur forteresse Ă©tait encore Ă  plus de trois miles. Lorsque les soldats arrivèrent enfin Ă  portĂ©e de tir, les Indiens, la tĂŞte hĂ©rissĂ©e d’un camouflage de buissons, ouvrirent un feu nourri sur eux puis disparurent. Les soldats se retrouvèrent seuls, piĂ©tinant lentement Ă  travers une brume vide, et dĂ©chirant leurs chaussures et leurs habits sur les arĂŞtes vives des rochers de lave. En fin d’après-midi, on mit fin Ă  l’attaque. Les guerriers Modoc, aidĂ©s par leurs femmes qui rechargeaient les fusils de rechange pendant qu’ils tiraient, surent tirer avantage de leur ligne intĂ©rieure en envoyant de petites escouades d’un point Ă  un autre, dĂ©fiant effrontĂ©ment leurs ennemis en leur envoyant injures et balles, les clouant au sol lĂ  oĂą ils Ă©taient. Avec tous les cris et les coups de feu qu’ils entendaient, beaucoup de soldats croyaient que les Indiens Ă©taient plus nombreux qu’eux. La confiance de l’Army fondit encore plus lorsque plusieurs cartouches de Spencer ne partirent pas, et que certaines carabines Sharps s’enrayèrent Ă  cause d’un extracteur dĂ©fectueux. Au dĂ©but de l’action, les Volontaires de l’Oregon avaient dĂ©jĂ  dĂ©clarĂ© une paix sĂ©parĂ©e, et beaucoup de rĂ©guliers se prĂ©cipitèrent vers l’arrière pour se rĂ©fugier dans le brouillard. Au crĂ©puscule, il restait moins de 100 soldats en action. Les Klamath ne montraient aucune envie de se battre, et donnèrent des amorces, de la poudre et des cartouches aux Modoc qu’ils rencontraient cachĂ©s dans le brouillard. Beaucoup de Modoc purent se rĂ©armer avec des fusils, des carabines et des munitions que les autres avaient abandonnĂ©s. VoilĂ . Tout faux, les mecs, Ă  peine c’est commencĂ©.

Les Volontaires en retraite avaient laissé derrière eux des fusils Remington et Ballard, et Shacknasty Jim récupéra le trophée du jour, un fusil à répétition Henry à seize coups. Les Modoc démontèrent des cartouches capturées afin de récupérer de la poudre et du plomb pour leurs armes à chargement par la bouche. Du côté des défenseurs, les tireurs isolés avaient tué quatorze attaquants et en avaient blessé vingt trois, sans aucune perte chez eux. Le General CANBY renvoya un WHEATON écrasé qui, dans le sillage de sa défaite, avait appelé 1000 hommes en renfort avec un support de bateaux et de mortiers pour débusquer les Modoc. WHEATON fut remplacé par le Colonel Alvan C. GILLEM du 1st. U.S. Cavalry.

