2014

Les passionnés de tirs à l’ancienne se retrouvent chaque année à Ancenis.

Reportage aujourd’hui à Ancenis, au stand de l’Aubinière où se retrouvent régulièrement les amateurs de tirs, des passionnés d’armes et d’histoire réunis au sein des Arquebusiers du Pays d’Ancenis, l’un des 14 clubs de tir du département. L’association compte aujourd’hui 260 tireurs.
Les Arquebusiers organisaient au mois d’avril le Rassemblement de la Duchesse Anne, rassemblement de collectionneurs d’armes anciennes venus de toute la France.

[Source]

Inscriptions pour la saison 2014-2015

Le Tir Sportif
un Loisir pour Toutes et Tous

Journées d’informations et d’inscriptions au club de tir.

Le Samedi 30 Août de 10h30 à 17h00

Le Dimanche 31 Août de 09h30 à 11h30

 

LES ARMES DES PALADINS GRIS

Traduction d’un article de W. AUSTERMAN paru dans D.G.W. Blackpowder Annual 1993

La Guerre Civile fut le dernier conflit américain où l’on attendait des officiers supérieurs qu’ils mènent leurs hommes à la bataille en chargeant à leur tête. Il n’était pas rare de voir des commandants de brigade, de division ou même de corps dans les deux armées, agitant un sabre étincelant à l’avant de leurs unités. Les troupes Sudistes furent particulièrement remarquées pour leur élan et leur courage, voire leur témérité, au feu. Leurs meneurs reprenaient nécessairement le vieil idéal Anglo-Celtique du chef guerrier qui se battait en même temps que ses hommes et qui partageait leur destin. C’est pour cela que les tristes champs de bataille de Gettysburg et de Franklin résonnèrent d’échos de Hastings et de Flodden. Le résultat tragique de cette croyance au vieux code du chef qui fonce au combat devant ses hommes fut que, sur 425 officiers supérieurs enregistrés sur les listes des forces Confédérées, 235 d’entre eux, soit 55 %, furent tués ou blessés au champ d’honneur. Soixante dix sept d’entre eux moururent en combattant, et, sur ce total, vingt et un furent blessés au moins une fois avant de l’être mortellement. Sur les 158 généraux qui furent blessés et qui survécurent, trente et un furent touchés deux fois, dix huit trois fois, et une douzaine furent blessés quatre fois ou plus. Quatre d’entre eux furent blessés cinq fois, et trois portaient sept blessures. Le record fut probablement le cas du Brigadier General William R. COX qui, à la fin de la guerre, portait les cicatrices de onze blessures de guerre sur son corps de trente trois ans.

Les armes que portaient ces paladins Gris étaient importantes, autant comme symboles de rang et comme arbitres de différend avec l’ennemi. Bien que ce type de rencontre ne fût pas ce que l’on attendait de la part de ces officiers supérieurs, ils se sentaient obligés de montrer l’exemple en matière de courage et d’agressivité, en prouvant leur indifférence au danger sur le champ de bataille. Il en résultat un groupe de commandants dont le choix des armes personnelles fut aussi diversifié que leur habileté à s’en servir fut mortelle. Dans l’ensemble, les officiers Confédérés furent des hommes relativement jeunes, mais beaucoup avaient déjà vu le combat lors de la Guerre du Mexique ou sur la frontière. Beaucoup de ceux qui se plongèrent dans la Guerre de Sécession depuis la vie civile avaient été exposés au combat personnel sous la forme de duels ou de rencontres similaires. De jeunes généraux tels John Hunt MORGAN avaient déjà vu des hommes piqués au bout d’une pointe de lance à Buena Vista, et Nathan Bedford FORREST s’était une fois battu tout seul contre une foule qui voulait le lyncher, dans la ville sauvage de Memphis. Chasseur et planteur de Caroline du Sud, Wade HAMPTON avait tué pas moins de quatre vingt ours avec seulement son couteau. Un jour qu’il était en patrouille sur le Territoire de New Mexico dans les années 1850, l’ancien Lieutenant du U.S. Regiment of Mounted Riflemen William H. JACKSON abattit un grizzly d’un seul coup de sabre. Le général Albert Sidney JOHNSTON se rappelait un duel dans lequel il s’était battu contre un autre officier alors qu’il commandait la toute petite armée régulière de la République du Texas dans les années 1830. Le Brigadier General Pierre G.T. BEAUREGARD, commandant le bombardement de Fort Sumter, et le General Joseph E. JOHNSTON, autre prénom, il y en a donc deux, acquirent leur gloire de commandeurs des forces Sudistes à la bataille de Manassas en Juillet 1861, première grande action terrestre de la guerre. Par la suite, BEAUREGARD occupa plusieurs commandements régionaux sur les théâtres de l’Est et de l’Ouest, alors que JOHNSTON resta à la tête de l’Armée de Virginie jusqu’à ce qu’il fût blessé au combat à Seven Pines au printemps de 1862. Plus tard, on lui confia le commandement de l’Armée du Tennessee de 1861à 1864, et à nouveau en 1865. JOHNSTON fut remplacé à la tête de l’Armée de Northen Virginia par Robert E. LEE. LEE et JOHNSTON avaient servi respectivement comme Lieutenant Colonel et Colonel à la tête du 2nd. U.S. Cavalry, créé en 1855. Les deux hommes avaient beaucoup servi sur la frontière au Texas contre les Comanche, les Kiowa, et les Apache. Des durs, des durs, rien que des durs…

Tous les deux avaient choisi des revolvers Colt comme armes personnelles. JOHNSTON reçut son revolver de Samuel COLT, qui lui en fit cadeau juste avant la guerre. COLT offrit au cavalier un Model 1860 Army en calibre .44, au numéro de série 2252, une arme sur laquelle on pouvait monter une crosse pour la transformer en carabine. Elle est exposée dans la collection du Musée de la Confédération à Richmond, Virginia.

LEE, quant à lui, était propriétaire de deux Colt de différents modèles. Il acheta, ou on lui offrit, un Model 1851 Navy en calibre .36, fabriqué en 1855. Cette arme, portant le numéro de série 37698, est finement gravée sur le canon et la carcasse, et fut portée pendant toute la guerre dans une fonte. Bien que LEE fût connu pour son agressivité et son empressement à mener ses hommes en personne en cas de coup dur, personne n’a jamais dit ou écrit qu’il avait sorti ce Colt pour s’en servir au combat.

LEE possédait également un revolver de poche Colt Root Model 1855. Il n’y a aucun doute que ce petit pistolet servait d’assurance en cas de capture, pour l’homme qui fut probablement le chef le plus important chez les Confédérés.

BEAUREGARD, un Créole de Louisiane, préférait le revolver Le Mat Français. On le comprend, puisqu’il était partenaire avec le Dr. Jean Alexandre François Le MAT et le Dr. Charles F. GIRARD dans l’entreprise Parisienne qui fabriqua l’arme.

Ces revolvers à neuf coups, dont les Confédérés en achetèrent environ 1500 exemplaires, étaient principalement fabriqués en calibre .42, et possédaient un deuxième canon en calibre .63 que l’on pouvait charger avec de la chevrotine, séparé sous le canon principal. Ce deuxième canon transformait l’arme en fusil de chasse miniature pour le travail à courte distance. Le pistolet Le Mat de BEAUREGARD fut acquis pendant la guerre.

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Le Major General James Ewell Brown STUART, dit « Jeb » STUART, était un autre amateur de Le Mat et fut l’un des personnages les plus romantiques parmi les Sudistes. On raconte que STUART tenait en main son revolver Le Mat, qui porte le numéro de série 115, lorsqu’il fut blessé mortellement par un cavalier du Michigan à Yellow Tavern le 12 Mai 1864. Le Major General James Patton ANDERSON de l’Armée du Tennessee, portait un Le Mat. Chirurgien pratiquant au début de la guerre, il entra au service comme Lieutenant Colonel et gagna sa première étoile en Février 1862. ANDERSON, qui était déjà un chef de Brigade et de Division agressif en 1864, fut sévèrement blessé lors de la campagne d’Atlanta, mais il était présent au moment de la reddition de l’armée en Caroline du Nord. Le revolver Le Mat d’ANDERSON, au numéro de série 475, survécut à la guerre et il peut être vu au Musée de la Confédération.

Le General Thomas Jonathan « Stonewall » JACKSON posséda au moins trois armes sur lesquelles on peut commenter. A l’époque où il était professeur au Virginia Military Institute, ou plus tard sur le terrain, il fit l’acquisition d’une paire de revolvers Anglais Adams en coffret. Ces jolies pièces d’armurerie à double action étaient populaires dans le Sud depuis le milieu des années 1850, et immédiatement disponibles dans certaines villes Sudistes chez les agents importateurs des sociétés Anglaises.

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La bataille entre les inconditionnels des revolvers Adams et ceux des Colt est bien connue. Il y eut plusieurs versions du revolver Adams à double action. Les unes sont chambrées au calibre de .36, les autres en .44, la version commercialisée par Deane, Adams & Deane ne possédant pas de crête de chien. La Massachussetts Arms de Chicopee Falls, Ma., fabriqua environ 1 000 de ces revolvers sous licence pour Adams en calibre .36 à 5 coups.

En 1862, les officiers de JACKSON lui offrirent également un revolver Le Faucheux fabriqué en France. Cette arme à percussion à broche de calibre 12 millimètres, finement gravée, respirait l’ostentation Gauloise et fut loin d’être celle que JACKSON, ce Calviniste taciturne, aurait choisie lui-même. Il y a fort peu à parier que le Adams et le pistolet français aient été portés dans ses fontes, mais il doit avoir préféré le revolver Le Faucheux comme preuve de l’estime de ses subordonnés. Sans aucun doute moins populaire comme arme de combat que le Adams ou le Colt, le revolver Le Faucheux de JACKSON survécut à la guerre et entra dans la collection du Musée de la Confédération. Le Brigadier General Turner ASHBY, l’un des officiers subalternes de JACKSON, possédait trois revolvers. En tant que commandant de la cavalerie de JACKSON, ASHBY servait son chef aveuglément et jusqu’au bout des ongles. Courageux jusqu’à l’extrême et combattant téméraire, ASHBY considérait la guerre comme une espèce de chasse au renard, où les Yankees jouaient le rôle du renard. Son Colt Dragoon en calibre .44 était épaulé par une paire de Colt Navy Model 1851 en calibre .36. Il est probable qu’il avait en main l’un des Colt lorsqu’il fut abattu le 6 Juin 1862, près de Harrisburg, Virginia.

Wade HAMPTON se trouvait à la tête d’une division du corps de STUART avant que celui-ci ne fût tué, et il devint chef de la cavalerie de LEE. On sait que le Président DAVIS offrit à HAMPTON un pistolet de selle à percussion à deux canons superposés, fait par STAUDENMAYER en Angleterre. Ce pistolet fut l’un de ceux qui avaient été portés par DAVIS au cours de la guerre du Mexique. Sur le terrain, HAMPTON portait un revolver d’une marque inconnue, et il l’utilisa beaucoup. Après la guerre, l’un de ses amis lui demanda combien de Yankees il avait personnellement tué lors des batailles. HAMPTON réfléchit un moment, puis répondit que le total s’élevait à onze. « Et les deux de Trevilian ? » répliqua l’homme. « Ceux-là, je ne les compte pas » dit HAMPTON « Ils étaient en train de courir. » Il n’avait pas compté non plus les Tuniques Bleues qu’il avait seulement blessés. Au cours de la campagne de Gettysburg, HAMPTON abattit à 125 yards et avec son revolver un Yankee armé d’une carabine. Les deux hommes échangèrent plusieurs coups de feu jusqu’à ce que la carabine du soldat s’enrayât. Chevaleresque, HAMPTON cessa le feu jusqu’à ce que l’autre arme pût à nouveau tirer, et termina l’affaire en envoyant une balle dans le poignet du Bandeau Jaune. Merde ! A 125 yards, ça fait quelque chose comme 115 mètres. Avec un revolver de type Colt où le guidon conique est censé s’aligner dans une échancrure en « V » découpée dans le chien, c’est-à-dire avec des organes de visée rudimentaires, le type en face devait être bien visible. En tous cas, c’était un manche s’il n’a pas pu descendre le gégène avant avec sa carabine, et s’il a pris un pélot dans le poignet, c’est bien fait pour lui.

John Hunt MORGAN s’en vint en guerre comme capitaine de milice en 1861 et, en deux ans, se retrouva à la tête d’une brigade. MORGAN était propriétaire d’une paire de Colt Army Model 1860 en calibre .44, gravés et aux plaquettes de crosses en ivoire, ainsi qu’un Colt Navy Model 1851 en calibre .36. Au début de la guerre, il portait, et se servait, d’un fusil de chasse. Un jour, MORGAN et quatre hommes de troupe mirent toute une compagnie de cavalerie de l’Union en déroute, par une attaque en embuscade qui fut pertinemment exécutée. Bien que ses hommes fussent armés plus tard presque exclusivement de fusils Enfield courts, MORGAN ne perdit jamais foi dans l’efficacité d’une charge de cavalerie menée avec des revolvers qui crachant autant de plomb et de feu qu’ils pouvaient le faire.

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Le Brigadier General Henry H. SIBLEY, un vétéran du service sur la frontière avec le vieux 2nd. Dragoons, mena une brigade de régiments montés Texans dans une invasion qui tourna mal, vers le Territoire du Nouveau Mexique au début de 1862.

SIBLEY possédait un Whitney en calibre .36, superbement préparé en coffret, mais il est peu probable qu’il eût pu toucher quoi que ce soit avec puisqu’il fut rarement à jeun pendant toute cette campagne désastreuse à travers le désert. A la fin de l’expédition, les chefs écœurés de son régiment espéraient qu’il retournerait le Whitney contre lui avant d’accepter un poste de général dans la Confédération.

Les Texans adorateurs de Colt avaient un bien meilleur chef en la personne du Brigadier General Ben Mc. CULLOCH. Un vétéran de la Guerre du Texas pour l’indépendance en 1836 et ancien Ranger sur la frontière, Mc. CULLOCH se vit offrir le 1er. Janvier 1848, par Samuel COLT en personne, l’un des premiers modèles de production du revolver Dragoon de 1848. Le pistolet, au numéro de série 1337, lui servit pendant plus de dix ans avant qu’il fût engagé dans les forces Confédérées. Parmi les unités sous son commandement, on trouvait la Compagnie A du 3rd. Texas Cavalry, armée exclusivement de revolvers et de carabines à répétition Colt. Mc. CULLOCH arborait un uniforme de velours noir et portait son Colt à la ceinture. Il fut tué par un tireur d’élite de l’Union, alors qu’il menait la charge à Pea Ridge, Arkansas, le 7 Mars 1862.