Jack et sa suite Ă©taient partisans de la paix, mais il y avait d’autres factions dans la bande qui s’opposaient Ă  tout compromis, dont les hommes de Hooker Jim qui avaient peur de reprĂ©sailles pour les meurtres des colons, et les partisans de Curly Headed Doctor qui croyaient que la magie du sorcier leur assurerait la victoire. Les parlementaires n’avaient pas pouvoir pour garantir Ă  Jack ce qu’il voulait le plus : une rĂ©serve sur la Lost River ou mĂŞme sur les Lava Beds. L’amnistie et la dĂ©portation Ă©tait ce qu’ils pouvaient lui offrir de mieux. Pour compliquer les choses, l’Oregon poursuivit plusieurs Modoc pour meurtre. La sĂ©lection avait Ă©tĂ© faite au hasard et elle incluait Scarface Charley, lequel n’avait tuĂ© personne, sauf au combat. L’un des pontes de l’Oregon garantit aux Modoc qu’ils seraient tous pendus. Un autre leur dit qu’ils seraient brĂ»lĂ©s vifs s’ils se rendaient. Pendant que la marĂ©e des palabres montait et descendait, les hommes de GILLEM se rapprochèrent des Lava Beds, et dĂ©concertèrent les Indiens en capturant trente trois chevaux. Encore un coup dans le dos de ces salauds de visages-pâles Ă  la langue fourchue. Pendant qu’on discute pour faire la paix, l’autre vient par derrière pour te niquer tes billes. DĂ©jĂ  maigre avant, l’intendance de Jack s’érodait. DĂ©guisĂ© de force avec des vĂŞtements de femme avec des Modoc « durs Â» qui se moquaient de lui pour cette raison, Jack accepta finalement de les mener pour tuer les parlementaires au cours d’une rencontre prĂ©vue pour le 11 Avril 1873. Curly Headed Doctor, Hooker Jim et leurs partisans, Ă©taient convaincus que l’armĂ©e battrait en retraite si le General CANBY Ă©tait tuĂ©. Bien que prĂ©venu du complot par Toby Riddle, Toby Devinette, une femme Modoc qui, avec son mari Frank, servait d’interprète, CANBY mĂ©prisa le danger. Les parlementaires MEACHAM et L.S. DYAR firent preuve de moins de tĂ©mĂ©ritĂ© que le General et glissèrent des derringers dans leurs poches. Le dernier membre de l’équipe de nĂ©gociateurs, le Reverend Eleasar THOMAS, avait placĂ© toute sa confiance en Dieu. Lorsque les parlementaires et les Ă©poux Riddle arrivèrent Ă  la tente de confĂ©rence qui avait Ă©tĂ© plantĂ©e entre les lignes, ils furent accueillis par Captain Jack et sept autres Modoc portant ouvertement des revolvers. D’autres Indiens, armĂ©s de fusils, Ă©taient cachĂ©s dans les rochers. Coup tordu pour coup tordu. T’vas voir t’t’à l’heure. Comme CANBY distribuait des cigares, Jack, dans un dernier petit effort pour Ă©viter un dĂ©sastre imminent, rĂ©itĂ©ra une nouvelle fois sa requĂŞte pour une rĂ©serve, offrant mĂŞme de croire CANBY Â« sur parole Â». Le mot n’était pas, il ne pouvait pas l’être, Ă -propos. Sentant que les dĂ©s Ă©taient jetĂ©s, Jack cria Â« C’est parti ! Â» en Modoc, dĂ©gaina son revolver et tira sur CANBY. L’arme fit long-feu, Jack ramena de nouveau le chien en arrière et appuya une nouvelle fois sur la dĂ©tente, touchant le General en dessous de l’œil gauche. Mortellement blessĂ©, CANBY tomba par terre, se releva et s’enfuit en titubant. Lorsque le General s’écroula de nouveau un peu plus loin, Ellen’s Man George, George le Mari d’HĂ©lène, lui tira dessus avec un fusil, et Jack le poignarda. Ben merde… Pendant ce temps-lĂ , Boston Charley, Charlie de Boston, tua le Reverend THOMAS, se moquant du prĂŞtre parce que sa magie ne marchait pas. MEACHAM, brandissant son derringer, se retourna sur ses talons et se mit Ă  courir, jusqu’à ce qu’il fĂ»t fauchĂ© par une balle et qu’il tombât au sol. DYAR, son derringer dans la main lui aussi, se prĂ©cipita vers les lignes de l’armĂ©e avec Frank Riddle. Comme les deux hommes s’enfuyaient, les Modoc, qui n’avaient jamais eu la moindre intention de tuer les Riddle, d’ailleurs Scarfaced Charley qui refusait de participer Ă  ces meurtres, avait menacĂ© de tirer sur quiconque leur ferait du mal, se mirent Ă  dĂ©trousser CANBY, MEACHAM et THOMAS. Jack prit la vareuse de l’uniforme du General et Ellen’s Man sa montre. Boston Charley fit quelques tentatives pour couper la tĂŞte de CANBY et se posait des questions sur la meilleure façon de scalper un chauve, lorsque Toby Riddle cria Â« VoilĂ  les soldats ! Â» Les Modoc s’enfuirent. Des sauvages, que j’te dis, ces Indiens. Des sauvages ! A peine l’autre il est par terre qu’il a dĂ©jĂ  plus de veste ni de montre. C’est comme si tu t’arrĂŞtes sur l’autoroute pour changer un pneu, Ă  peine t’as commencĂ© Ă  l’avant qu’il y a quelqu’un qui dĂ©monte la roue arrière pour partir avec. Et le gros chauve, ce con, y a mĂŞme pas moyen de le scalper comme il faut. C’est quand-mĂŞme un monde, çà, madame !