Le Major General David E. TWIGGS, auparavant colonel du 2nd. Dragoons pendant le Guerre du Mexique, reçut de Samuel COLT l’un des premiers revolvers Model Paterson, à un moment de sa carrière dans l’ancienne armée. L’âge et la maladie l’empêchèrent d’occuper une place active sur le terrain, et il mourut pendant l’été de 1862, laissant son rare Paterson à la postérité. Le choix du General Joseph WHEELER fut curieux. Il préféra un revolver Savage-North en calibre .36. Avec sa carcasse bizarre, piquant du nez, et son drôle de chien sur le haut, le Savage-North était à la fois gauche d’aspect et peu commode à manier. Il a du faire l’objet de quolibets chez les soldats aguerris de WHEELER, qui préféraient des Colt et des Remington capturés sur l’adversaire. Mais ce Savage-North servit très bien au général, puisqu’il survécut à de nombreuses rencontres avec l’ennemi. Au Tennessee entre Novembre et Décembre 1862, WHEELER fut personnellement engagé dans pas moins de vingt escarmouches avec les troupes de l’Union. Ces actions forcèrent d’ailleurs le General Braxton BRAGG à le réprimander officiellement pour s’être « exposé inutilement ».

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« Saignant horriblement du nez », le revolver Savage-North, breveté en 1856 et tirant 6 coups de calibre .36, fut amélioré en 1860. Le levier entourant la queue de détente servait à armer le chien avec le médius si le tireur ne voulait pas se servir du pouce. Il permettait surtout le tir rapide, pratiquement en double action, mais on imagine facilement ce que cela pouvait donner en matière de précision. Le Third Model de la première version, à gauche, fut fabriqué à 400 exemplaires, et la dernière version, à droite, le fut à 11 984 exemplaires.

Nathan Bedford FORREST, le Texan du 8th. Texas Cavalry, était encore plus agressif que WHEELER. A l’été 1861, il se mit à rassembler un bataillon de cavalerie pour l’enrôler dans la Confédération. Se glissant en Kentucky neutre, il acheta 500 revolvers pour ses hommes. Les types de pistolets qu’il se procura demeurent inconnus, mais on dit que FORREST porta une paire de Colt Navy Model 1851, du début de la guerre jusqu’à la fin. FORREST se trouvait constamment sur la ligne de feu et vingt neuf chevaux furent tués sous lui. Avec l’habitude qu’avait FORREST de rester dans le feu de l’action, les canons de ses revolvers étaient toujours chauds. Plusieurs incidents illustrent son goût du combat personnel. A la fin de Décembre 1861, FORREST menait une attaque contre la garnison Nordiste de Sacramento, Kentucky, lorsqu’il se retrouva en face de trois Tuniques Bleues agitant leur sabre. Une balle de pistolet déchira le collier de la veste de FORREST, marquant son cou. Il renversa l’un des soldats de sa selle en lui expédiant une balle, et se retourna pour affronter les deux autres attaquants. « Il abattit le premier avec un coup de feu, et sabra les deux autres » écrivit plus tard son biographe, Robert Selph HENRY. FORREST s’extirpa d’une autre situation difficile à coups de pistolets, au mois d’Avril suivant à Shiloh, y récoltant une blessure qui aurait tué beaucoup d’autres hommes. Ce ne fut pas avant des semaines plus tard, pendant lesquelles il était resté sur le terrain à se battre, qu’il consentit à ce que la balle de mousquet fût extraite de sa blessure, et même alors, on l’opéra sans anesthésiant. Juste un grand coup de gnôle dans le gosier, suivi d’un petit coup de maillet sur le crâne, immédiatement et adroitement administré. Un mal en chasse un autre, et si le gégène a mal à la tête après l’opération, on lui dira qu’on n’avait pas les moyens d’acheter de la bonne gnôle, parce que le fric, on l’a dépensé pour acheter des Kalach’s. Le Brigadier General James DEARING quitta l’Ecole des Cadets quand la Virginie se sépara de l’Union, et il passa les trois premières années de la guerre comme commandant d’artillerie et de cavalerie, avant de gagner son étoile en Avril 1864. Lors des la retraite vers Appomattox, ses hommes se heurtèrent aux troupes de l’Union menées par le General Theodore READ à High Bridge, Virginia, le 6 Avril 1865. DEARING et le général Yankee se mirent à part et se battirent dans un duel au pistolet, qui laissa READ mort et DEARING mourant. Le Colt Navy Model 1851 de DEARING reste en possession de sa famille, relique précieuse du dernier général Confédéré à mourir au combat. Une autre arme de poing ayant appartenu à un général Sudiste est inscrite en triste post-scriptum à la guerre. Le Brigadier General William M. BROWNE de Georgie, offrit son revolver Colt Root Pocket Model 1855, au numéro de série 22987, à la femme du Président, Mme. Varina Howell DAVIS, juste avant que le gouvernement ne partît de Richmond en Avril 1865. La Première Dame de la Confédération quitta Richmond avec un petit enfant dans les bras et un revolver Colt glissé dans son sac à main.

On trouva toute une variété d’armes d’épaules dans les tentes et les chariots à bagages des quartiers généraux. Des armes à chargement par la culasse de différents types semblent avoir été populaires parmi eux. Jeb STUART possédait un fusil revolver Colt ainsi qu’une carabine Anglaise à chargement par la culasse Calisher & Terry, qu’il essayait sur le terrain pour la cavalerie Confédérée. Cette carabine en calibre .56 présentait un gros mécanisme de culasse qui ressemblait un peu à ceux que l’on trouve sur les pièces d’artillerie modernes. Le Major General John B. FLOYD de Virginie reçut en cadeau de Samuel COLT un fusil revolver Colt alors qu’il était Secrétaire à la Guerre sous le Président James BUCHANAN. Le Major General John G. WALKER fut un autre de ces officier supérieurs qui possédaient un fusil Colt. Il acheta le sien quand il servit au Regiment of Mounted Riflemen dans les années 1850.

Nathan Bedford FORREST, alors Lieutenant Colonel, encore lui, était présent à la bataille de Fort Donelson. C’est là qu’avec un coup tiré de loin avec une carabine Maynard, il abattit un tireur d’élite Nordiste perché dans un arbre.

Et voilà que les officiers Sudistes se mettent à dégommer les snipers adverses avec des pétoires, maintenant.

Ben Mc. CULLOCH affectionnait lui aussi la Maynard à chargement par la culasse, et en portait une en bandoulière lorsqu’il mourut à Pea Ridge. Le Major General Dabney H. MAURY, qui servit avec WALKER sur la frontière du Texas, accrochait sa préférence à un fusil à chargement par la bouche, plus conventionnel. En poste à Carlisle Barracks, Pennsylvannia, avant la guerre, il se procura un canon de U.S. Model 1841 Mississipi Rifle de surplus, et le fit monter sur un fût et une platine de sport par un armurier local pour en faire un fusil superbement précis. MAURY se vantait d’avoir tiré du gibier à plus de 200 yards avec cette arme de service qui avait été modifiée. Ben tiens… Une zone vitale sur un gibier moyen, c’est pas grand. Et quand on connaît les faibles qualités balistiques de la grosse boule tirée par le Mississipi Rifle, il faut taper dans la zone vitale, sinon le gibier continue à se promener en boitant et il va se perdre ailleurs, pour y crever sans qu’on l’ait retrouvé. Donc à 200 yards avec un canon lisse, faut déjà être bon tireur. Le Major General Samuel G. FRENCH gardait comme trophée l’un des seize fusils à répétition Henry que ses troupes avaient capturé lors d’un combat en 1864 contre les forces de SHERMAN en Georgie. Après Appomatox, FRENCH rendit loyalement le joli fusil au boîtier de culasse en laiton, aux autorités de l’Union.

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 Fabriqué à environ 14 000 exemplaires par New Haven Arms Co., à New Haven, Connecticut, en calibre .44 Henry Flat à percussion annulaire. Le gouvernement Nordiste en acheta 1 731 entre 1862 et 1865, et en dota le 1st. Maine et le 1st. District of Columbia Cavalry Regiment.

D’autres généraux Américains ont porté des armes personnelles spéciales depuis l’époque de FORREST et de WHEELER. Sans aucun doute, les guerres à venir verront des généraux Américains dégainer leurs armes en menant leurs troupes à l’assaut contre l’ennemi, mais leurs exploits ne resteront que des ombres pâles, comparées à ceux qui furent accomplis par les galants chefs menant les légions Grises de la Cause Perdue. Au vingtième siècle, on sait qu’un autre Américain, amateur d’armes né en 1885 en Californie et qui n’avait donc plus rien à voir avec les paladins Gris, mais plus connu comme Général de chars, George S. PATTON, préférait des crosses en ivoire sur la paire de Single Action Army en .45 qu’il portait de préférence au Colt 1911 réglementaire dont il avait gardé un mauvais souvenir, quand un coup était parti tout seul de son pistolet tombé au sol alors qu’il était Capitaine pendant la Première Guerre Mondiale. L’individu était d’ailleurs armé jusqu’au dents car, non content d’être escorté et protégé comme un General peut l’être, il avait également, en plus de la paire de Colt S.A.A., une paire de Smith & Wesson en .357 à canons de 3,5 pouces. Chez les étrangers, deux autres individus, loin d’être des paladins Gris ceux-là, furent ce gros porc d’Hermann GÖRING qui frimait avec un revolver Smith & Wesson en .38 Special à la ceinture, comme si un bon vieux Lüger P08 allemand n’eût pas été mieux, mais c’était déjà trop bien pour lui, et le Russe Leonid BREJNEV qui aimait emporter son Colt Peacemaker Single Action Army en .45 avec lui lorsqu’il partait chasser.

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LES ARMES DES COMANCHEROS

Traduction d’un article de W. AUSTERMAN paru dans D.G.W. Blackpowder Annual 1990

Comanchero ! Pour ceux qui vivaient le long des rives sauvages de la frontière du sud-ouest au milieu et à la fin des années 1800, ce mot-là évoquait autant une épithète remplie de haine qu’un nom définissant une certaine classe d’hommes. Pendant presque un siècle, les caravanes de chars à bœufs et de mules passèrent vers l’est depuis le Nouveau Mexique à travers les Staked Plains, les Plaines Jalonnées, pour atteindre les lieux de rendez-vous avec certaines des tribus d’Indiens les plus féroces du contient. C’est là, dans l’ombre de la faille lugubre d’un canyon ou le long d’un défilé sans nom taillé par l’érosion de la pluie, qu’ils échangeaient leurs marchandises contre des peaux de bison, du bétail, des chevaux, des mules ou des prisonniers Blancs. Courtiers en avidité et en misère humaine, les Comancheros exerçaient leur trafic sordide dans cette contrée sauvage avec la certitude arrogante d’hommes qui savaient que la force de la loi ne s’étendait pas plus loin que là où la poudre, les capsules et les balles rondes ne pourraient la porter. A l’époque où le métier de Comanchero atteignit son apogée dans les années qui suivirent la Guerre Civile, leurs rangs comptaient de tout, des Anglos renégats et des New Mexicains sans scrupules, aux Indiens Pueblo prêts à faire des affaires avec leurs anciens ennemis si le prix y était. Quelques Comancheros se contentaient de rencontrer les protagonistes sur leur propre terrain pour les ventes. D’autres chevauchaient avec les bandes de guerriers qui s’élançaient vers le Sud depuis les hautes plaines vers le Texas, ou bien par le Nord vers le Kansas et le Colorado, en prêtant leur intelligence de prédateurs à la férocité de leurs clients au fur et à mesure que ceux-ci choisissaient les cibles pour leurs raids. Tous les Comancheros vivaient littéralement grâce aux armes, et celles qu’ils utilisaient ou échangeaient constituaient les variations de leur commerce morbide. Il existe des traces aussi anciennes que 1780, où l’on retrouve des bandes d’aventuriers du Nouveau Mexique qui défiaient les prohibitions gouvernementales à rechercher les tribus des plaines à l’Est, pour leur commerce. Ces trafiquants acquirent une connaissance intime de la région ainsi que des meilleurs chemins à prendre pour traverser sa surface aride.

Vers l’été de 1810, des groupes de cinquante trafiquants, voire plus, rencontraient des Ute, des Kiowas et des Comanches avec la bénédiction du gouvernement provincial Mexicain de Santa Fe. Les autorités se rendaient compte que ce commerce pouvait servir de tampon très efficace aux incursions américaines en territoire Espagnol. Lorsque éclata la Guerre du Mexique en 1846, les chariots des Comancheros avaient tracé des sillons profonds dans la terre qui longeait la rivière Canadian, s’écartant et se perdant comme les brins d’une vieille corde cassée à l’intérieur d’un désert que CORONADO, trois siècles plus tôt, avait appelé « El Llano Estacado », les « Staked Plains », les plaines marquées de jalons. Un trafic important se faisait entre les Américains et Santa Fe depuis le début des années 1820, et les armes à feu étaient parmi les marchandises les plus convoitées. Le marchand du Missouri Albert SPEYER passa tout un lot de Fusils Mississippi Modèle 1841 en contrebande à Santa Fe, à la veille même de l’invasion américaine du Nouveau Mexique. D’autres armes suivirent avec les caravanes qui arrivaient dans le sillage de l’annexion américaine du territoire. On ne peut pas vraiment faire de documentation bien précise sur tous les types d’armes échangées avec les Indiens pendant la période précédant immédiatement la Guerre Civile, mais certaines marques d’armes étaient stockées tout à fait normalement à la fois par des marchands à jour de leur licence, et par des trafiquants illicites. Des fusils à silex ou à percussion fabriqués par des firmes comme Leman, Henry, Tryon et Deringer étaient largement distribuées dans les plaines aux alentours de 1850. Ces armes solides et précises constituèrent des produits de première nécessité pour les trente années çà venir. Ironiquement, après la Guerre Civile, le gouvernement des Etats Unis aida indirectement les Comancheros à prospérer. La vente de milliers d’armes en surplus à des prix cassés augmenta les inventaires des trafiquants à peu de frais pour eux. Ainsi, en Novembre 1867, l’arsenal de Fort Leavensworth mit 19 551 fusils à la vente publique en un jour, sans demander à tous ceux qui en voulaient d’où venait leur argent comptant. Un autre exemple typique fut la vente qui se tint à l’arsenal U.S. de San Antonio, Texas, en Janvier 1868, quand on mit sur le marbre 311 carabines Burnside à chargement par la culasse, 800 fusils rayés Enfield, 250 mousquets à canon lisse, 400 revolvers Colts et 81 revolvers Remington.

Les nouvelles armes arrivèrent vite aux mains des hostiles. En été 1866, le Lieutenant Colonel E.H. BERGMAN, officier commandant à Fort Bascom, New Mexico, commit l’imprudence d’emmener un détachement au cœur du territoire Comanchero dans un effort pour récupérer du bétail volé chez des fermiers. Utilisant deux Comancheros capturés comme guides, le Colonel atteignit un village Comanche situé presque à 250 miles au Sud-Est du poste. Il y avait 160 habitations dans le village, abritant au moins deux fois autant de guerriers. L’officier nota que chaque brave arborait un revolver à sa ceinture et « une grande partie d’entre eux était armés de deux pistolets. » Au moins la moitié des guerriers présents étaient soit des prisonniers Mexicains qui avaient grandi depuis l’enfance parmi les Comanches, ou des Comancheros Mexicains qui vivaient volontairement parmi les hommes de la tribu. Il s’en sortit sans combattre, mais il avait perdu. L’affluence des armes entraîna une recrudescence des raids, pas seulement vers le Texas et le Nouveau Mexique, mais aussi sur la Piste de Santa Fe. En Janvier 1867, un officier du 3ème. Infantry en poste à Fort Dodge, Kansas, remarquait : « Entre les ventes légales par les agents et les trafiquants, les Indiens n’ont jamais été aussi bien armés qu’aujourd’hui. Plusieurs centaines d’Indiens ont visité le poste, et tous avaient des revolvers en leur possession. Une grande majorité avait deux revolvers, et beaucoup d’entre eux en avait trois. Les Indiens ne cachent pas qu’ils ont plein d’armes et de munitions en cas de problèmes au printemps… Pour un revolver, un Indien donnera dix, voire vingt fois, le prix qu’il vaut, en chevaux et en fourrures. » Ce mois d’Août-là, apparurent encore plus d’armes de surplus lorsque les hostiles attaquèrent une caravane de chariots 160 miles à l’ouest de Fort Harker, Kansas. On rapporta que les braves étaient armés « de fusils Spencer, de Sharps, et de mousquets Enfield, et qu’ils avaient des munitions à foison. »Pour des raisons évidentes, les Comancheros ne gardèrent pas de suivi comptable de leurs ventes, mais quelques traces matérielles ont survécu pour nous indiquer quelles sortes d’armes à feu figuraient dans leur commerce avec les Indiens.

En 1976, le Llano Estacado Museum de Plainview, Texas, publia le rapport d’une fouille archéologique sur un site de trafic Comanchero. Situé au Nord-Est du conté de Floyd, Texas, le site était constitué de ruines de trois tranchées-abris surplombant Quitaque Creek, et un quatrième abri trouvé un quart de mile en amont. Les fouilles révélèrent que les tranchées avaient été creusées à l’origine sur une profondeur de quatre pieds dans le sol de la colline, et qu’elles avaient été surplombées de murs et de toits en troncs de cotonniers avec des branches recouvertes de peaux de bison. Mesurant 18 pieds sur 13 pieds, avec au milieu le foyer et le passage pour l’entrée, les structures contenaient une abondance d’artefacts, dont la plupart dataient de la période entre 1870 et 1880. L’une des tranchées contenait les restes de pas moins de quatre armes. La seule arme de poing parmi elles était un revolver à percussion Remington Modèle 1861 en calibre .44. Arme de poing militaire et civile couramment rencontrée sur la frontière, le Remington avait l’avantage de présenter une carcasse fermée qui le rendait plus solide que son rival le Colt. La possibilité de le faire fonctionner avec de la poudre en vrac, des capsules et des balles comme munitions constituait également un avantage, car les cartouches métalliques dont avaient besoin les revolvers plus modernes étaient souvent difficiles à trouver et toujours chères. Il a été facile d’identifier deux des trois armes longues restantes trouvées dans la tranchée. L’une était un fusil Modèle 1841 « Mississipi Rifle ». A chargement par la bouche, fonctionnant à percussion et en calibre .54, c’était l’arme réglementaire standard dans les régiments U.S. de fusiliers à cheval, de 1840 à 1861, et elle vit du service chez les Texas Rangers en plus d’avoir été une arme populaire chez les immigrants en route vers la Californie. Les garnitures en laiton et la platine jaspée du Modèle 1841, une arme déjà familière dans les Plaines du Sud au milieu des années 1850, en faisaient une pièce agréable pour l’œil d’un Indien. La grosse balle que l’on utilisait en 1841 était capable de mettre à terre tous les gibiers que l’on pouvait rencontrer dans la région. On trouva aussi une carabine Starr en .54, sans la crosse ni le fût, mais mécaniquement intacte lorsqu’on la sortit de la tranchée. Cette arme à chargement par la culasse, brevetée par Ebenezer STARR en 1858, ressemblait extérieurement à la Sharps, plus populaire. Son bloc de culasse articulé sur charnière permettait un chargement facile avec les cartouches en lin ou en papier que chambraient les 20 000 premières Starr du contrat passé avec le gouvernement. Ce premier contrat fut rempli entre Juillet 1863 et Décembre 1864.

Un supplément de 5000 Starr fut vendu au gouvernement U.S. de Mars à Mai 1865, chambrées pour la cartouche métallique Spencer de .56-52. La Starr que l’on trouva dans le site de Quitaque chambrait la cartouche du Spencer. Les Kiowas et les Comanches se familiarisèrent probablement avec la Starr suite à sa mise en service avec les 2ème. et 3ème. régiments de Colorado Volunteer Cavalry en 1864. Ces unités patrouillaient dans les plaines orientales du territoire. Les Starr de surplus ne tardèrent pas à trouver leur chemin dans des chariots Comancheros pour le trafic avec les Indiens. La dernière relique d’arme trouvée par les archéologues fut le canon d’un fusil des plaines à demi-fût, fonctionnant à percussion et du type Hawken ou Leman. Ce canon au calibre de .45 mesurait trente huit pouces de la bouche à la culasse, et un pouce et un huitième en largeur. Il n’avait en dessous qu’un seul support en laiton pour la baguette de chargement. Plus long à charger que la Starr, le fusil des plaines pouvait tout de même rapporter de la viande ou faire dresser les cheveux si nécessaire.

On trouva de nombreuses douilles de cartouches pendant les fouilles, et elles constituèrent les témoins de ce que les Comancheros utilisaient ou échangeaient comme autres armes. Parmi ces cartouches, on compta cinq douilles de .45-100 Remington à percussion centrale. « Il s’agit là d’une version plus courte de la Remington à douille bouteille de deux pouces et cinq huitièmes » nota l’archéologue, « et elle figurait au catalogue Sharps de 1873, tout comme la douille de .45 de deux pouces et quart. » De telles munitions furent probablement fournies pour des fusils Sharps pris sur d’imprudents chasseurs de bisons. On trouva également deux douilles de .50-70 Governement à percussion centrale. D’abord adoptée comme munition officielle pour les fusils et les carabines à chargement par la culasse Springfield utilisés par l’U.S. Army de 1866 jusqu’à 1873, la .50-70 s’utilisait aussi dans les fusils et des carabines Sharps convertis depuis le système à percussion, tout comme dans le fusil Remington Rolling-Block. La munition de .50-70 resta populaire sur la frontière, bien après le choix par les militaires de la cartouche .45-70 Government en 1873, qui lui était supérieure au point de vue balistique. Les douilles que l’on trouva dans les fouilles de Quitaque étaient toutes les deux du premier type, avec l’amorçage Benet, et faites en cuivre au lieu de laiton. On trouva cinq douilles de .56-50 pour les fusils à répétition Spencer dans les débris du camp. Les douilles en cuivre et à percussion annulaire étaient marquées « F.V.V. & CO. » Moins puissante que la .50-70, la Spencer était quand-même encore populaire chez les Indiens, les soldats et hommes de la frontière. De manière surprenante, une seule douille de .45-70 fut retrouvée. Trois autres douilles, plus grosses et que l’on ne put identifier, sortirent aussi du trou. Les douilles de cartouches pour armes de poing furent plus nombreuses. On trouva dix douilles pour revolver Colt en .45, mais les marquages du fabricant n’étaient sur aucune. On trouva aussi sept douilles de Smith & Wesson Modèle Russian en calibre .44. L’une d’entre elles était marquée « S&WR ». Conçus par la compagnie pour le contrat militaire russe, l’arme et la cartouche étaient toutes les deux disponibles sur le marché civil américain en 1878. Dans tous ses modèles à grande carcasse, le Smith & Wesson trouva des amateurs sur la frontière, grâce à son système à brisure et à éjection multiple. Ces caractéristiques en faisaient une arme plus facile à recharger que le Colt Modèle 1873 à carcasse monobloc. Quatre douilles de pistolet, fortement fragmentées et que personne ne put identifier, vinrent s’ajouter aux fouilles, en même temps qu’une paire de balles en plomb de calibre .54. Dans les deux cas, il s’agissait de projectiles en plomb pur, à base creuse et à deux gorges de graissage, les marques de six rayures étant encore visibles sur l’un d’eux, aplati à l’impact lorsqu’il avait été tiré. On trouva également deux balles de plomb rondes en calibre .50, déjà tirées et aplaties. Les quatre balles tirées furent retrouvées dans la même structure, l’une d’entre elles ayant fini sa trajectoire dans la salle principale, les autres dans le passage servant d’entrée. Cela peut signifier, soit que les anciens résidents étaient très imprudents en manipulant leurs armes, soit qu’une bataille rangée a éclaté entre des gens à l’intérieur de la cabane. Trois amorces à percussion et dix grandes amorces pour armes d’épaule vinrent compléter la liste des objets touchant de près ou de loin les armes à feu, signifiant que les armes à percussion continuaient à être populaires dans le commerce. Les reliques mises à jour dans le site de Quitaque Creek ne représentent seulement qu’une minuscule fraction des armes et des munitions échangées ou utilisées par des Comancheros ne fréquentant qu’un seul des nombreux sites analogues au Texas et au Mexique de l’Est.

L’un des étudiants intéressé par le trafic que pratiquaient les Comancheros, a localisé et expertisé pas moins de treize de ces points de rendez-vous dans un rayon de mille miles autour de Tucumcari et de Fort Bascom, New Mexico. De nombreuses reliques ayant trait aux armes à feu furent aussi retrouvées dans ces sites-là. Parmi elles, la collection classique de douilles de cartouches, de capsules, et de projectiles, en même temps que les restes d’un fusil de chasse double à canon scié, trouvé dans un site à seulement quarante miles du fort. Les armes illicitement fournies aux Indiens et provenant des râteliers des postes de l’armée n’étaient pas rares. Les Comancheros payaient de bonnes sommes pour des armes d’ordonnance, et il existait des soldats qui avaient toujours besoin d’argent liquide. Il s’ensuivit toute une épidémie de vols d’armes. En faisant l’inspection de sa compagnie de cavalerie en Janvier 1866, un officier de Fort Union, New Mexico, se rendit compte qu’il manquait cinquante cinq revolvers à percussion Remington en calibre .44. Les armes, qui coûtaient 12,00 $ la pièce au gouvernement, partaient à 50,00 $ la pièce sur la frontière. Au Texas, les vols d’armes atteignirent de telles proportions qu’au mois d’Août 1866, le War Department fut obligé de publier la circulaire General Order N° 65, qui disposait : « Dans l’état du Texas, le prix de leurs armes sera déduit de la paie des hommes engagés qui se débarrassent ou qui perdent leurs carabines Spencer, ou les revolvers Army Colt ou Remington, à raison de cent dollars l’unité pour les premières et cinquante dollars pour chacune des deux autres. » Les déserteurs, eux aussi, furent une source possible d’armes de contrebande. En Février 1867, le « Army & Navy Journal » rapportait que cinquante hommes du 3ème. Cavalry avaient déserté en masse de l’un des postes du Kansas, « …emportant avec eux chevaux, carabines, pistolets et munitions, dans l’intention probable de passer par le Nouveau Mexique avant de se disperser à travers la Californie. » A cette époque, le 3ème Cavalry était armé de carabines Sharps et Spencer, ainsi que de revolvers Colt et Remington. Les déserteurs en route vers la Californie purent très bien avoir trouvé de bon preneurs pour de telles pièces dans le Nouveau Mexique oriental. Les Indiens ne cachèrent jamais leur intérêt pour les armes. Le chef Kiowa Lone Wolf, Loup Solitaire, se présenta effrontément à une conférence de paix en 1871 à Fort Sill, Territoires Indiens, tenant fermement dans chaque main une carabine Spencer de contrebande.

Par la suite, le Général William T. SHERMAN écrivit au commandement de Fort Leavenworth, Kansas : « Je constate maintenant que beaucoup de ces assassinats et ces déprédations ont été faits par des Indiens de cette réserve, et qu’il existe un système pour échanger vers le Kansas et le Nouveau Mexique les chevaux et les mules volées, contre des armes et des munitions, car ces bandes de maraudeurs se promènent partout avec des carabines Sharps ou Spencer et des fusils Henry, et elles sont approvisionnées avec des cartouches ad hoc. » Le trafic Comanchero fleurit à partir de la Guerre Civile. En 1871, le journal « Daily New Mexican » estimait que plus de 30 000 têtes de bétail avaient été menées vers l’intérieur du territoire par les Comanches pendant les trois mois précédents. L’éleveur Texan Charles GOODNIGHT, lui-même victime de vols de bétail par les Comancheros, estimait qu’en deux ans seulement, 300 000 bovins et 100 000 chevaux avaient été volés dans son état pour entretenir ce genre de commerce. Les déprédations continuaient en une chaîne sans fin d’épanchements de sang et de vols, au fur et à mesure que les armes arrivaient aux mains des Indiens. En Janvier 1869, « environ une centaine de guerriers armés chacun de deux six-coups et d’un fusil Spencer… » attaquèrent le village de Gatesville au Nord d’Austin, tuant dix colons et emmenant plusieurs femmes et enfants pour les vendre plus tard aux Comancheros. Le mois de Mars suivant, le Consul des Etats Unis à Piedras Negras, Nouveau Mexique, écrivait que les Indiens faisaient des échanges en pleine ville, « bien armés de carabines Spencer et de revolvers. » En Avril 1873, un journal du Texas relatait une bagarre récente près de Camp Colorado, où une douzaine de braves, armés de Spencer, avaient défié les colons. Ce mois d’Août-là, quinze Comanches, armés de fusils « Winchester, Henry et Spencer », se heurtèrent à la milice locale au cours d’une bataille acharnée en haut de Packsaddle Mountain, la Montagne de la Selle de Bât. Toutefois, vers le début de 1873 et à cause du vigoureux harassement par les militaires, le commerce des Comancheros commença à décliner. Les Comancheros plus ardus répondirent en traçant leurs pistes à chariots plus au Nord de la rivière Canadian et un marchand effronté, Juan PIEDA, lança un défi public à l’Armée, mettant les troupes en demeure de l’attraper si elles le pouvaient.