Lorsque l’histoire fut relatĂ©e dans les journaux, le public cria revanche. Le PrĂ©sident GRANT abandonna sa politique de paix, et le General William T. SHERMAN, qui Ă©tait loin d’être un ami des Indigènes AmĂ©ricains dans les meilleures circonstances, prĂ©conisa une Â« extermination pure et simple Â» des Modoc et ordonna l’envoi de renforts vers les Lava Beds. Parmi les effectifs ajoutĂ©s aux forces du Colonel GILLEM, on compta 72 Ă©claireurs Indiens de Warm Springs, qui remplacèrent les Klamath inutiles. La force de l’armĂ©e grimpa Ă  1000 hommes y compris quatre compagnies de cavalerie, cinq d’infanterie et quatre batteries d’artillerie. Le 14 Avril, GILLEM donna l’ordre aux Compagnies F et K de la 1st. Cavalry, aux E et G de la 12th. Infantry, aux Batteries K, M et E de la 4th. Artillery, qui servait d’infanterie, et aux Indiens de Warm Springs, d’attaquer depuis l’ouest et le sud dans un mouvement de balayage. Trois compagnies de la 21st. Infantry et les Compagnies G et B de la 1st. Cavalry pĂ©nĂ©trèrent de l’est, dans l’espoir de faire la jonction avec les forces de l’ouest. L’assaut commença le jour suivant et les Modoc prirent les soldats sous leur feu de loin. Quand le soleil se coucha et bien que les officiers eussent rĂ©ussi Ă  remettre leurs hommes en mouvement, les soldats, qui avaient perdu trois morts et six blessĂ©s, n’avaient avancĂ© que d’un demi mile. Aucune perte n’était Ă  dĂ©plorer chez les Modoc. L’armĂ©e s’enterra et rĂ©sista pendant toute une nuit remplie de cris oĂą on s’échangeait des obscĂ©nitĂ©s et des coups de feu, et du grondement rĂ©gulier des obusiers ainsi que des mortiers de campagne. Ces dernières armes, grâce Ă  leur tir vertical, lâchèrent quelques obus directement dans la forteresse. Au matin, les soldats enjambèrent la corde magique, coupèrent les Indiens du lac et de leur rĂ©serve d’eau, et s’approchèrent Ă  cinquante yards du quartier-gĂ©nĂ©ral de Jack. La magie de Curly Headed Doctor fut encore plus sĂ©rieusement inefficace lorsque les Indiens souffrirent de leurs premières pertes depuis la Lost River. Plusieurs hommes et femmes avaient Ă©tĂ© blessĂ©s, et l’un des hommes s’était transformĂ© en fumĂ©e en essayant de retirer avec ses dents la fusĂ©e d’un obus qui n’avait pas explosĂ©. La situation tactique Ă©tant dĂ©sespĂ©rĂ©e, Captain Jack exfiltra ses guerriers et leurs parents vers le sud, Ă  travers les lignes de l’armĂ©e et sous le couvert de la nuit. Lorsque les soldats pĂ©nĂ©trèrent dans la forteresse abandonnĂ©e le matin suivant, ils ne trouvèrent personne d’autre qu’un vieil homme blessĂ©, lequel fut immĂ©diatement tuĂ© et scalpĂ©, et dont le trophĂ©e macabre fut divisĂ© en huit morceaux. Inquiet de l’évasion de sa proie, le Colonel GILLEM expĂ©dia des patrouilles dans tout le pays aux alentours. Mais les Modoc Ă©taient restĂ©s dans les Lava Beds, y trouvant du gibier et des grottes dans lesquelles ils puisaient de l’eau. En quelques jours, leur nouveau site fut dĂ©couvert par les Ă©claireurs de Warm Springs.