Il y avait encore de l’argent à faire dans le commerce, mais les conditions changèrent rapidement au fur et à mesure que les Blancs pénétraient dans les Staked Plains en nombres de plus en plus grands. Les équipes d’experts et de géomètres, envoyés là pour un projet de ligne de chemin de fer, écumèrent le Llano avec des gens qui n’étaient là que provisoirement mais avec leurs Winchesters, et à partir de l’été 1874, les chasseurs de bisons éliminaient les grands troupeaux qui y paissaient encore. En voyant leur patrimoine menacé par la disparition des bisons, les Kiowa, les Comanche et les Cheyenne du Sud se rassemblèrent dans une tentative désespérée de repousser les intrus hors de leurs territoires de chasse. A la fin de Juillet 1874, des centaines de colons avaient été tués dans la Cimarron Valley, et même près de Fort Bascom, comme les raids s’étendaient vers l’intérieur du Nouveau Mexique. Au mois d’Août, on préparait une grande campagne contre les Indiens, la Red River War, la Guerre de la rivière Rouge, avec cinq colonnes de soldats qui sortirent des postes du Texas, du Nouveau Mexique, du Kansas et du Territoire Indien, pour attaquer les hostiles sur le terrain. Après une avance forcée, ces colonnes convergèrent en amont de la Rivière Rouge et dispersèrent ou forcèrent à se rendre la plupart des bandes fugitives. A cette époque, quelques Comancheros virent la fin de leur commerce se rapprocher de plus en plus et l’abandonnèrent pragmatiquement pour s’enrôler dans l’Armée comme éclaireurs contre leurs anciens clients. On continua à se livrer des batailles sporadiques et mineures, contre des braves défiant tout le monde, même après que les tribus fussent enfermées dans leurs réserves. En 1880, une compagnie de Texas Rangers, sous le commandement du Capitaine George W. ARRINGTON, intercepta un groupe d’Indiens Pueblo Comancheros qui traversaient les Staked Plains pour se rendre vers un lieu de rendez-vous. Les Rangers confisquèrent leur chargement d’armes, qui consistait en« principalement des fusils Spencer et des cartouches à percussion annulaire », se rappela l’un des hommes de loi. Le CapitaIne ARRINGTON relâcha les Pueblo en les prévenant que si jamais il les retrouvait à nouveau sur ce territoire, il leur ferait tirer dessus à vue. Il ordonna ensuite à ses hommes d’enterrer les armes et les munitions près de leur camp. L’auteur ne dit pas si les Comancheros ont, ou n’ont pas, surveillé les Rangers de loin pour voir ce qu’ils faisaient avec leur came, puis s’ils sont revenus en douce pendant que les Rangers étaient partis, pour déterrer les caisses et les récupérer. Sûrement ont-ils laissé tomber, peut-être parce qu’ils avaient trop les foies. Quelque part dans le Llano Estacado, au Nord du vieux Fort Elliot, reposent les restes rouillés des vestiges d’un vieux trafic qui fit baigner la frontière du Sud-Ouest dans un bouillonnement de sang pendant des générations. Dis-moi juste où elles sont, ces caisses, et je m’en vais te les chercher, moi, ces Spencers et leurs cartouches ! Les armes portées et vendues par les Comancheros avaient été d’un côté les instruments d’efforts sordides de gens qui recherchait la richesse, et de l’autre ceux du combat désespéré d’un peuple fier qui refusait de se faire balayer par une marée de civilisation Blanche.

A la fin, les rêves et les espoirs qu’on avait tant défendus jusqu’au sang avec le trafic des armes, furent délaissés avec le même aspect qu’une douille pour Spencer que l’on vient de tirer, c’est-à-dire brûlée, sale et vide. Aujourd’hui, l’herbe a repoussé depuis longtemps sur les pistes tracées par les chariots des trafiquants, pendant que les vieux os des guerriers morts se sont réduits en poudre et se sont mélangés avec la poussière qui chevauche le vent par dessus le Llano Estacado. N’oublions pas le cactus et le vautour posé dessus.

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LES ARMES DES CHERCHEURS D’OR « QUARTANTE-NEUVIENS »

Traduction d’un article de Rick HACKER paru dans D.G.W. Blackpowder Annual 1983

( les remarques en italique sont du traducteur )

S’il y a un événement qui peut être tenu pour avoir été le point de départ de la grande migration de colons vers le Far West, l’Ouest Lointain, c’est la Ruée vers l’Or de Californie en 1849. En une seule année, ce qui n’avait jadis été qu’un endroit tranquille, rural et presque ignoré, un lacis de rivières paresseuses et de collines de genévriers qui s’élevaient doucement pour rejoindre les crêtes recouvertes de pins et de granit de la Sierra Nevada, la Montagne Enneigée, se transforma en des villes grouillantes de communautés agitées, construites à la hâte et n’importe comment, de routes encombrées de chariots et d’essaims d’une importance jamais vue auparavant, d’hommes, de femmes et d’enfants issus de toutes les couches sociales et venant de pratiquement tous les coins du globe. En moins de dix ans, la population de la ruée vers l’or de Californie gonfla de 14 000 en 1848 à plus de 380 000 en 1860. Et pour moi, de 1848 à 1860, ça ne fait pas moins de dix ans, ça en fait douze. Ironiquement, la première fois où l’on découvrit de l’or fut un événement très peu relaté, et l’homme à qui l’on attribue généralement cette ruée vers l’or, John Augustus SUTTER, mourut dans la misère, se lamentant « Mes jours les plus beaux furent ceux d’avant la ruée vers l’or »C’est donc le seul mec, déjà riche avant, que la découverte d’or rendit pauvre. En fait, les autres sont venus prendre l’or que l’on trouvait chez lui, certains y moururent, souvent d’une mort violente, avant d’en avoir trouvé, d’autres moururent dans la misère sans en avoir trouvé, d’autres moururent aussi dans la misère, après en avoir trouvé mais après l’avoir flambé, d’autres encore repartirent avec une fortune, mais lui n’en chercha jamais, alors qu’il était à sa portée puisque tout le pays était à lui, et les cafards fous lui ont massacré son petit coin de paradis. Avant la découverte de « couleur », SUTTER était l’homme le plus important et le plus influent dans la région du delta du Sacramento en Nouvelle Californie. Sa forteresse de cinq acres, qu’il appelait « New Helvetia », la Nouvelle Suisse, était un empire miniature fait d’un mur de deux pieds et demi formant un fort autonome qui avait des écuries, des jardins, une forge, une tannerie, des magasins généraux, bref, tout ce dont on pouvait avoir besoin pour vivre dans un pays rural où personne ne venait déranger et que presque personne ne venait visiter. Le fort lui-même était gardé par de hautes tours et des canons à chaque point stratégique. A l’époque où les Etats Unis arrachèrent l’Alta California au Mexique en 1846, c’est-à-dire la Haute Californie ou la partie Nord aujourd’hui américaine, en comparaison avec la Baja California qui est toujours mexicaine, SUTTER se sentait en sécurité. Bien qu’il fût un immigrant Suisse et que le Général Guadalupe VALLEJO lui eût donné officiellement le grade militaire de Capitaine, sa loyauté était pour les « States ». Il ne se rendait pas compte de la menace qui l’attendait sous les eaux tumultueuses de la rivière America, à quelques miles en amont de son enceinte fermée. Dans ma collection personnelle, j’ai une reproduction relativement rare du journal de la New Helvetia de SUTTER. En lisant les mots de SUTTER au sujet de ces années tranquilles précédant la ruée vers l’or, je ne vois presque pas de mention sur des armes, de quelque sorte que ce soit, à l’exception du canon qui gardait le fort. Pourtant, les armes à feu ont toujours fait partie de toute manière de vivre sur la frontière et, au cours de visites personnelles sur les restes reconstruits, en un peu plus petit, de Fort Sutter, je ne fus pas surpris de découvrir l’existence d’armes longues, la plupart des mousquets et des fusils de type militaire, que l’on utilisait à l’époque à la fois pour se procurer de la nourriture et pour assurer sa protection personnelle. Malheureusement, à cause des effets du temps et de la corrosion, seuls ont pu être identifiés un mousquet modèle U.S. 1795 et un fusil rayé modèle Mississipi 1841, en même temps que quelques fusils de chasse juxtaposés à percussion, l’un des outils les plus utiles, comme nous allons le voir, pour les « quarante-neuviens », appelons-les comme çà, ces hommes et ces femmes de la Ruée vers l’Or de 1849, pour rester fidèle à l’expression de l’auteur tout en ne tombant pas dans l’imitation « soixante-huitard » sur le retour d’âge. Bien sûr, ce ne fut pas une surprise de découvrir des fusils militaires à Fort Sutter, car ce havre bien connu était une escale programmée pour quiconque voyageait tranquillement à travers la Californie avant la ruée vers l’or. C’est cette popularité de la New Helvetia, et le désir de SUTTER d’étendre son empire, qui furent responsables, indirectement en tous cas, de sa perte. Un autre facteur qui dut y contribuer fut qu’il négligea de réaliser l’importance que la découverte de l’or allait apporter à la région.

John SUTTER fut peut-être un homme aimable, généreux et sociable, mais les preuves suggèrent qu’il n’était pas vraiment un homme d’affaires. « J’avais besoin… d’un moulin à blé et d’une scierie » écrivit-il dans ses « Reminisces », ses souvenirs« J’avais commencé à construire un moulin à blé en 1847 sur les bords de la rivière America, à environ quatre miles en amont du fort… Tout était prêt, et le moulin aurait pu commencer à tourner dans les six semaines suivantes si la nouvelle de la découverte d’or avait pu être gardée secrète aussi longtemps que cela. » SUTTER n’avait pas vraiment d’opinion sur l’or, mais il en avait encore moins pour l’homme qui en trouva le premier sur ses terres. « J’avais parmi mes employés un homme du nom de James Wilson MARSHALL » se rappelait SUTTER « Un bon mécanicien… Quand j’ai parlé du moulin avec lui, il m’a dit qu’il pensait être capable de le construire. J’avais des doutes sur la confiance que je pouvais lui accorder si je ne le surveillais pas, à cause de son excentricité, mais… je n’avais personne d’autre, c’est pourquoi j’ai été dans l’obligation de miser aléatoirement sur l’homme. » Le monde idyllique de John SUTTER commença à s’écrouler le Vendredi 28 Janvier 1848. A cette date, il écrivit avec un euphémisme suprême dans son journal « Aujourd’hui, Mr. MARSHALL est revenu des Montagnes avec une affaire très importante. » Cette « affaire très importante », c’était une grosse pépite d’or pur que MARSHALL avait trouvée dans le gravier du lit de la rivière America. La réaction immédiate de SUTTER fut d’essayer de cacher la nouvelle de la découverte, mais comme son fort était l’endroit même par où transitaient toutes les informations de la région, elle ne mit pas longtemps à se répandre : il y a de la « couleur » dans la rivière, juste là, à la surface, qui attend que l’on vienne la ramasser. Dans son journal, SUTTER ne fait pas mention du terme « or » avant trois mois après sa découverte initiale, mais il est évident d’après ses notes que des visiteurs et des travailleurs du fort se promenaient dehors toute la journée, à la recherche du précieux métal. Enfin, la nouvelle atteignit San Francisco, ce qui fut le début de la fin pour SUTTER et celui de la plus grande ruée vers l’or que le monde eût jamais vu auparavant. « La grande ruée des prospecteurs de San Francisco arriva au fort en Mai 1848 » écrit SUTTER « Toutes les maisons de mes amis et des gens que je connaissais au fort étaient pleines. Des marchands, des docteurs, des avocats, des capitaines au long cours, tous y vinrent. Tout n’était que chaos. Mes propres hommes me désertaient. Je n’arrivais même pas à fermer le portail pour garder cette racaille dehors. » Les milliers de personnes qui arrivèrent avec la première vague firent piétiner les champs luxuriants de SUTTER par leur bétail et leurs chevaux. Tout ce qui ne fut pas détruit fut pillé, depuis les pierres avec lesquelles le fort avait été construit, jusqu’au canon qui le gardait. Les nouvelles allaient lentement à cette époque-là, et il se passa bien six mois avant qu’elles ne fussent colportées par les bateaux à aubes et les cavaliers au reste du pays, lequel ne se doutait de rien mais était impatient de savoir et à l’écoute de tout. Les « States » éclatèrent immédiatement en une épidémie de fièvre de l’or à laquelle très peu avaient été préparés. Peu importe que peu d’hommes savaient exactement à quoi ressemblait l’autre côté du Mississipi. Peu importe que personne ne sût combien de temps durait un voyage par la terre et de combien de provisions on aurait besoin. Peu importe qu’il n’y eût que peu, s’il y en avait, de vie civilisée dans la Great Platte Valley. Quelque part là-bas, à l’Ouest des Rocheuses, quelque part dans la Sierra Nevada, où qu’elle fût, l’or attendait que les premiers qui y arriveraient le ramassent ! C’était « Ca passe vers la Californie ou ça casse ». Et beaucoup passèrent pas la case « cassé » bien avant d’arriver aux sites, ou juste après. Il y avait uniquement deux moyens pour arriver aux champs aurifères de la Californie, par bateau autour du Cap Horn, ou à pied, à cheval ou en chariot, à travers les Grands Plaines encore largement inexplorées. Le voyage par mer était cher et durait de deux à trois mois, selon le temps. On y était également très à l’exigu et c’était extrêmement coûteux en comparaison avec le voyage par la terre. Mais par la terre, il fallait six mois en moyenne aux quarante-neuviens pour franchir les 2000 miles passant par des plaines vallonnées, des déserts brûlants et des montagnes abruptes, le tout assaisonné de vents qui soufflaient à 80 miles par heure, des pluies torrentielles, de la boue où l’on s’enfonçait jusqu’aux essieux, et un froid qui glaçait les poumons. En plus de cela, il y avait un vrai problème de temps, car tout pionnier qui essayait d’atteindre la terre promise dorée de Californie, devait arriver à trouver son chemin par dessus les Sierras avant les premières neiges de l’hiver. Si les Indiens, la faim et les bandits n’avaient pas pris leur part, le climat le ferait, l’exemple le plus remarquable en étant la fatidique Donner Party. Mais ceux qui arrivaient à survivre au voyage vers la Californie, par la terre ou par la mer, le faisaient grâce à la chance, une bonne dose d’expérience et leur habileté à manier leurs armes.

Le fusil de chasse juxtaposé à percussion fut de loin l’arme longue la plus utile et la plus nombreuse dans les champs aurifères. L’éparpilleur, l’arme standard utilisée pour remplir le garde-manger et apportée dans les fermes américaines du début du XIXème. siècle, se révéla être un compagnon fiable pour le petit gibier dans les champs aurifères de Californie, et ses canons béants au calibre de 12, de 10 ou de 8 étaient un argument de poids contre tout intrus potentiel sur la concession. On pouvait le charger avec du petit plomb pour le petit gibier, de la balle ou de la chevrotine pour le tir à courte distance sur du chevreuil et, quand les temps étaient durs, on pouvait même utiliser quelques petits galets de la rivière pour essayer de mettre quelque chose dans la gamelle. Et plus d’une fois, le vieil « éparpilleur » fut chargé d’une once ou deux de poudre d’or que l’on tira dans le lit d’un ruisseau ou sur une saillie de granit, pour « saler » une concession improductive de façon à pouvoir la vendre à un pied tendre nouvellement arrivé, pour beaucoup plus que n’en valait le terrain.

Etrangement, il y eut peu de criminalité au cours des premières années de la ruée vers l’or. Il y avait relativement peu d’hommes sur une immense région, l’or était facile à trouver et en abondance pour chacun, et une espèce d’esprit de camaraderie régnait. Mais au fur et à mesure que les prospecteurs usurpaient de plus en plus les limites des concessions et que des hommes aux valeurs morales différentes commencèrent à se mêler à ceux déjà présents, la situation changea. Dans son livre « Life on the Plains and At the Diggings », La Vie dans les Plaines et dans les Concessions, publié en 1854, Alonza DELANO décrivit son expérience en tant que l’un des premiers quarante-neuviens : «  Vers 1850… beaucoup en arrivèrent à voler… il devint nécessaire de garder sa propriété avec autant de soin que dans les vieilles villes d’où nous venions. On peut dire que l’hiver de ’49 et ’50 peut être considéré comme l’époque où la criminalité à commencé… » A peine quelques mois plus tôt, DELANO parlait d’un étranger qui campait avec lui pendant la nuit et qui laissait nonchalamment son sac d’or à la vue de tous, non gardé, pendant qu’il dormait. A présent, ces temps-là étaient révolus pour toujours dans les champs aurifères de Californie.

Les armes à feu devinrent un moyen de protection autant que pour se procurer de la nourriture. Au début, on prenait avec soi sur le terrain des pistolets à un coup à percussion, quelque peu encombrants à porter, pour la protection individuelle. Ils étaient relativement peu coûteux, pouvaient tirer une forte charge, et beaucoup de chercheurs, les ayant utilisés alors qu’ils étaient au service du gouvernement, savaient s’en servir. D’autres, exigeant plus de puissance de feu que de pouvoir, choisirent la « poivrière », un revolver à plusieurs canons qui, bien qu’encombrant à garder lorsqu’il était simplement glissé dans le haut du pantalon, était cependant très populaire. La poivrière offrait cinq ou six coups sans recharger, mais son défaut majeur était que les calibres étaient parfois faiblards et les charges légères. Pour le quarante-neuvien qui n’avait pas peur de s’embarrasser d’un peu de poids supplémentaire pendant qu’il travaillait sur sa concession, le gros Colt Dragoon Premier ou Second modèle de quatre livres, avec une charge musclée de 40 grains de poudre et une balle de .44, apportait la combinaison idéale de cinq coups de combat, la sixième chambre étant souvent laissée vide par les gens qui étaient sur le terrain, de peur que le lourd revolver ne glisse accidentellement de son étui ou de la ceinture et ne se décharge accidentellement en heurtant le sol rocailleux. Ces revolvers furent largement utilisés par les troupes montées des Etats Unis, et beaucoup d’armes d’ordonnance furent « libérées » pour servir dans les champs aurifères. Beaucoup plus furent achetés par des hommes qui voulaient un avantage en pouvoir d’arrêt, au cas où cela serait nécessaire pour défendre une concession à courte distance. Bien que le massif Colt Walker dominât les Dragoon, peu de ces armes furent utilisées dans les champs aurifères, puisque seuls 1100 Walker furent fabriqués et que, parmi ceux-ci, la plupart furent affectés pendant la Guerre du Mexique, n’en laissant que 100 pour le marché civil. Toutefois, il existe des traces d’un Walker transporté dans un sac de toile vers la fin de la ruée vers l’or, par un vieux vétéran grisonnant qui râlait parce qu’il ne trouvait jamais d’étui assez grand pour son pistolet d’arçon. Cet exemple, qui mentionne une arme à feu par son nom, est assez rare car, lorsqu’on lit des récits contemporains de la ruée vers l’or, il y est fait peu allusion à tel ou tel type d’arme, plus souvent citée comme « pistolet » ou « fusil ». Il s’agit là d’une chose normale, à une époque où le fait de porter des armes était aussi courant que de porter une montre au poignet aujourd’hui. Nous donnons rarement le nom de la marque. Nous disons plutôt « J’ai jeté un coup d’œil sur ma montre… »

Pourtant, il y eut une arme qui était apparemment très estimée aux yeux des quarante-neuviens et que l’on arrive à identifier parfois, et cette arme, c’est le Colt 1851 Navy ou, comme on l’appelle souvent, le « Navy de chez Colt ». Une société qui vendait des catalogues d’accessoires à emporter par les prospecteurs potentiels pour leur voyage vers l’Ouest, alla même aussi loin que dire « aucun homme ne devrait être sans le 1851, car avec lui, il pourra obtenir tout ce dont il a besoin » ! Même pas peur, le mec. « Achetez donc mes flingues, plutôt que de payer pour une concession de merde où on va vous arnaquer. Au moins, avec mon ’51, vous pourrez en avoir une à l’œil ! » De nos jours dans les pays civilisés, la boîte qui ferait ce genre de publicité serait immédiatement poursuivie pour incitation à la violence. Bien sûr, le Colt 1851 ne sortit pas avant deux ans après la première vague de prospecteurs et même alors, il fallait à n’importe quelle quantité de ce genre d’arme six mois avant d’arriver au Far West. Mais jusque là, il n’y en avait pas encore vraiment besoin. « Pendant l’année 1849 » écrivait Alonzo DELANO dans son livre « le brigandage était rare… on laissait les coffres et les ballots ouverts et exposés… dans les rues bondées des nouvelles villes. L’or ne semblait pas tenter… les hommes à la malhonnêteté et on entendait rarement dire qu’un chercheur s’était fait voler. » Mais en 1851, tout cela avait changé. Les premières trouvailles faciles du début avaient déjà été prises et chercher de l’or était devenu un travail sérieux, éprouvant et souvent ingrat. En conséquence, il y eut des individus qui commencèrent à chercher des moyens plus faciles pour faire fortune. Et les armes des quarante-neuviens, qui avaient auparavant été reléguées à des tâches domestiques, eurent à présent un nouveau rôle à jouer comme moyens d’auto-défense. « Le brigandage et le meurtre étaient quotidiens », dit DELANO à propos de ces années turbulentes. « Des bandes organisées de voleurs existaient dans les villes et dans les montagnes… il était risqué de ne pas être armé. »

C’est dans ces décors qu’entra en scène le Colt 1851, le revolver à percussion le plus populaire sur le marché de l’époque, à cause de sa fiabilité, son excellent équilibre, sa taille idéale et la réputation de son fabricant. Les chambres du Navy étaient suffisamment profondes pour contenir 20 à 25 grains de poudre derrière une balle ronde de calibre .36, donnant ainsi nettement moins de pouvoir d’arrêt que les puissants Dragoon, mais si les coups étaient bien placés, le Colt .36, rapide à pointer, devenait un bon moyen de garder l’or dans la poche du juste. Mais, même quand le précieux métal se trouvait du côté de son véritable propriétaire, cela ne voulait pas forcément dire que le danger était passé. « Dans une maison de jeux… » dit DELANO « un homme qui quittait la ville pour rentrer chez lui se laissa entraîner à tenter sa chance à la table de jeux… fâché d’avoir perdu son argent, il essaya de se refaire en sortant son pistolet devant l’autre joueur, lequel l’étendit raide avec le sien » Ces rencontres à très courte distance avec les gens de la ville se disputaient souvent avec le minuscule Deringer, un petit pistolet de veste à un coup à percussion et au canon court, très populaire. D’abord produit par Henry DERINGER Junior de Philadelphia, ces armes de défense tenant dans la paume de la main, mais de gros calibre, souvent en .40 ou en .50, étaient souvent portées par les joueurs professionnels, les voyageurs en diligence qui se rendaient vers les champs aurifères ou qui en revenaient, les femmes de toutes réputations, et les hommes d’affaires qui restaient généralement près des quartiers populeux, dans ces nouvelles villes champignons de la ruée vers l’or. Avec sa charge de 15 grains, le Deringer manquait de puissance pour être efficace plus loin qu’à 25 pieds, mais grâce à sa petite taille qui permettait de le dissimuler facilement, donnant à son propriétaire l’avantage de la surprise contre son antagoniste, il devint la deuxième arme de poing la plus populaire de la ruée vers l’or, et on l’apprécia tellement que son nom devint synonyme de toutes les autres armes de configuration similaire. Comme pour le Deringer, on choisit les petits Colt de poche modèles 1848 et 1849, comme le Baby Dragoon et le Wells Fargo, pour leur taille compacte plutôt que leur puissance. Mais comme il s’agissait de revolvers, leurs barillets de cinq et six coups pouvaient tirer plusieurs fois si besoin, et même le petit calibre .31 occasionnait des dommages graves à courte distance. Légers, les pistolets de poche étaient pratiques à emporter dans ses bagages pour un chercheur qui aurait à marcher plusieurs miles à travers les collines de la rude Sierra Nevada. Beaucoup de ces pistolets Colt servirent d’arme « de la deuxième chance » aux hommes pour qui la vie dans les champs aurifères valait plus qu’une simple aventure. Il existe également des preuves que l’une des nombreuses sociétés de messagerie qui abondaient en ces temps-là, équipait ses cavaliers avec des Colt modèle 1849 à canon de 3 pouces.

Bien qu’ils fussent loin d’être le choix optimum pour un homme à cheval, les petits Colts avaient l’avantage d’être les pistolets à plusieurs coups les plus compacts disponibles à l’époque. A un moment de la ruée vers l’or, le Colt modèle 1849 était tellement demandé que ces armes se vendaient au marché noir à 100 Dollars l’unité, la même coûtant moins de 15 Dollars aux « States ». Mais c’était là le prix de la protection dans un pays où la population continuait à grossir avec de nouvelles, et toujours plus diverses, espèces du genre humain, pas toujours accueillantes, et toutes attirées par le leurre de la fortune immédiate. Les joueurs professionnels, les voleurs de concessions et les brigands n’étaient pas les seuls dangers dans ces collines de quartz et de granit au pays de l’or. Ce n’est pas par hasard que l’ours figure sur le drapeau de la Californie aujourd’hui, et en ces temps reculés, avant l’écrasement de la civilisation, il y en avait beaucoup, et pas toujours très d’accord pour céder leur territoire à un homme qui venait avec une pelle et une pioche. Les premiers Kentucky Rifle et fusils à écureuils, légers, que certains quarante-neuviens avaient apportés avec eux, se révélèrent bientôt inutiles dans la nouvelle réalité de l’Ouest. Un récit de l’époque parle d’un mineur attaqué par un grizzly, pendant que ses trois filles, chacune armée de son propre fusil, tiraient à bout portant dans la tête de l’ours avant qu’il fût enfin tué. Trois coups étaient plus que ne pouvait tirer tout fusil de l’époque, et il n’est pas surprenant d’apprendre que les lourds fusils des plaines, aux gros calibres et au demi-fût à l’avant, furent les armes favorites des chercheurs d’or. Beaucoup d’entre eux avaient vu ce que pouvaient faire ces fusils dans les mains de leurs guides, souvent des anciens trappeurs des Montagnes Rocheuses qui utilisaient leur expérience du Far West pour faire traverser les majestueuses Sierras aux nouveaux-venus. Les Hawken, aussi rares qu’ils fussent, trouvèrent leur chemin vers les champs aurifères. Les Dimmicks et les Lemans trouvèrent eux aussi leur place dans plus d’une cabane de mineur ou une tente, et servirent leurs propriétaires comme ils le devaient en leur apportant de la viande pour la table, ou en leur accordant un coup à longue distance sur un suspect qui aurait pu être un « bandito ». Il y avait peu de tribunaux en Californie, et le juge, l’avocat et le bourreau se trouvaient souvent sous le même chapeau. En plus de ces « armes de sport » pour les civils, comme on les appelait parfois, les armes militaires firent elles aussi leur chemin vers la Californie. Bien que la platine à silex fût considérée comme dépassée par la plus moderne platine à percussion, un certain nombre de fusils à silex et de mousquets du début du XIXème. siècle convertis à la percussion furent utilisés par quelques mineurs. Ces armes étaient solides et, chose plus importante pour un homme pauvre, étaient relativement bon marché. Bien sûr, le plus prisé fut le fusil rayé Mississipi U.S. Model 1841, une belle arme à percussion en calibre .58, garnie de laiton, qui avait déjà fait ses preuves lors de la récente Guerre du Mexique. Comme le Walker, certaines de ces armes furent « libérées » pour que l’on s’en servît en Californie, mais une quantité beaucoup plus importante fut achetée comme surplus de guerre avant la fin de la ruée vers l’or, constituant ainsi une arme fiable contre tout mauvais comportement d’homme ou de bête, au pays des quarante-neuviens. Comme l’or se faisait plus rare à trouver, et plus cher et difficile à exploiter, certains chercheurs quittèrent le pays. Ironiquement, au cours des premières années de la ruée vers l’or, l’homme ne cherchait que la « couleur », au point d’en arriver à échanger l’argent que certains trouvaient parfois en creusant dans le granit. En fait, il est intéressant de noter que beaucoup de mineurs qui travaillèrent les trésors d’argent du Nevada venaient des champs aurifères de Californie, et que ceux qui découvrirent le fameux Comstock Lode, le Filon de Comstock, étaient d’anciens quarante-neuviens.

En 1858, la grande ruée vers l’or avait vécu. Cette année-là, l’historien John S. HITCHELL écrivit « Le pays était plein d’hommes qui n’arrivaient plus à gagner la vie à laquelle ils s’étaient habitués… ils étaient prêts à aller n’importe où s’il y avait un espoir raisonnable d’y trouver la richesse en creusant, plutôt que de se soumettre à une vie sans la grosse paie et les plaisirs dont ils avaient joui pendant des années dans les placiers de Sacramento. » Cela ne veut pas dire que tous les quarante-neuviens en ressortirent plus pauvres que lorsqu’ils y entrèrent. Loin de là. En fait, il restait juste assez d’histoires de succès pour continuer à faire rêver. Un chercheur d’or trouva une pépite de 2000 Dollars le premier jour de l’exploitation de sa concession. Pour un autre, ce qu’il écopa un jour en une seule batée fut estimé à 1500 Dollars. Il est vrai que certains trouvèrent littéralement leur fortune dans une nouvelle aventure encore jamais racontée, si l’on avait assez de force et de courage pour lui courir après. Toutefois, rien de cela n’aurait été possible sans l’outil qui donnait à chaque homme la même chance face au danger et à la difficulté, les armes des quarante-neuviens. Pour beaucoup, ces armes prouvèrent qu’elles étaient beaucoup plus précieuses que l’or.

DE CES ARMES, QUI VEND LESQUELLES AUJOURD’HUI AUX U.S.A. ?

Fusil de chasse juxtaposé :       DIXIE GUN WORKS

EUROARMS OF AMERICA

NAVY ARMS Co.

Fusil des Plaines :                     NAVY ARMS Co.

LYMAN PRODUCTS

CONNECTICUT VALLEY ARMS ( C.V.A. )

Missisipi Rifle 1841 :                DIXIE GUN WORKS

NAVY ARMS Co.

Colt 1847 Walker :                  DIXIE GUN WORKS

ALEN FIRE ARMS

Colt 1848 Dragoon :                ALLEN FIRE ARMS

Colt 1848 Baby :                     ALLEN FIRE ARMS

Colt 1849 Pocket :                  ALLEN FIRE ARMS

DIXIE GUN WORKS

Colt 1851 Navy :                     NAVY ARMS CO.

DIXIE GUN WORKS

ALLEN FIRE ARMS

LYMAN PRODUCTS

Poivrière :                                HOPPE’S

Deringer Philadelphia :  DIXIE GUN WORKS

Single Shot :                            CONNECTICUT VALLEY ARMS ( C.V.A. )

DIXIE GUN WORKS

ALLEN FIRE ARMS

NAVY ARMS CO.

DIXIE GUN WORKS – Gunpowder Lane, UNION CITY, TN 38261, U.S.A.

EUROARMS OF AMERICA – 10, W. Monmouth Street, WINCHESTER, VA 22601, U.S.A.