Le 26 Avril, GILLEM envoya le Capitaine d’artillerie Evan THOMAS avec un dĂ©tachement de 64 hommes, dont les Batteries A et K de la 4th. Artillery, et la Compagnie K de la 12th. Infantry, pour prendre position en hauteur d’oĂą ils devraient bombarder les Indiens. Bien que les officiers des patrouilles fussent tous des vĂ©tĂ©rans de la Guerre Civile, ils mĂ©prisèrent les procĂ©dures de base en matière de sĂ©curitĂ© et s’arrĂŞtèrent pour dĂ©jeuner au centre d’une embuscade montĂ©e par Scarface Charley. Lorsque Charley et ses 24 guerriers ouvrirent le feu, les soldats paniquèrent. La Compagnie E du Captain Thomas WRIGHT tenta de donner l’assaut contre les attaquants, mais le Capitaine fut tuĂ© et ses hommes mis en dĂ©route. Le Captain THOMAS rassembla vingt hommes dans un rĂ©duit, mais les Modoc gardèrent l’avantage et les tuèrent tous. Vers 03H00 de l’après-midi, Charley cria Â« Tout ce que ce qu’il vous reste Ă  faire, Ă  ceux d’entre vous qui ne sont pas encore morts, c’est de rentrer chez vous. Nous ne voulons pas vous tuer tous en un seul jour. Â» Puis il disparut avec ses Modoc. Bien qu’au courant de l’attaque subie par THOMAS, GILLEM Ă©tait convaincu que le corps expĂ©ditionnaire n’était pas en danger et n’envoya pas de relève avant la fin du jour. Après avoir tâtonnĂ© toute la nuit, les renforts atteignirent le champ de bataille le lendemain matin. L’armĂ©e avait perdu 23 morts, y compris THOMAs et tous ses officiers, et 19 blessĂ©s. La plupart des hommes avaient Ă©tĂ© touchĂ©s plus d’une fois, et l’un des soldats avait reçu vingt balles. Les Modoc avaient peut-ĂŞtre perdu un seul homme.

Le dĂ©sastre coĂ»ta sa place Ă  GILLEM. Le Colonel Jefferson C. DAVIS, un dur Ă  cuire vĂ©tĂ©ran de la Guerre Civile portant un nom bizarre, succĂ©da Ă  CANBY et prit lui-mĂŞme le commandement sur le terrain. Eh oui, bizarre et incongru, ce nom, mais ce n’est pas le Jefferson DAVIS qui fut PrĂ©sident des Etats ConfĂ©dĂ©rĂ©s pendant la Guerre de SĂ©cession, celui-lĂ  s’appelait Jefferson F. DAVIS et il ne reprit pas de service dans l’armĂ©e. A l’époque oĂą se passe cette histoire, l’ancien PrĂ©sident avait d’autres chats Ă  fouetter contre le Gouvernement des Etats Unis, et dirigeait une compagnie d’assurance.

Peu de temps après l’arrivĂ©e de DAVIS, les Modoc capturèrent un nouveau convoi d’approvisionnement de l’ArmĂ©e, blessant trois soldats de plus et continuant Ă  se faire mal voir. En rĂ©ponse, DAVIS envoya le Captain H.C. HASBROUCK avec la Batterie B du 4th. Artillery, montĂ©e et servant de cavalerie, les Compagnies B et G de la 1st. Cavalry et les Ă©claireurs de Warm Springs après les Modoc. HASBROUCK divisa ses forces, campant avec les compagnies de cavalerie sur les bords du Lac Sorass, oĂą les Modoc lancèrent une attaque surprise Ă  l’aube du 10 Mai. Bien que les Indiens fussent victorieux au dĂ©but, HASBROUCK rassembla ses hommes et, pendant que le Sergeant Thomas KELLY hurlait Â« Nom de Dieu ! il faut charger ! Â», contre attaqua et parvint Ă  les repousser. L’armĂ©e avait perdu trois morts et six blessĂ©s. Les Modoc, comme toujours, avaient donnĂ© plus qu’ils n’en avaient, ne perdant que Ellen’s Man. Par contre, ils perdirent leur intendance et la plupart de leurs munitions au profit des Ă©claireurs de Warm Springs, qui les attaquèrent au moment oĂą ils se retiraient. DĂ©moralisĂ© par cette dĂ©faite, Jack fut abandonnĂ© par Hooker Jim et les militants qui l’avaient poussĂ© Ă  tuer CANBY. A court de vivres et de munitions, leurs vĂŞtements en haillons et chassĂ©s par des soldats de plus en plus sĂ»rs d’eux-mĂŞmes, les Modoc commencèrent Ă  craquer. La bande de Hooker Jim se rendit le 22 Mai. Jim, Bogus Charley, Steamboat Frank et Shacknasty Jim se portèrent très vite volontaires pour traquer Jack pour le compte de l’armĂ©e. Ils le trouvèrent bientĂ´t. L’ironie de la reddition que lui demandaient ses anciens alliĂ©s, qui l’avaient eux-mĂŞmes poussĂ© donc ce combat inĂ©gal, ne fut pas perdue sur un Captain Jack en colère, lequel rejeta la proposition. Le temps travaillait pour le compte de l’armĂ©e, et les Modoc se rendirent par petits groupes, pendant toute la dernière semaine de Mai. La reddition ne signifiait pas forcĂ©ment la sĂ©curitĂ©, puisque quatre guerriers dĂ©sarmĂ©s furent tuĂ©s par les Vigilantes de l’Oregon. Jack, reconnaissant que Â« ses jambes le lâchaient Â», reconnut l’inĂ©vitable et capitula le 1er. Juin.