NAVY ARMS Co. – 689, Bergen Boulevard, RIDGEFIELD, NJ 07657, U.S.A.

LYMAN PRODUCTS – Route 147, MIDDLEFIELD, CT 06455, U.S.A.

CONNECTICUT VALLEY ARMS – Saybrook Road, HADDEM, CT 06438, U.S.A.

ALLEN FIRE ARMS – 1107, Pen Road, SANTA FE, NM 87501, U.S.A.

HOPPE’S – Airport Industrial Mall, COATSVILLE, PA 19320, U.S.A.

Et, puisqu’en fait ces maisons importent de l’Italien, n’oublions pas :

UBERTI – Via Carducci Giosue, 1, 25068 SAREZZO ( BS ), Italie

PEDERSOLI – Via Artigiani, 57, 25063 GARDONE VAL TROMPIA ( BS ), Italie

PIETTA – Via Mandolossa, 102, 25064 GUSSAGO (Bs ), Italie

LE COLT POCKET MODEL 1849

Traduction d’un article de Ph. SPANGENBERGER dans D.G.W. Blackpowder Annual 1993

Alors que beaucoup de gens croient que le revolver Colt Single Action Army 1873 fut le six-coups qui gagna l’Ouest, il y eut tout plein d’armes de poing qui eurent un impact sur notre frontière américaine des années avant que le S.A.A. fût même un rêve. Bien-sûr, Colt était devenu synonyme de qualité des dizaines d’années avant 1873, grâce à ces armes totales que furent le 1851 Navy, le 1860 Army, les différents modèles de Dragoon, et d’autres. Ironiquement toutefois, malgré la bonne réputation qu’avaient gagné ces pistolets « de ceinture » ou bien « de selle », ce fut un petit pistolet à cinq coups qui donna au Colonel Samuel COLT une place solide dans le commerce des armes. L’époque de la moitié du dix-neuvième siècle fut une aventure globale. Dans pratiquement tous les coins du monde, il y avait de nouvelles terres à explorer et à conquérir, des frontières à domestiquer, et des fortunes à faire… ou à perdre. Ceux qui s’aventuraient dans ces terres sauvages voulaient la meilleure protection disponible. Les villes, elles aussi, étaient pourries de crime, et largement peuplées d’individus peu recommandables. Le chômage était souvent élevé, la famine frappait constamment de nombreuses villes de l’Ancien Monde, et l’absence d’une force de police forte, parfois l’absence de toute police, augmentait le péril pour le citoyen. La vie était telle en ces temps-là, que porter une arme personnelle n’était pas seulement raisonnable, mais c’était souvent nécessaire ! Se déplacer d’une zone peuplée vers une autre représentait souvent une entreprise dangereuse, avec ses bandits de grands chemins et ses bandes errantes de maraudeurs qui constituaient un péril pour le voyageur. Les fabricants d’armes étaient occupés à produire des armes à feu militaires et civiles, ainsi que des armes blanches, et la demande du grand public pour de petites armes de poing, faciles à cacher mais fiables, n’était pas une mince affaire. Sam COLT était un homme d’affaires astucieux et réalisa l’évidence de cette demande. Il réalisa aussi qu’une telle arme devrait être d’un prix abordable. On utilisait déjà des milliers de petits pistolets à un coup durant le milieu des années 1840. Leur taille variait de l’immense et encombrant pistolets de selle en gros calibre, aux minuscules et inefficaces modèles de « pistolets de veston ». Il y avait des pistolets équipés d’une lame de couteau, d’autres avec des poignées en forme de matraque, ou d’autres équipements auxiliaires dessus ou dedans, au cas où le coup tiré ne produirait pas l’effet désiré. Les « poivrières » à canons multiples tournants étaient elles-aussi assez populaires. Bien que ces dernières armes à feu ne fussent pas grand chose en matière d’armes de poing pour nos standards modernes, elles furent en leur temps considérées comme les meilleurs pistolets que l’on pût porter.

Etudiant les problèmes susceptibles de surgir pour produire une arme de poing fiable et de qualité, tout en gardant un prix d’achat qui la garderait à la portée du grand public, le Colonel COLT reprit soigneusement chaque stade de la fabrication de son gros revolver Dragoon. Il détermina que certains équipements, indispensables sur un gros revolver de ceinture, seraient inutiles pour un petit pistolet de poche, réduisant ainsi les coûts de production en temps et en main-d’œuvre pour une telle arme. Selon l’excellent ouvrage « Les Variations du Old Model Pocket Pistol de 1848 à 1872 » de P.L. SHUMAKER, on a estimé que le Colonel COLT élimina environ 85 des quelques 480 opérations nécessaires à la production de l’un des gros revolvers de la firme. La production du premier revolver de poche par Colt après l’effondrement de sa Patent Arms Mfg. Co. à Paterson, New Jersey, débuta vers 1847. Le résultat est ce que les collectionneurs appellent aujourd’hui le revolver Model 1848 Baby Dragoon. Cette arme est le prédécesseur du Pocket Model 1849. Avec une production d’environ 15 000 Baby Dragoon, il représente le premier modèle de poche fabriqué à l’usine Colt de  Hartford, Connecticut. En fabriquant le premier de ces nouveaux pistolets de poche de calibre .31, Colt voulait délibérément offrir une arme à feu bon marché qui pourrait se comparer plus favorablement aux armes de poing à un coup alors disponibles. Parmi les mesures destinées à réduire les coûts de fabrication du revolver Baby Dragoon de Colt, figurait le remplacement du traditionnel barillet à six coups que l’on trouvait sur le gros revolver de ceinture, par un autre qui n’en contiendrait que cinq. D’autres mesures incluaient un rempart sans découpe pour la mise en place des amorces, et l’absence du refouloir assemblé sous le canon. Pour charger ces premiers Colt, on devait d’abord chasser la clavette retenant le canon à la carcasse. Ensuite, on chargeait chaque chambre du barillet avec de la poudre, puis on forçait une balle dans chaque chambre en utilisant l’axe du barillet, échancré à son extrémité.

Après avoir procédé de la sorte, les amorces étaient posées sur les cheminées, on replaçait le barillet sur l’axe et on assemblait le tout en le maintenant avec la clavette. Enfin, on faisait tourner le barillet pour faire reposer le chien dans une unique encoche de « sécurité » située entre deux chambres. Parce qu’il n’y avait pas la découpe sur le rempart pour mettre les amorces, si l’une des amorces ne partait pas et ne faisait pas partir le coup, il fallait démonter le pistolet pour remplacer l’amorce. Cependant, en dépit de ces inconvénients, le nouveau revolver de poche de Colt était supérieur, dans sa conception et dans sa fonction, ainsi qu’en qualité, à toutes les autres armes de poing à un coup disponibles sur le marché. L’approbation du public était générale et ce nouveau petit pistolet fut un succès dès le début. Seul un petit nombre de Colt « Pocket » furent produits, environ 150, avant que la compagnie ne commençât à les perfectionner et les améliorer. On procéda à plusieurs changements : l’addition d’un refouloir pour faciliter le chargement, une découpe dans le rempart pour permettre le ré-amorçage sans démonter, et une petite roulette à la base du chien. De petites encoches furent alésées sur le barillet entre chaque chambre à la place d’une seule, et des encoches rectangulaires furent creusées dans le barillet pour le bloquer en place, au lieu des petites encoches rondes. On changea la détente et le pontet, et la forme du canon et de la carcasse fut légèrement modifiée et rallongée. Ces détails, ainsi que quelques changements cosmétiques, comme l’adoption d’une scène gravée représentant une diligence, les premiers Pocket Models reprenaient la scène de combat entre Ranger et Indien que l’on voyait sur le Dragoon et sur le Baby Dragoon, donnèrent ce qui fut connu comme le pistolet standard Model 1849 Colt Pocket Model.

Produit sous une variété de configurations et de longueurs de canons, le Pocket Model 1849 devint l’une des armes de poing les plus connues de son temps. La production de ce modèle débuta en 1850 et des milliers furent emportés vers l’Ouest dans la Ruée vers l’Or en Californie. C’étaient les armes favorites des mineurs, les postiers, et d’autres hommes de l’Ouest qui avaient besoin d’un petit revolver de poche. Sur la Barbary Coast à San Francisco, un joueur professionnel qui jugeait sage de garder un Colt Pocket caché sur sa personne quand il se livrait à sa profession douteuse, appelait parfois une telle arme son « cinquième as ». Pendant la Guerre Civile, les soldats en bleu ou en gris portaient des Pocket Model 1849 pour avoir un surplus de puissance de feu en cas de combat au corps à corps et, pendant des dizaines d’années au cours du milieu du dix-neuvième siècle, les aventuriers dans le monde entier louaient ces petits Colt dans les meilleurs termes. Bien que le Colt Pocket Model 1849 ne développait pas beaucoup de punch, ce n’était pas toujours nécessaire d’en avoir. De telles armes furent souvent utilisées comme moyen de pression en cas de situation difficile : une carte mal distribuée, une dispute au sujet d’une concession de mine, ou peut-être en faisant un prélèvement bancaire… Souvent, il n’y avait juste qu’à brandir une arme à feu pour obtenir le résultat désiré. Lorsque c’était le cas, ce qui se passait alors résultait plutôt de beaucoup d’autres facteurs que la puissance de l’arme. Une balle ronde ou pointue de calibre .31 pèse environ 45 grains de plomb pur et mou. Avec une charge standard de 15 grains de FFFg de poudre noire, la balle voyage à quelques 590 FpS et touche avec un peu moins de 35 FP d’énergie. En comparaison, le petit .32 S&W tiré dans les revolver à canons courts développe approximativement 680 FpS, et délivre 90 FP de choc. Pour les standards modernes, ces Colt de poche sont donc loin d’être impressionnants. Mais, utilisés à des distances comme autour d’une table de cartes, et si l’on prend en considération le projectile en plomb mou, avec la technologie relativement primitive de l’époque, spécialement si la victime était blessée dans le désert ou dans un camp perdu de mineurs où l’aide médicale compétente n’existait souvent pas, il est facile de comprendre comment on peut se servir d’un revolver si anémique. Bim, Bim, dans la tête, entre l’œil et l’orbite vers l’hypophyse, ou bien dans l’oreille vers le cervelet, et on n’en parle plus. Malgré la petite taille et la puissance relativement faible, ces revolvers pour tirer à courte distance étaient autant considérés à leur époque comme l’armement personnel d’un homme, que toute autre arme à feu. En Juillet 1850, le Missouri Commonwealth se vantait de la sécurité qu’il apportait à ses clients sur une nouvelle ligne de diligence à mule, reliant Independence, Missouri, à Santa Fe, New Mexico : « Le courrier est gardé par huit hommes, armés comme suit : Chaque homme a sur le côté, attaché à la diligence, un fusil revolver Colt, dans un holster plus bas, un long revolver Colt, et dans sa ceinture, un petit revolver Colt, à côté d’un couteau de chasse. Ainsi, ces huit hommes sont prêts, en cas d’attaque, à tirer 136 coups sans avoir besoin de recharger. » Dans ses récits humoristiques qu’il fait sur ses voyages dans l’Ouest dans les années 1860, Mark TWAIN fait état d’un conducteur de diligence qui s’arma avec l’un des petits revolvers de poche de Colt.

On trouve d’autres témoignages de la popularité du Colt Pocket Model 1849 dans le fait que, dans les mines d’or de Californie au début des années 1850, la demande pour des revolvers de qualité était si grande que l’usine Colt de Hartford, Connecticut, était incapable de faire face aux commandes. Les gros Colt de ceinture qui se vendaient autour de 16,00 $ à 18,00 $ sur la côte Est, se revendaient jusqu’à 250,00 $ ou 500,00 $ la pièce dans l’Ouest ! Même le petit ’49 en, calibre .31, moins cher, atteignait un prix de près de 100,00 $ sur la côté Ouest. Le Colt Pocket Model 1849 était vendu avec des longueurs de canons de trois, quatre, cinq et six pouces. Les tubes de quatre et de cinq pouces étaient les plus courants, alors que la version à six pouces semble la plus rare. Le Pocket Model possédait un canon et un barillet bronzés bleu, alors que la carcasse et le refouloir étaient jaspés. Les garnitures étaient généralement plaquées argent sur du laiton, bien que certaines furent faites en fer bronzé ou plaqué argent. Les crosses standard d’usine étaient faites dans une pièce de noyer, typique des Colt de cette époque. On proposait également de l’ivoire ou d’autres matériaux exotiques, et les armes présentant de telles poignées de luxe, soit lisses ou finement gravées, servaient de pièces d’exposition de grand luxe. On les rencontre avec une variété de marquages sur le canon, y compris deux variantes d’une adresse à New York, un marquage Hartford, CT., et l’adresse à Londres, tous sur le haut du canon. Bien que l’une des améliorations du Pocket Model 1849 fût l’intégration d’un refouloir, un petit nombre d’entre eux fut produit sans. Ces revolvers à canon de trois pouces, sans leviers de chargement, ont été appelés modèles« Wells Fargo ». Il n’y a pas de preuves que la compagnie de diligence bien connue ait un jour adopté ce revolver comme arme officielle pour ses conducteurs, ses gardes ou ses divers agents. En tous cas, ces pistolets ne se vendirent jamais bien, et vers 1860, Colt essaya de vendre le solde du stock de ces revolvers sans refouloir en leur en mettant un. Ceci fut fait en modifiant sommairement le levier de chargement du modèle standard à quatre pouces. Mais ces pistolets rencontrèrent la désapprobation du public, car le levier était trop court pour permettre la pression nécessaire à mettre la balle en place. On a estimé qu’environ 100 de ces Pocket Model à trois pouces transformés sortirent de l’usine. Aujourd’hui, de tels Colt transformés en usine sont des pièces de collection extrêmement recherchées. Il n’y a pas de doute que les employés de la Wells Fargo ont bien utilisé des Pocket Model 1849, avec et sans refouloirs. Beaucoup ont été achetés sur fonds privés, comme d’autres armes, et furent certainement portées par les conducteurs de diligence et d’autres agents de la W.F. & Co. On connaît deux Model 1849 dans la Bank’s History Room de la Wells Fargo à San Francisco, qui portent des inscriptions les identifiant comme ayant appartenu à la compagnie. Pendant les 23 ans qu’il resta en production, environ  325 000 exemplaires du Pocket Model 1849 furent fabriqués à l’usine Colt de Hartford. Un autre lot de 11 000 fut produit à l’usine de Londres, Angleterre. Les armes Anglaises sortirent entre 1853 et 1857, et sur les modèles les plus anciens, les garnitures sont en laiton avec les bords du pontet arrondis. Les modèles tardifs eurent des garnitures en fer et un grand pontet ovale. La production de cette arme de poing fut finalement arrêtée en 1873, lorsque Colt commença à produire des revolvers tirant des cartouches métalliques. Le Colt Pocket Model 1849 fut parmi les revolvers à percussion qui furent convertis à l’usine Colt, dans une première tentative de produire des armes de poing tirant des cartouches métalliques. En plus de cela, on a trouvé des Colt Pocket ’49 qui avaient été convertis par d’autres armuriers que ceux de l’usine, une preuve que la popularité de l’arme continua loin après l’âge de la percussion. Avec des concepts plus nouveaux et plus solides en matière d’armes de poing, ainsi que des munitions plus élaborées, le Colt Pocket Model 1849 fut lentement remplacé par des armes plus modernes. A l’époque de sa gloire, pourtant, le Pocket Model 1849 fut le revolver à percussion produit dans le plus grand nombre que tous les autres, et l’arme qui plaça Samuel COLT et sa compagnie légendaire dans les affaires pour une éternité.

LA BATAILLE DES LAVA BEDS

U.S. Army contre Modoc

Traduction d’un article de J.G. BILBY paru dans D.G.W. Blackpowder Annual 1993

Dans le sillage de la Ruée vers l’Or de 1849, les petites tribus indigènes d’Amérindiens de Californie furent accablées par une vague de pillages, de viols, de massacres et de maladies qui réduisirent la population Indienne de l’Etat de soixante dix pour cent. A moins d’un millier, les Modoc, qui chassaient, cueillaient et pêchaient sur une zone de plus de 5000 miles carrés près de la frontière entre la Californie et l’Oregon, refusèrent de sombrer tranquillement dans l’histoire sans réagir. Les Modoc préféraient éviter les Blancs, mais l’invasion engendra une résistance et dégénéra en une série de conflits pendant toutes les années 1850. Ravagés par la guerre et par la variole, opprimés par les colons et le gouvernement, les Modoc furent forcés à émigrer vers la Réserve Klamath dans l’Oregon, après un traité signé en 1864. Bien qu’harcelés par les Klamath, leur principal chef, Old Schonchin, Vieux Chauchichon, avec d’autres de son peuple, s’adaptèrent aux difficultés et à la précarité de la vie en réserve. Beaucoup ne purent pas le faire. Kientpoos, connu chez les Blancs comme Captain Jack, retourna vers les traditionnels territoires de chasse sur la Lost River, Oregon. En 1870, le Responsable aux Affaires Indiennes de l’Oregon, Alfred B. MEACHAM, réussit à convaincre Jack de revenir dans la réserve auprès de son peuple. Pourtant, de nouveaux heurts avec les Klamath, combinés à un programme officiel de destruction des pratiques culturelles et religieuses traditionnelles Modoc, provoqua une nouvelle fuite de la bande vers la Lost River en quelques mois. Les mineurs de la ville de Yreka, également appelée Eureka et située sur la côte, California, où les Modoc travaillaient, achetaient, demandaient avis et aidaient même à combattre des feux, n’étaient pas gênés par le retour des Indiens. Les fermiers locaux non plus, payant un « loyer » aux Modoc sous forme de marchandises et de nourriture, ou employant des Indiens comme cow-boys, c’est-à-dire comme gardiens de vaches. Mais certains colons, en particulier de l’Oregon, estimaient que les Modoc constituaient une menace et envoyèrent une pétition au gouvernement pour qu’on les renvoyât. Tentant un compromis, Captain Jack proposa que l’on lui accordât une réserve de six miles carrés sur la Lost River pour lui et son peuple. Mais cette solution tout à fait raisonnable, avalisée par MEACHAM et par le Général Edward R.S. CANBY, chef du Département à Columbia, ne fut jamais vraiment prise au sérieux, sans doute parce qu’elle aurait constitué un dangereux précédent en permettant aux Indiens de réclamer leurs terres traditionnelles.

Pendant que se traitaient toutes les tentatives de convaincre le peuple de Jack de revenir vers la réserve, Curly Headed Doctor, Docteur Tête Bouclée, un shaman, présenta la Danse des Esprits à la bande de la Lost River. Mieux connue pour son association avec la tragédie de Wounded Knee, le Genou Blessé, en 1890, la religion de la Danse des Esprits, qui promettait à ses fidèles la disparition des Blancs et la restauration de leur ancien mode de vie, tient ses origines chez les Païutes en 1870. Au début de 1872, MEACHAM fuit remplacé par T.B. ODENEAL. Le nouveau responsable promettait publiquement d’être ami avec les Indiens, mais demandait sous la table « l’élimination » de la bande de Jack, disant que c’était « la manière la plus clémente et la plus Chrétienne », et le moyen « le plus sûr », de régler le problème. Il n’y avait pas de négociation possible. Le gouvernement n’approuverait pas une réserve sur la Lost River, et Jack, pressé par les Danseurs des Esprits, risquait sa place de chef s’il faiblissait. S’il acceptait d’aller autre part, il perdrait à coup sûr. ODENEAL ne perçut pas la force de la bande de la Lost River, faisant l’erreur de conclure que Captain Jack, Hooker Jim, Jim la Pute, et d’autres chefs, ne représentaient pas leur peuple qui, croyaient-ils, voulait réintégrer la réserve. Frustré, le Responsable des Affaires Indiennes demanda au Major John GREEN du 1st. Cavalry, commandant du Fort Klamath, de former une « force suffisante » pour arrêter le chef Modoc. Sans en référer à CANBY, GREEN ordonna au Capitaine James JACKSON de mettre le Compagnie B du 1st. Cavalry en selle et de se rendre sur la Lost River. Seize heures plus tard, les trente huit hommes de JACKSON s’approchaient du village endormi de Captain Jack, pendant qu’une bande non officielle de quatorze civils armés traversaient la rivière pour pénétrer dans le camp de Hooker Jim. Comme Jack restait dans sa cabane, JACKSON engagea un pourparler futile avec plusieurs Modoc, puis leur commanda de lui remettre leurs armes.

Comme les Indiens hésitaient, le Lieutenant F.A. BOUTELLE dit à JACKSON que la bagarre était sur le point d’éclater et que « plus vite vous la commencerez vous-même, meilleur ce sera pour nous ». Le Lieutenant sortit son revolver et se précipita sur Scarface Charley, Charlie la Balafre, lui criant à la figure « Fils de pute ! » et lui tirant dessus. Charley riposta, éraflant le bras gauche de l’officier. Et voilà, c’est parti ! Encore un de ces cons de sous-fifres qui fout la merde parce qu’il veut des galons en montrant à ses supérieurs comment il se bagarre. En plus, il loupe l’Indien qui est juste en face de lui, et l’autre lui fait mal. Les soldats ouvrirent le feu avec leurs carabines Sharps en .50-70, et les Modoc se mirent à couvert derrière leurs cabanes en ripostant eux aussi. En cinq minutes, on fit cesser le feu des deux côtés, avec un soldat et un Modoc morts, et sept soldats blessés. Les Tuniques Bleues ont ouvert le feu en premier, donc ils avaient l’avantage, mais on dirait qu’il leur manquait encore un peu d’entraînement parce qu’ils n’ont même pas été capables de buter plus d’Indiens qu’un seul et qu’ils n’en ont même pas blessé d’autres, tout en ayant déjà sept blessés chez eux, spécialement quand on sait que les Indiens n’avaient pas la réputation d’être des tireurs exceptionnels. En entendant le bruit des coups de feu, les civils tirèrent dans le camp de Hooker Jim avec leurs fusils Henry et leurs fusils de chasse juxtaposés, blessant une femme et tuant son enfant, avant de battre en retraite en laissant deux morts derrière eux. Eux aussi, c’étaient des nuls. Avec des armes à répétition et des cracheurs de plomb, ils n’arrivent même pas à descendre des guerriers, juste une femme et un enfant qui étaient sans armes, et en plus, ils laissent deux des leurs par-terre. Pendant que les soldats brûlaient son village, Jack emmena ses guerriers vers le Sud en Californie, sur la berge Ouest du Lac Tule. Ses femmes et ses enfants s’enfuirent dans des canoës. Les Modoc de Jack prévinrent des colons Blancs et leur dirent qu’il était préférable pour eux de quitter le pays, mais la bande de Hooker Jim tua une douzaine d’hommes en s’enfuyant le long de la rive Est du lac. Comme la rumeur de la bataille se répandait, des fermiers amicaux tentèrent d’escorter une autre bande de Modoc sortis de leur réserve, avec à sa tête Shacknasty Jim, Jim Baraque Méchante, depuis Hot Creek jusqu’à la réserve. A Linkville, Oregon, une bande de querelleurs ivres menacèrent de lyncher les Modoc de Hot Creek et les effraya tellement qu’ils s’enfuirent pour rejoindre les fugitifs.

la bataille des lava beds 1
la bataille des lava beds 1

De gauche à droite, Scarface Charley, l’homme à la balafre sur la joue droite qui tourne la tête pour la cacher, Bogus Charley, ou «Charlie le Faux-Jeton», Steamboat Frank, ou «Frank du Bateau à Vapeur», Long Jim, ou «Jim le Long», et Shacknasty Jim. Long Jim porte une veste de l’Armée. Bien avant la guerre, beaucoup de Modoc avaient travaillé comme cow-boys pour les fermiers Blancs et avaient depuis longtemps abandonné leurs vêtements traditionnels. Mais une toque en fourrure Russe ou un petit chapeau de bourgeois, ça fait bizarre, sur la tête de Japonais. Ils ont les mains dans les poches. Manque plus que la cigarette.

Les fugitifs se rassemblèrent dans les Lava Beds, les Lits de Lave, cinquante miles carrés de prairies couvertes de buissons épineux et marquées par un paysage lunaire de restes volcaniques criblés de fissures, de crêtes et de grottes au Sud du Lac Tule. Le terrain accidenté des Beds offrait une série de positions défensives naturelles, et les Indiens y établirent une « forteresse » au milieu d’un fouillis de lave durcie, près des berges du lac. Lorsqu’il apprit la catastrophe dont ses subordonnés s’étaient rendus responsables, CANBY ordonna que l’on concentrât toutes les forces disponibles sur les Lava Beds. Son commandant sur le terrain était le Lieutenant Colonel Frank WHEATON du 21st. Infantry qui, comme CANBY, était un vétéran aguerri de la Guerre Civile.

Les forces de WHEATON comprenaient trois compagnies de la 21st. Infantry, trois de la 1st. Cavalry, et une section d’obusiers de montagne de 12 livres. Les 225 soldats de WHEATON étaient renforcés de 133 Volontaires de l’Oregon, dont beaucoup étaient des Indiens de la réserve Klamath, et 29 Californiens. En face de cette armée se trouvaient environ 150 Modoc, dont 50 guerriers.

Au soir du 16 Janvier 1872, comme les hommes de WHEATON prenaient place sur une falaise surplombant les Lava Beds, les Modoc terminaient la préparation finale de leurs défenses. Curly Headed Doctor érigea un totem pour la Dance des Esprits, décoré avec des talismans sacrés, au centre de la « forteresse », et entoura toute la zone d’un cercle protecteur fait d’herbe tressée peinte en rouge. Puis le sorcier entraîna les Modoc dans une danse lancinante qui dura toute la nuit, et dont les échos rebondirent sur les escarpements de lave vers des soldats grelottants agglutinés autour de feux de broussailles. WHEATON lança son assaut simultané de l’Est et de l’Ouest à 4H00 du matin. L’infanterie était armée du fusil réglementaire Springfield Model 1868 en .50-70.

Le Model 1868 fut la troisième des neuf versions du « Trapdoor », et on en fabriqua 51 389 exemplaires de 1868 à 1872. Beaucoup de composants proviennent des fusils Springfield Model 1861 et Model 1863. La caractéristique principale est la culasse pivotant vers l’avant, dont l’idée avait été piquée à Hiram BERDAN  par Erskine S. ALLIN. L’affaire fit l’objet d’un long procès finissant après la mort de BERDAN, qui criait tout le temps « ALLIN, pour qu’elle revienne… ».

Quelques-uns des Volontaires avaient été dotés de Springfield, et les autres portaient des fusils de sport. Les Compagnies B et G de la 1st. Cavalry étaient armées de carabines Sharps en .50-70, alors que la Compagnie F avait des carabines à répétition Spencer Model 1865 à sept coups en calibre .56-50. Les Modoc les affrontaient avec des fusils se chargeant par la bouche et des revolvers à percussion. Bref, ils étaient à 50 contre 387, et pas vraiment à armes égales. On sait donc déjà comment ça va finir : mal. Mais pour qui ?

Les obusiers de montagne donnèrent le signal de l’attaque, mais se turent bientôt parce qu’un brouillard blanc recouvrait le champ de bataille et gênait l’observation. Très vite, les hommes de GREEN se mirent à tirer sur des fantômes, alors que les Modoc les plus près se trouvaient à un mile de là et que leur forteresse était encore à plus de trois miles. Lorsque les soldats arrivèrent enfin à portée de tir, les Indiens, la tête hérissée d’un camouflage de buissons, ouvrirent un feu nourri sur eux puis disparurent. Les soldats se retrouvèrent seuls, piétinant lentement à travers une brume vide, et déchirant leurs chaussures et leurs habits sur les arêtes vives des rochers de lave. En fin d’après-midi, on mit fin à l’attaque. Les guerriers Modoc, aidés par leurs femmes qui rechargeaient les fusils de rechange pendant qu’ils tiraient, surent tirer avantage de leur ligne intérieure en envoyant de petites escouades d’un point à un autre, défiant effrontément leurs ennemis en leur envoyant injures et balles, les clouant au sol là où ils étaient. Avec tous les cris et les coups de feu qu’ils entendaient, beaucoup de soldats croyaient que les Indiens étaient plus nombreux qu’eux. La confiance de l’Army fondit encore plus lorsque plusieurs cartouches de Spencer ne partirent pas, et que certaines carabines Sharps s’enrayèrent à cause d’un extracteur défectueux. Au début de l’action, les Volontaires de l’Oregon avaient déjà déclaré une paix séparée, et beaucoup de réguliers se précipitèrent vers l’arrière pour se réfugier dans le brouillard. Au crépuscule, il restait moins de 100 soldats en action. Les Klamath ne montraient aucune envie de se battre, et donnèrent des amorces, de la poudre et des cartouches aux Modoc qu’ils rencontraient cachés dans le brouillard. Beaucoup de Modoc purent se réarmer avec des fusils, des carabines et des munitions que les autres avaient abandonnés. Voilà. Tout faux, les mecs, à peine c’est commencé.

Les Volontaires en retraite avaient laissé derrière eux des fusils Remington et Ballard, et Shacknasty Jim récupéra le trophée du jour, un fusil à répétition Henry à seize coups. Les Modoc démontèrent des cartouches capturées afin de récupérer de la poudre et du plomb pour leurs armes à chargement par la bouche. Du côté des défenseurs, les tireurs isolés avaient tué quatorze attaquants et en avaient blessé vingt trois, sans aucune perte chez eux. Le General CANBY renvoya un WHEATON écrasé qui, dans le sillage de sa défaite, avait appelé 1000 hommes en renfort avec un support de bateaux et de mortiers pour débusquer les Modoc. WHEATON fut remplacé par le Colonel Alvan C. GILLEM du 1st. U.S. Cavalry.