Le dĂ©sir qu’avait DAVIS d’exĂ©cuter sommairement les chefs Modoc fut frustrĂ© par des ordres de Washington de juger sommairement Captain Jack, John Schonchin, qui Ă©tait quelqu’un d’autre que le chef Old Schonchin, Slolux et Black Jim, pour l’assassinat de CANBY et de THOMAS. On accorda l’amnistie Ă  Hooker Jim et Ă  ses fauves pour les services qu’ils avaient rendu. Le procès, ou ce qu’il fut, eut lieu devant un tribunal militaire pendant que l’on montait un Ă©chafaud au dehors. Les Modoc accusĂ©s n’eurent pas d’avocat pour les dĂ©fendre et ils furent très vite reconnus coupables et condamnĂ©s Ă  ĂŞtre pendus. L’opinion publique nationale tourna très vite en faveur des braves et habiles soldats qui avaient combattu contre tous, pour le pays oĂą ils Ă©taient nĂ©s. En rĂ©ponse, le PrĂ©sident GRANT gracia Barncho et Slolux, des jeunes hommes qui n’avaient jouĂ© qu’un rĂ´le mineur dans les tueries. A 10H00 du matin le 3 Octobre 1873, après avoir, comme par humour noir, offert au prĂŞtre qui Ă©tait en charge vingt cinq chevaux et ses deux femmes s’il acceptait de prendre sa place, Jack et ses trois camarades furent exĂ©cutĂ©s. L’armĂ©e, en son honneur, refusa d’honorer les mandats d’arrĂŞt de l’Oregon pour un certain nombre de guerriers survivants. Le 12 Octobre 1873, 153 Modoc entraient sur le Territoire Indien, arrivant finalement Ă  la Quapaw Agency oĂą on leur donna pour une valeur de 524,40 $ en bois de construction de façon Ă  ce qu’ils pussent s’en faire des abris pour l’hiver. Au printemps, les rĂ©fugiĂ©s se dĂ©placèrent vers une rĂ©serve de 4000 acres. Tragiquement, l’adaptabilitĂ© des Modoc Ă  leur habitat ne s’étendit pas Ă  leur santĂ©. En 1879, il ne restait que 103 de ceux qui avaient Ă©tĂ© dĂ©portĂ©s d’origine. Leur santĂ© Ă©tait minĂ©e Ă  la fois par la maladie et par les vols de leur agent, qui surpayait ses proches en rations et distribuait la plus grande partie de la nourriture quelque part d’autre pour son propre profit. S’il fallait dresser une liste des meilleurs guerriers AmĂ©ricains de toutes les races, les Modoc y auraient la première place, ou n’en seraient pas loin. OubliĂ©s depuis longtemps par la plupart des gens, Captain Jack, Scarface Charley et leurs guerriers, combinèrent l’habiletĂ© des Seminole Ă  utiliser le terrain, l’adresse tactique des Nez-Perce, et l’art de la guĂ©rilla des Apache. Les Modoc furent probablement de meilleurs tireurs que tous les autres. Jamais, avant cela ni depuis, si peu d’hommes n’ont fait, contre tant d’autres, tellement de choses avec si peu. VoilĂ , et tout çà Ă  cause de ce petit con de Lieutenant BOUTELLE qui avait tirĂ© le premier, presque un an et demi plus tĂ´t.

………………………………………..

Retour en haut