Jack et sa suite étaient partisans de la paix, mais il y avait d’autres factions dans la bande qui s’opposaient à tout compromis, dont les hommes de Hooker Jim qui avaient peur de représailles pour les meurtres des colons, et les partisans de Curly Headed Doctor qui croyaient que la magie du sorcier leur assurerait la victoire. Les parlementaires n’avaient pas pouvoir pour garantir à Jack ce qu’il voulait le plus : une réserve sur la Lost River ou même sur les Lava Beds. L’amnistie et la déportation était ce qu’ils pouvaient lui offrir de mieux. Pour compliquer les choses, l’Oregon poursuivit plusieurs Modoc pour meurtre. La sélection avait été faite au hasard et elle incluait Scarface Charley, lequel n’avait tué personne, sauf au combat. L’un des pontes de l’Oregon garantit aux Modoc qu’ils seraient tous pendus. Un autre leur dit qu’ils seraient brûlés vifs s’ils se rendaient. Pendant que la marée des palabres montait et descendait, les hommes de GILLEM se rapprochèrent des Lava Beds, et déconcertèrent les Indiens en capturant trente trois chevaux. Encore un coup dans le dos de ces salauds de visages-pâles à la langue fourchue. Pendant qu’on discute pour faire la paix, l’autre vient par derrière pour te niquer tes billes. Déjà maigre avant, l’intendance de Jack s’érodait. Déguisé de force avec des vêtements de femme avec des Modoc « durs » qui se moquaient de lui pour cette raison, Jack accepta finalement de les mener pour tuer les parlementaires au cours d’une rencontre prévue pour le 11 Avril 1873. Curly Headed Doctor, Hooker Jim et leurs partisans, étaient convaincus que l’armée battrait en retraite si le General CANBY était tué. Bien que prévenu du complot par Toby Riddle, Toby Devinette, une femme Modoc qui, avec son mari Frank, servait d’interprète, CANBY méprisa le danger. Les parlementaires MEACHAM et L.S. DYAR firent preuve de moins de témérité que le General et glissèrent des derringers dans leurs poches. Le dernier membre de l’équipe de négociateurs, le Reverend Eleasar THOMAS, avait placé toute sa confiance en Dieu. Lorsque les parlementaires et les époux Riddle arrivèrent à la tente de conférence qui avait été plantée entre les lignes, ils furent accueillis par Captain Jack et sept autres Modoc portant ouvertement des revolvers. D’autres Indiens, armés de fusils, étaient cachés dans les rochers. Coup tordu pour coup tordu. T’vas voir t’t’à l’heure. Comme CANBY distribuait des cigares, Jack, dans un dernier petit effort pour éviter un désastre imminent, réitéra une nouvelle fois sa requête pour une réserve, offrant même de croire CANBY « sur parole ». Le mot n’était pas, il ne pouvait pas l’être, à-propos. Sentant que les dés étaient jetés, Jack cria « C’est parti ! » en Modoc, dégaina son revolver et tira sur CANBY. L’arme fit long-feu, Jack ramena de nouveau le chien en arrière et appuya une nouvelle fois sur la détente, touchant le General en dessous de l’œil gauche. Mortellement blessé, CANBY tomba par terre, se releva et s’enfuit en titubant. Lorsque le General s’écroula de nouveau un peu plus loin, Ellen’s Man George, George le Mari d’Hélène, lui tira dessus avec un fusil, et Jack le poignarda. Ben merde… Pendant ce temps-là, Boston Charley, Charlie de Boston, tua le Reverend THOMAS, se moquant du prêtre parce que sa magie ne marchait pas. MEACHAM, brandissant son derringer, se retourna sur ses talons et se mit à courir, jusqu’à ce qu’il fût fauché par une balle et qu’il tombât au sol. DYAR, son derringer dans la main lui aussi, se précipita vers les lignes de l’armée avec Frank Riddle. Comme les deux hommes s’enfuyaient, les Modoc, qui n’avaient jamais eu la moindre intention de tuer les Riddle, d’ailleurs Scarfaced Charley qui refusait de participer à ces meurtres, avait menacé de tirer sur quiconque leur ferait du mal, se mirent à détrousser CANBY, MEACHAM et THOMAS. Jack prit la vareuse de l’uniforme du General et Ellen’s Man sa montre. Boston Charley fit quelques tentatives pour couper la tête de CANBY et se posait des questions sur la meilleure façon de scalper un chauve, lorsque Toby Riddle cria « Voilà les soldats ! » Les Modoc s’enfuirent. Des sauvages, que j’te dis, ces Indiens. Des sauvages ! A peine l’autre il est par terre qu’il a déjà plus de veste ni de montre. C’est comme si tu t’arrêtes sur l’autoroute pour changer un pneu, à peine t’as commencé à l’avant qu’il y a quelqu’un qui démonte la roue arrière pour partir avec. Et le gros chauve, ce con, y a même pas moyen de le scalper comme il faut. C’est quand-même un monde, çà, madame !

Lorsque l’histoire fut relatée dans les journaux, le public cria revanche. Le Président GRANT abandonna sa politique de paix, et le General William T. SHERMAN, qui était loin d’être un ami des Indigènes Américains dans les meilleures circonstances, préconisa une « extermination pure et simple » des Modoc et ordonna l’envoi de renforts vers les Lava Beds. Parmi les effectifs ajoutés aux forces du Colonel GILLEM, on compta 72 éclaireurs Indiens de Warm Springs, qui remplacèrent les Klamath inutiles. La force de l’armée grimpa à 1000 hommes y compris quatre compagnies de cavalerie, cinq d’infanterie et quatre batteries d’artillerie. Le 14 Avril, GILLEM donna l’ordre aux Compagnies F et K de la 1st. Cavalry, aux E et G de la 12th. Infantry, aux Batteries K, M et E de la 4th. Artillery, qui servait d’infanterie, et aux Indiens de Warm Springs, d’attaquer depuis l’ouest et le sud dans un mouvement de balayage. Trois compagnies de la 21st. Infantry et les Compagnies G et B de la 1st. Cavalry pénétrèrent de l’est, dans l’espoir de faire la jonction avec les forces de l’ouest. L’assaut commença le jour suivant et les Modoc prirent les soldats sous leur feu de loin. Quand le soleil se coucha et bien que les officiers eussent réussi à remettre leurs hommes en mouvement, les soldats, qui avaient perdu trois morts et six blessés, n’avaient avancé que d’un demi mile. Aucune perte n’était à déplorer chez les Modoc. L’armée s’enterra et résista pendant toute une nuit remplie de cris où on s’échangeait des obscénités et des coups de feu, et du grondement régulier des obusiers ainsi que des mortiers de campagne. Ces dernières armes, grâce à leur tir vertical, lâchèrent quelques obus directement dans la forteresse. Au matin, les soldats enjambèrent la corde magique, coupèrent les Indiens du lac et de leur réserve d’eau, et s’approchèrent à cinquante yards du quartier-général de Jack. La magie de Curly Headed Doctor fut encore plus sérieusement inefficace lorsque les Indiens souffrirent de leurs premières pertes depuis la Lost River. Plusieurs hommes et femmes avaient été blessés, et l’un des hommes s’était transformé en fumée en essayant de retirer avec ses dents la fusée d’un obus qui n’avait pas explosé. La situation tactique étant désespérée, Captain Jack exfiltra ses guerriers et leurs parents vers le sud, à travers les lignes de l’armée et sous le couvert de la nuit. Lorsque les soldats pénétrèrent dans la forteresse abandonnée le matin suivant, ils ne trouvèrent personne d’autre qu’un vieil homme blessé, lequel fut immédiatement tué et scalpé, et dont le trophée macabre fut divisé en huit morceaux. Inquiet de l’évasion de sa proie, le Colonel GILLEM expédia des patrouilles dans tout le pays aux alentours. Mais les Modoc étaient restés dans les Lava Beds, y trouvant du gibier et des grottes dans lesquelles ils puisaient de l’eau. En quelques jours, leur nouveau site fut découvert par les éclaireurs de Warm Springs.

Le 26 Avril, GILLEM envoya le Capitaine d’artillerie Evan THOMAS avec un détachement de 64 hommes, dont les Batteries A et K de la 4th. Artillery, et la Compagnie K de la 12th. Infantry, pour prendre position en hauteur d’où ils devraient bombarder les Indiens. Bien que les officiers des patrouilles fussent tous des vétérans de la Guerre Civile, ils méprisèrent les procédures de base en matière de sécurité et s’arrêtèrent pour déjeuner au centre d’une embuscade montée par Scarface Charley. Lorsque Charley et ses 24 guerriers ouvrirent le feu, les soldats paniquèrent. La Compagnie E du Captain Thomas WRIGHT tenta de donner l’assaut contre les attaquants, mais le Capitaine fut tué et ses hommes mis en déroute. Le Captain THOMAS rassembla vingt hommes dans un réduit, mais les Modoc gardèrent l’avantage et les tuèrent tous. Vers 03H00 de l’après-midi, Charley cria « Tout ce que ce qu’il vous reste à faire, à ceux d’entre vous qui ne sont pas encore morts, c’est de rentrer chez vous. Nous ne voulons pas vous tuer tous en un seul jour. » Puis il disparut avec ses Modoc. Bien qu’au courant de l’attaque subie par THOMAS, GILLEM était convaincu que le corps expéditionnaire n’était pas en danger et n’envoya pas de relève avant la fin du jour. Après avoir tâtonné toute la nuit, les renforts atteignirent le champ de bataille le lendemain matin. L’armée avait perdu 23 morts, y compris THOMAs et tous ses officiers, et 19 blessés. La plupart des hommes avaient été touchés plus d’une fois, et l’un des soldats avait reçu vingt balles. Les Modoc avaient peut-être perdu un seul homme.

Le désastre coûta sa place à GILLEM. Le Colonel Jefferson C. DAVIS, un dur à cuire vétéran de la Guerre Civile portant un nom bizarre, succéda à CANBY et prit lui-même le commandement sur le terrain. Eh oui, bizarre et incongru, ce nom, mais ce n’est pas le Jefferson DAVIS qui fut Président des Etats Confédérés pendant la Guerre de Sécession, celui-là s’appelait Jefferson F. DAVIS et il ne reprit pas de service dans l’armée. A l’époque où se passe cette histoire, l’ancien Président avait d’autres chats à fouetter contre le Gouvernement des Etats Unis, et dirigeait une compagnie d’assurance.

Peu de temps après l’arrivée de DAVIS, les Modoc capturèrent un nouveau convoi d’approvisionnement de l’Armée, blessant trois soldats de plus et continuant à se faire mal voir. En réponse, DAVIS envoya le Captain H.C. HASBROUCK avec la Batterie B du 4th. Artillery, montée et servant de cavalerie, les Compagnies B et G de la 1st. Cavalry et les éclaireurs de Warm Springs après les Modoc. HASBROUCK divisa ses forces, campant avec les compagnies de cavalerie sur les bords du Lac Sorass, où les Modoc lancèrent une attaque surprise à l’aube du 10 Mai. Bien que les Indiens fussent victorieux au début, HASBROUCK rassembla ses hommes et, pendant que le Sergeant Thomas KELLY hurlait « Nom de Dieu ! il faut charger ! », contre attaqua et parvint à les repousser. L’armée avait perdu trois morts et six blessés. Les Modoc, comme toujours, avaient donné plus qu’ils n’en avaient, ne perdant que Ellen’s Man. Par contre, ils perdirent leur intendance et la plupart de leurs munitions au profit des éclaireurs de Warm Springs, qui les attaquèrent au moment où ils se retiraient. Démoralisé par cette défaite, Jack fut abandonné par Hooker Jim et les militants qui l’avaient poussé à tuer CANBY. A court de vivres et de munitions, leurs vêtements en haillons et chassés par des soldats de plus en plus sûrs d’eux-mêmes, les Modoc commencèrent à craquer. La bande de Hooker Jim se rendit le 22 Mai. Jim, Bogus Charley, Steamboat Frank et Shacknasty Jim se portèrent très vite volontaires pour traquer Jack pour le compte de l’armée. Ils le trouvèrent bientôt. L’ironie de la reddition que lui demandaient ses anciens alliés, qui l’avaient eux-mêmes poussé donc ce combat inégal, ne fut pas perdue sur un Captain Jack en colère, lequel rejeta la proposition. Le temps travaillait pour le compte de l’armée, et les Modoc se rendirent par petits groupes, pendant toute la dernière semaine de Mai. La reddition ne signifiait pas forcément la sécurité, puisque quatre guerriers désarmés furent tués par les Vigilantes de l’Oregon. Jack, reconnaissant que « ses jambes le lâchaient », reconnut l’inévitable et capitula le 1er. Juin.

Le désir qu’avait DAVIS d’exécuter sommairement les chefs Modoc fut frustré par des ordres de Washington de juger sommairement Captain Jack, John Schonchin, qui était quelqu’un d’autre que le chef Old Schonchin, Slolux et Black Jim, pour l’assassinat de CANBY et de THOMAS. On accorda l’amnistie à Hooker Jim et à ses fauves pour les services qu’ils avaient rendu. Le procès, ou ce qu’il fut, eut lieu devant un tribunal militaire pendant que l’on montait un échafaud au dehors. Les Modoc accusés n’eurent pas d’avocat pour les défendre et ils furent très vite reconnus coupables et condamnés à être pendus. L’opinion publique nationale tourna très vite en faveur des braves et habiles soldats qui avaient combattu contre tous, pour le pays où ils étaient nés. En réponse, le Président GRANT gracia Barncho et Slolux, des jeunes hommes qui n’avaient joué qu’un rôle mineur dans les tueries. A 10H00 du matin le 3 Octobre 1873, après avoir, comme par humour noir, offert au prêtre qui était en charge vingt cinq chevaux et ses deux femmes s’il acceptait de prendre sa place, Jack et ses trois camarades furent exécutés. L’armée, en son honneur, refusa d’honorer les mandats d’arrêt de l’Oregon pour un certain nombre de guerriers survivants. Le 12 Octobre 1873, 153 Modoc entraient sur le Territoire Indien, arrivant finalement à la Quapaw Agency où on leur donna pour une valeur de 524,40 $ en bois de construction de façon à ce qu’ils pussent s’en faire des abris pour l’hiver. Au printemps, les réfugiés se déplacèrent vers une réserve de 4000 acres. Tragiquement, l’adaptabilité des Modoc à leur habitat ne s’étendit pas à leur santé. En 1879, il ne restait que 103 de ceux qui avaient été déportés d’origine. Leur santé était minée à la fois par la maladie et par les vols de leur agent, qui surpayait ses proches en rations et distribuait la plus grande partie de la nourriture quelque part d’autre pour son propre profit. S’il fallait dresser une liste des meilleurs guerriers Américains de toutes les races, les Modoc y auraient la première place, ou n’en seraient pas loin. Oubliés depuis longtemps par la plupart des gens, Captain Jack, Scarface Charley et leurs guerriers, combinèrent l’habileté des Seminole à utiliser le terrain, l’adresse tactique des Nez-Perce, et l’art de la guérilla des Apache. Les Modoc furent probablement de meilleurs tireurs que tous les autres. Jamais, avant cela ni depuis, si peu d’hommes n’ont fait, contre tant d’autres, tellement de choses avec si peu. Voilà, et tout çà à cause de ce petit con de Lieutenant BOUTELLE qui avait tiré le premier, presque un an et demi plus tôt.

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